Papi End 3/3

Alain Caron

Avec des lentilles, c'est plus efficace, on y voit bien.

Elles sont restées là-haut avec lui, là-haut posées sur son livre de Flaubert. Plus personne ne lis Flaubert, surtout Salômmbo.

Dans le vieux tapis du rez de chaussée, ici tout est flou. On ressent juste un courant d'air frais qui glisse le long de la porte mal isolée. En bas, c'est bien plus calme, on n'entend pas les crissements du bois, ni le cliquetis de l'eau sur le zinc du toit.

Au bord du vieux tapis, nos deux compères attendent avant de repartir. Ah si seulement le vieux avait porté des lentilles, journalières ou non, peu importe. Des lentilles, oui ! Mais non, C'est sans lentilles qu'il faut rouler vers le salon. Il y a pleins de livres ici, certainement Proust, Baudelaire et Platon. Un salon de la Pléiade. Reliure et pages fines.

Un salon d'amateur qui ne servira plus. Les livres seront vendus, déménageurs bretons et papier à bulles qui claque sous les doigts. Une autre vie demain avec d'autres yeux.

Le salon est assez grand. Les lattes du parquet bougent. Il n'a rien entretenu depuis longtemps : un vieux pot de fleur à contourner, un petit sécateur, de la terre sèche, un bidon de désherbant et deux canettes de bière sans étiquette. Alcoolique et jardinier ? l'inverse ?

Les yeux ne retiennent rien. Séparés du corps, ils sont bien seuls.

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