On va rester en vie n'est-ce pas ?
Ellie
Il y a cette enveloppe qui est posée sur le coin de cette table. Une enveloppe couleur vert printemps, sur laquelle se juxtapose des lettres et des chiffres de bâtiments. Rien de plus banal. Les lettres sont mal tracées, et le timbre pourrait presque être qualifié de mauvais goût car on peut y voir dessus Gaston Lagaffe en train d'éternuer.
Cette lettre aurait dû être expédiée il y a des semaines de cela. Et pourtant triste est son destin puisqu'elle ne parviendra jamais jusqu'à toi.
Je n'ai aucune excuse, une boîte aux lettres se trouve à moins de cinq minutes de chez moi. Il aurait suffit que je prenne cette foutue enveloppe et que je la mette dans cette boîte couleur jaune criard.
Il aurait suffit de tellement de choses, oh si seulement tu savais.
Et cette enveloppe qui contient un petit bout de papier sur lequel dansent des phrases qui désormais n'ont plus aucun sens.
Et toi, qui à des centaines de kilomètres t'accrochais à ces mots futiles, à ces quelques phrases dont la syntaxe était bien maladroite et qui ne faisaient que raconter de brefs instants de vie que je voulais bien partager avec toi.
Avec toi, parce je savais qu'en me lisant un sourire se dessinerait peu à peu sur ton visage marqué par l'inquiétude et la tristesse que tu essayais tant bien que mal de cacher. Mais qui ne m'échappait jamais.
La réalité me rattrape, trop vite, trop violemment. Tout semble figé. L'atmosphère est insoutenable. Et moi, et moi, je suis plantée là, devant le miroir devant lequel je ne me reconnais même plus. Le reflet qu'il me renvoie m'est insupportable. Mon cerveau me dicte de faire quelque chose, de fondre en larme, de hurler ou de le briser comme une hystérique. Mais non, je ne bouge pas d'un seul millimètre. Mon corps ne répond plus. Engourdi, inerte, juste prêt à se fracasser sur le sol.
Dites-moi que ça n'est qu'un cauchemar, que la vie va reprendre son cours normalement, que les politistes continueront à animer des débats stériles, et qu'on pourra toujours se moquer du président de la république en l'appelant "gros patapouf".
Et comme un flash, les mots "j'espère que tu vas bien" résonnent en moi comme une plaie ouverte. Je crois entendre les grondements d'une explosion, je crois ressentir le frottements des gens qui courent dans n'importe quelle direction pourvu qu'ils s'échappent. Je crois assister impuissante,au mouvement de panique qui éclate. Je crois ressentir la douleur, et la haine de ceux qui ne pourront plus jamais envoyer de lettres avec Gaston Lagaffe qui éternue, qui ne pourront plus dire "je t'aime", qui ne pourront plus se disputer pour savoir qui devait faire la vaisselle ou sortir snoopy le chien.
Et la mort qui rode au dessus de nos têtes, et l'inhumanité qui gagne du terrain.
A tous ces rendez-vous qui n'auront jamais lieu, à tous ces espoirs massacrés, dis moi encore qu'on va rester en vie. Que l'idée de vengeance ne va pas tous nous tuer intérieurement, que la paix existe encore, quelque part.
Je veux croire que la paix existe encore quelque part, je veux croire que tout changera pour nous..pour les générations futures...un texte émouvant
· Il y a plus de 8 ans ·ade
Merci de ces mots rassurants...
· Il y a plus de 8 ans ·Ellie