Nerub - Partie 2

lwsiffer

Désemparé par le départ d'Adeline, Florent essaya d'occuper son esprit et toute son attention se reporta sur le mystérieux Nerub. Il se trouvait stupide d'apporter autant de crédit à un simple message qui ne parlait que d'un personnage folklorique, mais il n'avait rien d'autre à quoi se raccrocher.

Il lança une nouvelle recherche sur le net mais la plupart des sites qu'il visitait ne lui apprenait rien de plus que la dernière fois. Il réussit cependant à trouver une information intéressante : La légende de Nerub était un ancien conte germanique intitulé Der Krieg des Königreiches von unten. S'il arrivait à mettre la main sur ce récit, il pourrait s'en doute en apprendre plus. « Mais en apprendre plus sur quoi ? Je ne vois pas très bien en quoi ça va m‘aider de lire un conte. Et en allemand qui plus est », pensa Florent avec lassitude.

Pour autant, il chercha l'ouvrage en consultant les catalogues de bibliothèque et les sites de vente. Sans grand succès. « Ce n'est sûrement pas le genre de bouquin que je vais trouver en tête de ventes des librairies », ironisa-t-il. Il finit tout de même par le trouver sur un site en allemand qui proposait le livre à un prix exorbitant. Dépité, il se détourna du bureau et se leva pour s'étirer. Il avait passé plusieurs heures devant son ordinateur et se sentait ankylosé.

En tournant la tête vers la table du salon, ses yeux se posèrent sur le téléphone. Adeline était partie depuis quelques jours déjà et il ressentait l'envie de lui parler. Il décrocha le combiné et composa le numéro de ses parents. Il laissa sonner quatre fois avant que quelqu'un ne réponde. Ce n'était pas elle…

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Il balança le combiné qui alla s'écraser contre le mur avec fracas. Le père d'Adeline avait refusé de le laisser lui parler et avait osé lui faire la morale. « Vieux con ! » fulmina-t-il. Dégouté, il jeta un œil sur l'écran de son ordinateur qui affichait toujours la page du site de vente allemand. Sous le coup de la colère, il acheta le livre et paya sans réfléchir. Il n'était plus à ça près.

Quelques jours plus tard, il reçut un paquet. Il arracha l'emballage et découvrit l'ouvrage tant attendu. Celui-ci était en plutôt bon état mais semblait très ancien. Il commença à le feuilleter mais, ne comprenant pas un mot d'allemand, il s'intéressa plutôt aux pages illustrées.

Soudain son regard fut attiré par l'une des images. Il resta bouche bée devant le portrait d'un jeune garçon vêtu de blanc et de rouge. Ce n'était qu'un dessin mais il en était sûr, il l'avait déjà vu. Dans ce rêve, il y a quelques années. « C'est pas croyable » murmura-t-il en contemplant l'illustration. La légende située en-dessous comportait le nom de Nerub, ce qui laissait supposer qu'il s'agissait bien de son portrait.

Florent continua à feuilleter l'ouvrage jusqu'à la fin, mais ne trouva rien d'autre qui puisse l'éclairer. Frustré de ne pas comprendre ce qui était écrit, il pensa tout de suite à la personne qui pourrait pallier à ce problème.

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-Salut Florent, ça faisait un bail !

-Salut Quentin, entre je t'en prie.

Florent guida son ami jusqu'au salon et l'invita à s'assoir.

-Alors comment tu vas ? Et Adeline, elle n'est pas là ?

-Non, elle est chez ses parents. Une longue histoire. Et toi comment vas-tu ?

-Bah, tu sais, la routine. J'ai pas mal de taf en ce moment mais j'aurai bientôt des congés.

Florent apporta deux bières, en tendit une à Quentin et déboucha la sienne en s'asseyant en face de lui.

-En fait, si je t'ai demandé de venir, c'est pour te demander un service, annonça-t-il sans préambule.

-Hum, je m'en doutais un peu, répondit Quentin en souriant. Tu avais l'air préoccupé au téléphone.

-Vraiment ? Ce n'est pas le cas pourtant, mentit-il en prenant un air détaché.

-Alors, c'est quoi ce service ?

-Tu pratiques toujours l'allemand ? Tu avais un bon niveau si je me souviens bien.

-Pas trop mal oui, mais je n'ai plus l'occasion de le parler, ou même de le lire.

-J'ai acheté un livre en allemand et j'aurais besoin d'une traduction.

-Un livre ? Euh… je ne suis pas sûr d'avoir les compétences pou…

-Je n'ai pas besoin d'avoir un travail de professionnel, l'interrompit Florent. Je veux juste connaître les grandes lignes.

-Ok, montre toujours.

-Tu verras, il n'est pas très gros, continua Florent en se levant pour aller chercher le petit livre aux pages défraîchies.

-Mais pourquoi as-tu acheté un livre en allemand si tu ne le comprends pas ?

-…. Je l'ai acheté… sur un coup de tête, répondit-il sans grande conviction.

Son interlocuteur semblait sceptique mais ne fit aucune remarque et saisit l'ouvrage que lui tendait son ami.

-Il n'a pas l'air tout jeune, fit remarquer Quentin en le feuilletant. Effectivement, il n'a pas l'air trop compliqué. Pourquoi tu n'utilises pas un site de traduction en ligne ?

-Mouais… j'ai pas trop confiance en ces trucs-là.

-Bon, je vais voir ce que je peux faire.

-Merci, c'est vraiment sympa.

Ils passèrent le reste de la soirée à parler de tout et de rien, jusqu'à ce que Quentin rentre chez lui à une heure avancée, le livre sous le bras.

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Une semaine s'était écoulée depuis qu'il avait confié le livre à son ami et Florent rongeait son frein pour ne pas l'appeler lui-même. Finalement, un soir en rentrant du travail, il sentit son portable vibrer dans la poche de sa veste. « Enfin ! ».

-Allô ?

-Allô, Florent ? C'est Quentin. Je t'appelle au sujet de ton livre. J'ai pu me pencher un peu dessus.

-Je t'écoute.

-Il s'agit d'une vieille légende allemande qui raconte l'histoire de Nerub, le fils du Roi des Rats. Alors qu'il devait prendre la succession du royaume à la mort de son père, le pouvoir lui a été refusé parce qu'il était trop jeune. Comme le royaume était menacé par une araignée et son armée, il a subtilisé la couronne et s'est enfermé avec sa cour.

Il s'interrompit pour reprendre son souffle.

-Ensuite, si j'ai bien tout compris, il a fusionné avec tous les rats présents pour devenir une sorte d'entité et combattre l'ennemi. Il a remporté la bataille et est devenu le régent du royaume.

Quentin s'arrêta et attendit une remarque de son ami qui ne vint pas.

-Et c'est tout.

-C'est tout ? s'exclama Florent.

Il était déçu. Cela ne lui apportait pas grand-chose de plus par rapport à ce qu'il avait déjà trouvé.

-Oui, dans les grandes lignes. J'ai traduit approximativement.

-Et sur Nerub, il n'y a pas d'autres informations ?

-Nerub ? Euh… je ne crois pas. C'est important ?

-C'est juste…que je… je m'intéresse au personnage, bredouilla-t-il.

- Il y a certains passages dont je ne suis pas sûr, je vais demander de l'aide à un professeur que je côtoie toujours. Je te tiens au courant.

-Merci beaucoup pour ton aide Quentin.

-Y a pas de quoi ! Tu me revaudras ça ! plaisanta-t-il. Ah oui, je ne t'ai pas donné la traduction du titre. C'est La guerre du Royaume d'en bas.

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Florent attendit qu'il soit suffisamment tard pour être sûr de ne croiser personne. Il descendit dans la rue et s'approcha de la bouche d'égout qu'il avait repérée auparavant. Elle était suffisamment isolée pour qu'il puisse descendre en toute discrétion. Il faisait nuit depuis plusieurs heures et l'air frais lui piqua le visage.

A l'aide d'un pied-de-biche, il souleva la plaque et commença à descendre l'échelle prudemment. Il referma l'ouverture avant de continuer et sauta les derniers barreaux pour atterrir dans une eau nauséabonde. L'odeur fétide le prit à la gorge et il réprima un haut-le-cœur. L'eau lui arrivait aux mollets. Heureusement qu'il avait mis ses bottes en caoutchouc.

Il alluma sa lampe frontale et regarda autour de lui. Il ne savait pas trop quel chemin prendre. Il en choisit un au hasard et commença son exploration dans le sous-sol labyrinthique aux multiples couloirs, dont les murs différaient selon l'époque à laquelle ils avaient été construits. Florent avait emmené de la craie et marquait les chemins qu'il empruntait pour éviter de se perdre, mais il se sentait désorienté par cette atmosphère oppressante, dans laquelle régnait une chaleur étouffante.

Pendant plus d'une heure, il arpenta les galeries sans vraiment savoir ce qu'il cherchait. Quand il avait entendu le titre du livre, il avait émis l'hypothèse que le « Royaume d'en bas » faisait peut-être référence aux égouts. Hypothèse plutôt logique puisque des millions de rats grouillaient généralement dans cet endroit. Mais à sa grande surprise, il n'en avait encore croisé aucun. A l'inverse, des bouteilles de bières et des graffitis témoignaient plutôt d'une présence humaine, plus ou moins récente. Au bout de trois heures, il se sentit fatigué, désemparé et stupide.

A un embranchement, il se rendit compte qu'il était déjà passé par là et il sentit la colère monter.

-BORDEL MAIS OU TU TE CACHES?! NERUUUUB !!

Il hurla à plein poumons pour évacuer la tension. Honteux, d'avoir été jusqu'à descendre dans les égouts, il s'apprêtait à remonter quand il entendit un bruit. Ou plutôt une multitude de bruits. Des frottements, des couinements, des grattements contre les parois. Il lâcha le barreau de l'échelle qu'il allait monter pour se diriger vers l'un des boyaux qui l'entourait. Après quelques mètres il en aperçut finalement un. Un rat. Il ne semblait pas effrayé mais dès que Florent s'approchait à moins de deux mètres, il s'éloignait de lui. Puis s'arrêtait. Comme s'il l'attendait pour le guider.

Florent suivit le rat sans plus penser à marquer les murs. Les galeries qu'il empruntait étaient de plus en plus étroites et l'air était devenu irrespirable. Le rat qu'il suivait avait été rejoint par un deuxième, puis un troisième. Ils étaient maintenant six devant lui, mais il pouvait en entendre d'autres autour de lui qui le suivaient, se rapprochaient. Il progressait à présent à mi-cuisses dans l'eau sale, manquant de glisser à certains endroits, à bout de souffle et transpirant à grosses gouttes.

Finalement, après avoir traversé un long boyau dans lequel l'eau était redescendue à un niveau raisonnable, il se retrouva dans une énorme cavité sur laquelle débouchait un impressionnant réseau de galeries. Florent était abasourdi, non pas par cette salle impressionnante nichée au cœur des égouts, mais parce que la pièce était remplie de rats, du sol au plafond. Les parois semblaient se mouvoir par le grouillement des rongeurs qui les recouvraient.

Quand il reprit ses esprits, Florent sentit une présence au fond de la pièce et aperçut une forme blanche, presque lumineuse dans un tel endroit. Il avança vers la silhouette en prenant soin de ne pas écraser les rats qui jonchaient le sol.

-Te voilà enfin.

A ces mots, Florent interrompit ses pas. Devant lui se tenait un jeune homme aux traits fins et à la peau diaphane. Ses cheveux étaient blancs et ses yeux en amande ressemblaient à deux gemmes rouges. Il portait un habit sophistiqué avec de très longues manches et des drapés rouges et blancs, qui rappelaient la couleur de ses yeux et de ses cheveux. Il était magnifique.

Florent le reconnut sans peine. Le visage dans son rêve, le portrait de la légende : Nerub. Il n'arrivait pas à croire qu'il se tenait bel et bien devant lui. Toute la scène lui paraissait surréaliste. Il était assis sur un amas de briques empilées qui formait une sorte de trône, les jambes croisées, la tête posée nonchalamment sur sa main. Il reprit la parole, un sourire narquois sur le visage.

-C'était courageux de t'aventurer jusqu'ici… ou stupide.

Florent sentit des gouttes de sueurs perlées dans son dos et réalisa avec effroi que les rats qui envahissaient la salle se rapprochaient dangereusement de lui. Il se retourna et vit que la sortie était bouchée. Il ne pouvait plus faire un pas. Complètement encerclé, il essaya de garder son calme. Il avait peut-être était imprudent, mais il avait aussi été prévoyant. Il saisit dans son dos le manche d'un pulvérisateur agricole qu'il portait depuis le début de son escapade dans les égouts. Il l'avait rempli d'essence et, combiné à un briquet, il fit jaillir quelques flammes vers le sol en signe d'avertissement.

-S'ils s'approchent encore, je les crame. Dis-leur de reculer, grogna-t-il.

Pas le moins impressionné, Nerub fit un geste de la main et les rats s'écartèrent légèrement. Florent nota les griffes acérées au bout des doigts fins du jeune homme. Il déglutit avec peine tout en essayant de dissimuler sa peur.

-Tu es Nerub, le Roi des Rats ? demanda-t-il d'une voix mal assurée.

-Je ne suis pas Roi à vrai dire, je suis Prince et je te prierai de ne pas me tutoyer. C'est moi qui dirige le Royaume et tous les êtres qui t'entourent sont mes sujets.

- Ça, un Royaume ?! Des égouts putrides emplis d'eau nauséabonde ? Vous n'avez rien d'un Prince, ironisa Florent en essayant de se donner contenance.

-Es-tu venu ici pour m'insulter ? Je me fiche bien de ce que tu peux penser.

-Je suis venu ici… sans savoir ce que je cherchais. Je ne pensais pas que vous existiez vraiment, mais vous êtes là, vous êtes… réel, finit-il par dire sans être sûr d'y croire lui-même. Vous n'êtes pas qu'un personnage de légende.

-Tu ne savais pas ce que tu cherchais, pourtant c'est bien moi que tu espérais trouver. Pourquoi ?

-Je me souviens de votre visage. Il s'est passé quelque chose, n'est-ce pas ? Je ne peux plus avoir d'enfant et j'ai le sentiment… que vous y êtes pour quelque chose.

Nerub esquissa un sourire de satisfaction et se redressa sur son trône.

-Effectivement, nous nous sommes déjà rencontrés.

-Qu'est-ce que vous m‘avez fait ? s'exclama Florent.

Le sourire du Prince disparut. Son regard était devenu froid. Florent sentit un frisson le parcourir.

-Je t'ai puni, répondit-il laconiquement.

-Puni ?! Pour quelle raison ? demanda l'homme, incrédule.

Mais Nerub ne répondit pas et continuait à le fixer.

-Ne me dites pas… que c'est parce que j'ai tué un rat ? dit-il en se souvenant du message qu'il avait reçu. Ça n'a pas de sens ! Vous avez des millions de bestioles sous vos ordres et parce que j'en aurais tué une… vous voulez me faire croire que vous punissez tous ceux qui s'en prennent à… vos sujets ?

-Ce n'était pas n'importe quel sujet, s'écria le Prince en se levant. C'était mon fils ! Le seul héritier du Royaume ! Et tu l'as…

Il ne finit pas sa phrase mais toisa Florent, un air mauvais sur le visage.

-Je… je suis vraiment désolé, s'excusa l'homme en espérant le calmer. Je ne savais pas…

-Bien sûr que non, comment aurais-tu pu ?

-Si vous comprenez que ce n'était pas intentionnel, pourquoi cette punition ? Ne pouvez-vous pas l'annuler ? tenta Florent.

-Qu'est-ce qui te fais croire que je peux réaliser ta demande ?

Florent réfléchit quelques secondes.

-Ce qu'un rat a fait, il peut le défaire.

Nerub parut surpris par cette réplique mais repris vite son aplomb.

-Admettons que ce soit vrai. Je vais reformuler ma question : Qu'est-ce qui te fais croire que je veux réaliser ta demande ? Certes, tu ne savais pas qu'il s'agissait de mon fils. Mais je ne suis pas du genre magnanime.

-Je vous en prie, je ferai tout ce que vous voudrez, le supplia Florent.

Le Prince émit un petit rire.

-Même si j'accepte de défaire ce que j'ai fait, je doute que toi tu acceptes les conditions.

-Quelles conditions ?

- Tu crois que je t'ai jeté une malédiction? Tu me prends pour un sorcier ? Je n'ai pas de pouvoirs surnaturels. Si j'ai réussi à t'enlever ta capacité à procréer ce n'est pas en faisant un tour de magie. Le processus a été plus… pragmatique.

Florent le regarda sans comprendre.

-Qu'est-ce que vous voulez dire ?

Nerub le regarda d'un œil amusé avant de poursuivre.

-Il fallait que j'aspire la vie qui était en toi. Pas ta propre vie, mais celle que tu pouvais donner. Alors je l'ai aspirée. Littéralement.

-Qu'est-ce que…qu'est-ce que vous m'avez fait ?

Mais il n'était plus si sûr de vouloir connaître la réponse.

-Tu ne t'en souviens pas car j'avais fait en sorte que tu sois plus ou moins inconscient. Il suffit que je morde un humain pour qu'il soit plongé dans un état comateux.

« La marque rouge dans mon cou » pensa Florent en portant la main à l'endroit où elle se trouvait quelques années plus tôt.

-Cette nuit-là, je suis entré dans ta chambre, j'ai sucé ton sexe jusqu'à ce que tu éjacules et j'ai avalé ta progéniture jusqu'à ce qu'il n'en reste plus rien.

Florent se sentit mal et cru qu'il allait tourner de l'œil, mais il ne pouvait pas se permettre de tomber dans les pommes dans un endroit pareil. Tous ces rats ne mettraient pas longtemps à le dévorer. Il serra le manche du pulvérisateur de toutes ses forces pour s'accrocher à quelque chose de tangible.

-C'est… dégoûtant, articula-t-il avec difficulté.

-Crois-moi, je n'y ai pris aucun plaisir, contrairement à toi…

-LA FERME ! hurla Florent livide.

Nerub se rapprocha de lui et tous les rats en firent de même.

-Ne me parle plus jamais comme ça, siffla-t-il menaçant. Si tu n'es pas encore mort dans cet égout, c'est parce que je le veux bien.

Florent se força à baisser la tête devant le Prince.

-Pardonnez-moi, dit-il à contrecœur.

-J'aime mieux ça. Nous en étions aux « conditions » qui te rendraient ce que tu as perdu. Rien de plus simple en vérité, il suffit d'accomplir le processus inverse.

-Vous voulez dire… qu'il faudrait que je vous…

-Non, non, ça ne marcherait pas. Pour te rendre ta progéniture, je dois copuler avec toi.

L'homme resta figé de stupeur. Nerub attendit quelques instants avant de poursuivre.

- En d'autres termes, je dois accomplir un acte de pénétration pour réimplanter la semence dans ton corps.

Florent n'arrivait plus à réfléchir. Il regarda le Prince qui affichait un sourire suffisant. « Il se délecte cet enfoiré ! ».

- Je t'avais prévenu que tu refuserais les conditions, conclut-il en retournant s'assoir sur son trône.

- Qu'est-ce qui vous fait croire que je vais refuser ? le défia Florent.

- Vraiment ? Tu serais prêt à tout pour avoir des enfants ? Même à ça ?

Florent resta interdit.

- Laissez-moi y réfléchir quelques jours, finit-il par dire.

- Hmm hmm, pas question. Une fois que tu seras remonté à la surface, cette offre ne sera plus valable. C'est à prendre ou à laisser. Tu dois te décider maintenant.

Pendant de longues minutes qui lui parurent des heures, Florent essaya de réfléchir, sans y parvenir. Son cerveau refusait de fonctionner. Il était en sueur et sentait l'angoisse de l'indécision le gagner.

- Alors ? demanda le Prince qui commençait à s'impatienter.

Florent repensa à sa vie, celle qu'il menait avant, avec Adeline à ses côtés, et celle qu'il vivait maintenant, sans elle. Quand il rentrait le soir, dans leur appartement vide, il n'avait plus goût à rien. Adeline était la femme de sa vie et il ne voulait pas la perdre. Elle voulait avoir un enfant plus que tout et si c'était la seule façon de la faire revenir, il était prêt à tous les sacrifices. D'un certain point de vue, il était responsable de cette situation. C'est après lui que le Prince en avait.

- J'attends, le pressa Nerub.

- J'accepte, murmura-t-il.

- Pardon ?

- J'accepte les conditions, dit-il plus fort en regardant le Prince droit dans les yeux.

- Eh bien ! Si je m'attendais à ça. Très bien. Je me rendrai dans ta demeure d'ici quelques jours. Je ne vais pas te faire l'affront de te faire ça dans mon Royaume putride, ironisa-t-il.

- Une minute ! Pourquoi acceptez-vous si facilement? Qu'est-ce que vous avez à y gagner ?

- J'aurai l'immense satisfaction de pouvoir t'humilier. Pour moi, c'est comme t'infliger une deuxième punition.

- Qu'est-ce qui me prouve que vous dites la vérité et que je pourrai de nouveau avoir des enfants ?

- Rien. Tu vas devoir me croire sur parole.

- Ai-je vraiment le choix ?

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Florent était assis sur l'un des bancs qui longeaient l'allée menant à la maternité de l'hôpital et buvait à petite gorgée le mauvais café qu'il avait pris à la machine du rez-de-chaussée. Plusieurs mois s'étaient écoulés depuis cette fameuse nuit où Nerub avait sonné à sa porte. A sa grande surprise, le Prince portait un costume blanc, une chemise blanche, ainsi qu'une cravate rouge et, malgré l'heure tardive, une paire de lunettes de soleil pour cacher ses yeux atypiques. « Il a pensé à changer d'apparence pour passer inaperçu » avait noté Florent, impressionné.

Cette nuit avait été l'une des plus horribles de sa vie, mais elle n'était plus qu'un lointain souvenir à présent. Qui plus est, elle avait porté ses fruits. Florent avait demandé à passer un nouveau spermogramme et, à la grande stupéfaction des médecins, il ne souffrait plus d'azoospermie. Il avait réussi à convaincre Adeline de revenir et peu de temps après, elle était tombée enceinte. Ils n'avaient jamais été aussi heureux.

La naissance était prévue pour aujourd'hui. Ils avaient décidé de programmer l'accouchement pour que Florent soit présent et rassurer Adeline. Il regarda sa montre, il était temps pour lui de rejoindre sa femme. Il se leva, jeta son gobelet vide dans une poubelle et pénétra à l'intérieur du bâtiment. Il arriva dans la salle d'accouchement et s'approcha d'elle pour la soutenir alors que le travail commençait.

-Poussez Madame, poussez ! demanda la sage-femme.

Après de longues minutes, la tête finit par apparaître, suivie du reste du corps.

-C'est un beau petit garçon.

-Pourquoi il ne crie pas ? demanda Adeline inquiète.

-Ne vous en faites pas, tous les bébés ne crient pas à la naissance. Mais je le trouve bien pâle, on va s'assurer que tout va bien, répondit la sage-femme.

Elle s'éloigna de quelques pas avec le bébé, suivie par quelques membres du personnel médical.

-Oh mon dieu ! Qu'est-ce que c'est que ça ?! s'exclama quelqu'un.

-Quoi ?! Qu'est-ce qu'il a ? cria la mère affolée.

Sans attendre d'explications, Florent se dirigea vers le petit groupe pour voir son enfant et se figea.

-Florent ? Dis quelque chose ! Est-ce qu'il va bien ?

Sur la table que le personnel entourait, le petit garçon à la peau diaphane avait ouvert les yeux. De grands yeux rouges qui luisaient comme des rubis.

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