Ô beau soleil, je te hais
yaroslavna
A "Cosaque"
Souviens-toi, mon amie, de la plèbe infernale.
Veux-tu encor t'intégrer au monde du futur ?
Les astres illuminent tes matins infidels :
Tu subis, malgré toi, le malaise social
Et tu tentes pourtant de penser au plus pur...
Ô beau soleil.
Souviens-toi, mon amie, de l'enfer citadin,
De la jungle grisâtre où les hommes s'égarent.
Les macabres fanfares de l'ardeur sensorielle
Aiguisent en moi les poignards inhumains
Qui se taisent toujours dans le plus grand des hasards.
Ô beau soleil.
Souviens toi, mon amie, de l'infirme capital :
Comment persister dans un monde sans pitié
Pour n'avoir que des miettes d'un bien fictionnel ?
Il prétend s'imposer comme un être primordial,
Mais se plie d'infection tel un vieillard anémié.
Ô beau soleil.
Souviens-toi, mon amie, de l'abjecte morale,
Qui profite avant tout aux esprits pervertis.
Décadence sans fin et problème sans pareil !
Marchant tout droit vers le suicide général
On marmonne, délirants, un même bruit :
Ô beau soleil.
Souviens-toi, mon amie, de ce Dieu insensible
Il grossit sous l'afflux de notre corruption
Et nos prières perturbent son doux sommeil.
Il est notre berger et nous sommes ses cibles
Récoltant les fruits de son Ascension.
Ô beau soleil.
Souviens-toi, mon amie, de la mort qui nous hante,
Et qui affûte sa faux pour nous achever.
On est vite tiraillé entre jeux et bouteille,
Dévoré par le temps, enivré dans l'attente
Du terme soudain de notre vie insensée.
Ô beau soleil.
Souviens-toi, mon amie, des damnés charognards
Qui s'acharnent sur moi dans un moment de tristesse,
Et planent au-dessus de mes pensers lésionnels
Je rampe, bon vivant, mais sans espoirs :
Je suis si candide mais atteint de vieillesse.
Ô beau soleil.
Souviens-toi, mon amie, des cachets qui m'achèvent,
Ils égayent un instant mes horizons ennuyés
Et effacent gentiment mes torrents sensoriels.
Tant de gens qui résistent et d'autres qui crèvent...
Mon hantise mortelle est d'être sevré.
Ô beau soleil.
Souviens-toi, mon amie, de démence raisonnable,
Elle est à l'image des rêves bipolaires
Qui illustrent si bien mes plaies éternelles.
C'est la seule chose à vivre dans les temps impensables.
Ma folie se rebelle pour former les beaux vers.
Ô beau soleil.
Et ton âme se meurt dans un temple de chair :
Adieu, mon amie, tu t'es perdue trop loin…
Je viens de nulle part sans savoir où je vais.
Porté par les aigles, je volerai dans les airs
Pour enfin admirer ce pays malandrin.
Ô beau soleil, je te hais.