Nos amies les bêtes

   Dans la forêt lointaine on entend le coucou. Du haut de son grand chêne il répond au hibou. Coucou ! Coucou fait le hibou !

Un soupçon me vint. Coucou ou hibou ? Lequel dans cette histoire chante le premier ? 

   J'en étais là, nourrissant quand même une vague incertitude quand un lapin traversa le chemin devant moi. Il courait vite mais il tourna la tête de mon côté et m'adressa un regard narquois. Après quoi il disparut rapidement entre les troncs dénudés des grands chênes. Qu'un lapin se moque de moi, c'est son droit. D'ailleurs il n'avait rien dit. Mais c'était étonnant tout de même et ce qui suivit le fut plus encore. 

   Contrarié par l'attitude assez désobligeante du lapin, je croisais un grand chien noir qui avait l'air de le pister.  Il s'est arrêté à ma hauteur et il m'a semblé qu'il me tirait la langue. Mais peut-être était-ce simplement qu'il était  essoufflé par sa course.  Donc, jusque là rien de grave.  

   Pourtant le chien a insisté et il s'est installé sans gêne pour déféquer. Il a délibérément posé devant moi une crotte de bonne longueur et consistance qui a aussitôt empesté le fourré. J'y crus voir, avec assez de raison, un peu de provocation.

   Le hibou, le coucou, le lapin et maintenant le chien !  C'était beaucoup.

   Les animaux semblaient ligués contre moi. 

   Je ne comprenais pas. D'autant que mon prénom est François et que mon saint patron a la réputation d'être un ami des bêtes.  Frère hibou, frère coucou, frère lapin et même toi frère chien qui me fais si bien sentir ce que tu penses, vous n'avez rien compris, je suis votre ami !

     M'est venue alors à l'esprit une idée peu raisonnable. Mais il m'arrive souvent, par déformation professionnelle d'invoquer des explications d'ordre irrationnel.  Peut-être y avait-il un lien avec ce que j'avais dit le matin même. Mais c'était  tout de même peu plausible. 

    Pourtant il faut croire aux miracles et aussi incroyable que cela paraisse, le lapin revint sur ses pas, le hibou et le coucou se perchèrent au-dessus de moi et le chien qui était le plus fort en gueule  prit la parole au nom de tous. 

   " Mon petit François commença-t-il d'un ton arrogant ce n'est pas bien ce que tu as dit ce matin dans l'avion.

   - Moi ? .................................................... ?

   - Oui toi! Tu sais très bien de quoi je parle :  Ces propos sexistes et déplacés au sujet des lapins ! Nous comparer aux catholiques ! On avait pourtant dit  pas d'amalgame ! 

   On aimerait bien pouvoir courir, chanter, baiser et chier tranquillement dans les bois. Alors vive la liberté ! Oublie nous et lâche nous un peu !   Bonne balade et Amen"  ajouta-t-il de sorte que la discussion fut close.  

     J'ajoutais quand même, presque par réflexe et pour avoir le dernier mot  "Ite missa est".

     J'ai cru entendre la petite troupe répondre en bougonnant "Deo gratias ". Mais je ne suis pas sûr.

De retour des Philippines dans l'avion le 19 janvier 2015, le Pape a dit aux journalistes , en parlant de la natalité :

Certains croient, excusez-moi du terme, que, pour être bons catholiques, ils doivent être comme des lapins",