PARCE QU'ILS VONT CRIER/PORQUE VAN A GRITAR
Alicia Roda
PIECE BILINGUE FRANCAIS/ESPAGNOL
GENRE : TRAGI-COMIQUE
THEME : L'INCOMMUNICATION DANS LE COUPLE.
Elle est Française, il est Espagnol, ils ne se comprennent pas. Mais avant tout, ils sont différents : elle crie ; lui tait ses douleurs cachées. Ils se déchirent. Ils sont drôles et fragiles. Ils s'aiment.
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¡ PARCE QU’ILS VONT CRIER /
PORQUE VAN A GRITAR!
de Miranda ABOAL (Alicia RODA)
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Création au Théâtre de Nesle à Paris
du 28 mai au 28 octobre 2007
par la Compagnie Théâtre Amazone
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3 personnages :
- La Femme Qui Crie (LFQC) (elle parle en français)
- L’Homme sur Qui On Va Crier ou El Hombre Al Que Le Van A Gritar (EHAQLVAG) (il parle en espagnol)
- La Voix Off (voix grave masculine, bilingue espagnol-français)
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LE DIALOGUE DE 2 SOURDS
Chacun des deux personnages est juché sur un escabeau, face public, sans pouvoir s’atteindre.
Il a un poisson rouge dans les mains, il est charismatique, drôle et détaché ; il porte un maillot du Barça.
Elle est habillée en rouge, tendue, dénonciatrice, et si fragile en réalité.
♫ Musique Boris Vian : piste = trompette ♫
LA VOIX OFF : Porque van a gritar de Miranda Aboal. Parce qu'ils vont crier.
♫ Vian : piste = trompette ♫
LA VOIX OFF : Entrée des deux paralytiques de l’amour.
La Femme qui crie : Moi, ce n’est qu’en criant que je sais m’exprimer. Certains parlent posément, d’autres pas, c’est une question de tempérament. Il ne s’agit pas de mauvaise éducation, ou de violence, ou d’irrespect. Moi, je ne sais pas exprimer des choses sincères autrement que par le cri, ça sort comme ça, et sinon, ça ne sort pas : d’un coup ça vient, tac, boum.
L’Homme sur qui on va crier : Yo me puedo expresar de las dos maneras, gritando y sin hacerlo. Normalmente lo hago sin gritar, porque la verdad, no me sale tener que gritar, es demasiado esfuerzo para mí.
LA VOIX OFF : Traduction : moi je peux m’exprimer des deux manières, en criant et en m’abstenant de le faire. Normalement, je le fais sans crier, parce qu’à vrai dire, je n’arrive pas à crier.
La Femme qui crie, elle a beaucoup crié dans la rue. Elle s’est mêlée aux bagarres d’autrui.
Un sale type veut se garer et faillit écraser une vieille. ¡Hijo de puta ! Surgit la justicière. ♫ Pif, paf, paf, aïe! Jusqu’à se rendre compte que la vieille qu’elle défendait a disparu depuis longtemps.
Parfois un motard s’approche de la femme qui pédale sur son vélo ; il ralentit et l’invite à tomás algo ? Pauvre ingénu : jaillit alors une symphonie de « et après je te suce la bite, hein, c’est ça ? » Et le brave motard fuit épouvanté.
L’Homme sur qui on va crier : Hay muchos tipos de gente que grita, los que gritan porque les gusta que les escuchen sólo a ellos, los que gritan porque creen que es la mejor manera de instruir a un grupo de personas, los etc…
VOIX OFF : Typologie savante des différents crieurs.
EHAQLVAG : El grito dicen que es la única manera de sacar todo o mostrar todo lo que uno lleva dentro en forma de frustración o no deseo. Esto me lleva a reflexionar que los que gritan lo hacen para desahogar su frustración de una manera autoritaria.
LA VOIX OFF : Cri = frustration ou non-désir, qu’on extériorise autoritairement en l’imposant à autrui.
LFQC : Pour elle, l’acte de crier était comme un électrochoc : mieux que dix séances chez le psy, mieux que faire l’amour sauvagement avec autorisation de pleurer à la fin.
Oui, c’est ça : atteindre un tel paroxysme de démence expiatoire, qu’ensuite tu dors, tu dors et tu dors malheureuse, mais neuve. Une paria du monde. Recommencer.
EHAQLVAG : Para él, era como acabar el día de mal rollo, como una comida sin sal, o como un mal polvo. Gritar es algo que que casi siempre te lleva al malestar. No considero que sea sano para la salud.
LA VOIX OFF : La salud ! Il raconte que crier, c’est pas bon pour la santé, que c’est comme tirer un mauvais coup !
Alors, « Le Cri » : parlons-en du Cri.
EHAQLVAG : Para mí, el grit/
LFQC : ça produit une sensation de dédoublement, de puissance vertigineuse pense-t-elle, c’est passer en une seconde de la douce Cordélia à Gonéril+Régane (les mauvaises filles du roi Lear). Ouah !
Une fois : il a fallu qu’elle raconte à une docteur je-sais-tout comment elle avait provoqué un scandale, jusqu’à se débattre avec un infâme vendeur de soutiens-gorges bas-de-gamme en pleine place surpeuplée de Paris. Et la parfaite-rationnelle-glaciale-jugeuse a rétorqué à la Femme qui crie : «Hmm. Avez-vous considéré que ces actes de violence publique, toujours avec des hommes, ressemblent étrangement à un acte sexuel inabouti ? »
Depuis, la Femme qui crie a décidé d’emprunter d’autres voies pour investiguer dans l’acte sexuel : par exemple, euh rencontrer l’Homme sur qui on va crier ?
LA VOIX OFF : Oh, tu ne vois pas que tu tournes en rond dans ta solitude exacerbée ? Il est à côté, là.
♫ Vian : piste = « Il va lui faire mal » ♫
EHAQLVAG : Pienso luego existo. Pues eso, pensemos para poder existir, si estás en un entorno de gritos, no hay dios que piense con claridad.
LA VOIX OFF : Toute cette théorie, mais il est incroyable ce mec.
EHAQLVAG : Es decir, si estás todo el día gritando, es normal sentir que descargaste para las próximas quince horas, pero no descansas esas quince horas porque te las pasas pensando :
LFQC : Quand j’y pense, l’autre, avec sa moto.
EHAQLVAG : - Qué cabronazo el gordo de la moto.
LA VOIX OFF : Développement de la théorie de l’Anti-cri à partir de « Je pense donc je suis », deux points : pour être, il faut penser. Pour penser, il faut le silence. Donc si tu cries, tu n’es pas. Par conséquent, Elle n’est pas.
EHAQLVAG : En fin, esto de gritar es algo que creo, habría que definir muy bien en cada caso.
LA VOIX OFF : Attention : il est convaincu qu’il faut analyser précisément chaque specimen de cri, avant de l’étiqueter à tort. Por ejemplo, un halètement sexuel, ¿es un grito ?, le LA majeur d’un baryton, ¿es un grito ?, le fameux ALELUYA ! ¿es un grito ?.........
LFQC : L’Homme sur qui on va (peut-être) crier ne se laisse pas connaître. Malgré la main tendue.
Alors ? Alors, il faudra continuer à ruminer le passé.
Un 31 décembre, la Femme qui crie s’est rendue chez ses parents, pour préparer une alléchante terrine de sanglier. Absorbée par ses casseroles, elle sent ♫ une présence sur le seuil de la porte : c’est son père, qui à travers sa myopie, essaye de distinguer qui donc est dans sa cuisine. Mais comprenant que ce n’est qu’elle, sa fille qui vomit crapauds et couleuvres, il part, en la maudissant. Mais les cris, les cris assassins, les projections de poivrons en sauce, champignons en sauce, bloc de marbre en sauce,je-ne-sais-quoi-en-sauce, ont tôt fait de le rattraper.
LA VOIX OFF : Esta chica, es in-so-por-table.
LFQC : Que reste-t-il après cela? La Jachère.
EHAQLVAG : ¿Deberia la Mujer que grita reflexionar sobre esto ?
LMQG : Non !
EHAQLVAG : No. Ella no necesita reflexionar, porque primero grita, y luego en el mejor de los casos se arrepiente LMQG : En partie. EHAQLVAG : en parte.
LA VOIX OFF : Si crier s’avère normal et nécessaire dans un caractère comme celui de la Femme qui crie, pourquoi lorsqu’elle dit à l’Homme sur qui on va crier qu’elle l’aime, le fait-elle dans un murmure, avec une touche de pudeur ?
LFQC : Hein ? Un : la Femme qui crie n’a pas encore rencontré cet autre-là qui ne sait même pas crier.
Deux : s’ils se connaissaient, comment diables feraient-ils, tous les deux ? Ensemble !
L’ironie est la suivante: lui, sa voix est pénétrante, de celles qui feraient s’effondrer un clocher.
Et elle, qui aurait besoin de ce puissant órgano : eh bien, le moindre souffle de vent, deux mots de trop, un peu de pollution parisienne lui dévastent la gorge.
♫ Piste : « Serait-elle si rusée / pour parvenir à ce / que lui se fasse le / gigantesque porte-parole de / ses cris / sans issue ? » version lyrique. ♫
LFQC : Ohhh ?!
EHAQLVAG : Uno : la Mujer que grita ya debería de saber que hay alternativas al grito, como por ejemplo, el diálogo.
LA VOIX OFF : ¿Pero qué diálogo ?
LMQG : c’est quoi, le dialogue ?
LA VOIX OFF : Donc : Un : la Femme qui crie devrait savoir qu’il existe des alternatives au cri, comme par exemple le dialogue.
EHAQLVAG : O el diálogo. Dos : si lo conociera, a él, seguramente no tendría la necesidad de gritarle, porque no es necesario.
LA VOIX OFF : Deux : si elle le connaissait, lui, elle n’aurait pas besoin de lui crier dessus, parce que ce n’est point nécessaire.
EHAQLVAG : Él comprende muy bien la necesidad de des-frustración de ella.
VOIX OFF : La véritable ironie, c’est que l’Homme à la voix d’outre-tombe n’a pas besoin qu’on lui crie dessus pour comprendre autrui, et dans le cas qui nous occupe, préoccupe, pour la comprendre, avec son désir de dé-frustration.
LFQC : La Femme qui crie demande à ce nouvel homme : Cela ne vous paraît pas incroyable que la première action vitale du nouveau-né soit de crier ? Houhou. Allô ?/ Silencio… en la noche, ya todo está en calma, el músculo duerme, la ambición descansa. ♫ Pardon /
Connais-tu le bellissime tableau de Munch : « le Cri » ? / Vont-ils réussir à se rencontrer ?
Alors : elle change de tactique et pendant toute une nuit, elle lui parle ; et lui, précautionneusement raconte, converse, susurre, et elle acquiesce avec enchantement. ♫ ZZZ ♫
Pero :
¡Ay !
Elle a crié.
S’est fermée de chez fermée, apeurée.
Mais incapable de proférer la moindre explication.
Car elle ne sait pas parler, seulement parler.
Et lui attend, là, dérouté.
LA VOIX OFF : Jusqu’à ce que lui décide d’en finir avec cette situation d’impuissance silencieuse, et de discuter avec elle. Et elle qui ne savait pas parler, seulement parler, elle parle,
LFQC : Ohh, je parle. EHAQLVAG : habla por fin.
VOIX OFF : et de là naît une des plus merveilleuses histoires entre deux êtres :
La Femme qui crie et l’Homme sur qui on va crier.
Elle naît de la conversation. Mais non pas du cri.
Alors il lui suggère : Alors il lui suggère :
EHAQLVAG :
Seguimos mañana? Hazme el amor.
♫ Piste : Slow ♫
LFQC : Alors justement : la première fois, après tant de doutes, détours : les halètements. Los jadeos.
Et ça finit par avoir lieu. Ça. La lenteur inconnue des pudiques caresses, la longuissime découverte. Los jadeos. Los jadeos.
Déception de son amour silencieux : mais pourquoi ne crie-t-il pas, cet homme ? Est-il muselé en dedans ? Cet homme si étrange ?
Mais peu à peu, l’Homme, cette nuit-là oublie son pare-vent théorique. Et l’Homme
Et il crie. Et il crie. Et il criiiiiiiiiiiiiiiiie. Tellement.
Et elle, elle est là, là, la très silencieuse spectatrice de l’Homme qui jamais ne criait. De él.
EHAQLVAG : Sí, pero esto me lleva a pensar : Il s’interroge :
¿el grito está justificado en el amor apasionado, o realmente ni siquiera en este caso se justifica ? Yo prefiero gritar en silencio y ser gritado. Que no me grites, joder !
LFQC : Je ne te crie pas, ♫ Vian : piste = Vas-y fais-lui mal” ♫ hmggrhmgrm… !
Juste : je trouve que tu t’accroches à ta théorie et basta !
C’est à peine si tu admets que tu cries en silence depuis que tu m’aim… Eeet en plus, on fait quoi, là ? Hein ?
EHAQLVAG : No hacemos nada.
VOIX OFF : On ne fait rien.
EHAQLVAG : Realmente creo que su problema viene de lejos, je crois que ton problème vient de loin, por eso grita, c’est pour ça que tu cries y cree que lo hace porque los demás la están jodiendo todo el tiempo, yo sin embargo creo que lo hace para joder ella a los demás.
LFQC : Je ne joue plus.
♫ Vian : piste = “Vas-y fais-lui mal” ♫ (PAF ! PAF ! yeux fermés)
LA VOIX OFF : Etrange, hein, la fabrication de l’amour.
LFQC : Bon écoute, moi aussi je peux t’expliquer superbement, devant tout le monde, que tu as un problème psychologique. Sa-lut.
Bon, je cède la parole, exaspérant p’tit oiseau. Vas-y.
EHAQLVAG : Yo no entiendo nada, o lo que es peor : no quiero entender nada.
VOIX OFF : Il ne comprend rien, voire même : il fait mine de ne rien comprendre.
LFQC : De toute façon, plus qu’exactement une demi-heure, et tu repars dans ton pays, non ?
VOIX OFF : (chanté sur l'air de "Sombras nada mas")
Kiloooo/metros
entre los dos / ellos dooos,
(chanté et dansé sur les escabeaux :)
Sombras nada más (LFQC)
Entre tu vida y mi vida (EHAQLVAG)
Sombras nada más
Entre mi amor y tu amor.
♫ Intro du boléro « Sombras nada más » ♫
Qué breve fue tu presencia en mi hastío
Qué tibias fueron tus manos y tu voz
Como luciérnaga llegó
Tu luz y disipó
Las sombras de mi rincón.
Y yo quedé como un duende temblando
Sin el azul de tus ojos de mar
EHAQLVAG : Para! No tiene sentido, todo esto.
LFQC : Qu’est-ce qui n’a pas de sens ? C’est quoi cette tentative de m’avouer les choses de façon détournée ?
LA VOIX OFF : Les enfants ! Vous y étiez presque !
LFQC : Allez, finis donc avec la phrase qu’absolument tous nous cracrachent : « Toi, tu-es-complètement-folle.» « Tu as un problème avec les hommes.»
Tu me manques déjà.
VOIX OFF : Toi aussi tu me manques.
EHAQLVAG : Yo tambien te extraño.
LFQC :
Joker.
Je me sens loin.
Je suis là à te frôler.
Mais loin.
Crie-moi quelque chose
Crie-moi, je te dis !!
Tu veux un yaourt ?
Et toi ? De quelle couleur es-tu ?
EHAQLVAG : Ya voy yo a por el yogurt.
Soy del color de la luna, no tengo luz propia, necesito la tuya para tener color.
LA VOIX OFF : Je suis couleur de lune, je n’ai pas de lumière propre, j’ai besoin de la tienne pour me colorer.
♫ Vian : piste = « Il lui a fait mal »-
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TEXTE EROTICOÏDE (LA VOIX OFF)
Il est descendu de l’escabeau, elle l’attend attristée. Il revient, un yaourt à la main. Il l’ouvre, et lui en couvre le visage. Puis il la couche très doucement et l’enduit tendrement, totalement de yaourt. Elle reste à terre pendant le texte suivant. Vers la fin du texte, l’acteur incite le public (et le public monte effectivement sur scène…) à venir la couvrir de yaourt, jusqu’à son réveil en hurlant.
LA VOIX OFF :
Là, la femme était là, sur les lattes en bois, étendue, et elle ne m’avait pas entendu je crois. Non, elle ne bougeait guère. Sa robe tachée remontait jusqu’à la naissance de son ventre lumineux. Ses cuisses asymétriques. Ses rotules affamées. Sa chair, semblait se débattre imperceptiblement contre qui sait quel monstre ; ou peut-être étaient-ce mes chairs qui luttaient, luttaient pour ne pas… Je restais noyé dans l’ombre de la porte, palpitant, battant la mesure de son pouls, le sien, sa violente respiration s’insinuait en moi, fouillait dans mon professionnalisme, me faisait perdre pied sous la marée montante de mon herculéenne attirance…, où donc était mon mandat d’arrêt ? Non, je ne devais pas, pas m’engouffrer dans cette femme, mais les battements de cette gisante grandissaient en moi, hurlaient, et ses membres quasiment sans vie me poulpisaient vers elle, me tentaculaient, vers cette peau-là, celle de son ventre, oublié.
C’est alors que mes yeux assoiffés se posèrent sur un objet : un démesuré pot de, de (on voit apparaître le Yaourt, puis EHAQLVAG) c’était du yaourt blanc, de la même blancheur que celle de cette femme attendante. Et soudainement le yaourt se mit à vociférer, mais non, les yaourts n’existent pas, à vociférer :
♫ GLIN GLIN MAGIQUES ♫
« Viens ! viens ! viens ! viens m’enduire ! vas-y ! allez ! sois pas trouillard ! c’est pour conjurer un sort ! viens ! ne te méprends pas, cochon ! approche ! viens me sauver! me libérer du puissant charme ! allez enduis-moi ! enduis-moi ! fais voir tes couilles ! viens ! lève-toi ! bouge-toi ! grouille-toi ! trempe tes doigts dans le yaourt et viens ! désensorcelle-moi ! viens ! enduis-moi toute!! Toute entière de blanc vêtue. Enduis-moi. Enduis-moi. Hâte-toi, je t’en prie. Submerge-moi, asperge-moi, pulvérise-moi, verse-moi, coule-moi, goutte-à-goutte-moi, arrose-moi, étale-moi, éclabousse-moi, allez viens et enduis-moi. Toute blanche!
POEME DE LA HAINE (LFQC)
LFQC : Oh ! ça va pas ? On arrête tout, zou ! Sortez, tous ! On arrête tout !
Suis-je si pauvre, que finalement je n’aurai connu que : Eux ?
Les hommes qui ronflent dans mon lit ?
Les larrons en foire, bonnet blanc et blanc bonnet.
Les metteurs en scène qui malgré ton rempart de professionnalisme t’invitent chez eux.
Les Rmistes depuis dix ans, qui travaillent au black et critiquent le système pourri d’un pays qui n’est pas le leur .
Ceux qui la première semaine te payent le restaurant, puis pendant une année entière vident quotidiennement ton frigo.
Ce quasi inconnu à qui tu occultes ta douleur aux chevilles pour ne pas interrompre notre course clandestine autour du lac suisse.
Le même, qui une année partagée plus tard, te reste quasiment inconnu.
Les hommes qui ronflent dans mon lit.
Ceux qui t’expliquent, te répètent et te démontrent jusqu’à cinq heures du matin que tu ne les aimes point.
Ceux qui ne te connaissent plus du tout quand enfin ils décrochent du travail.
Ceux qui à chacune des fois, essayent ni vu ni connu de te glisser leur bite dans le cul.
Les viticulteurs celib. 65 a. 1m80 épouserait jolie secrétaire 30-36 câline, bustée pour l’aimer toute la vie.
Ceux qu’on appelle mon lionceau, prince des mille et une nuits.
Ceux qu’on aimait par métonymie, la partie pour le tout, le théâtre en lui valait bien une messe.
Ceux qui partent en tournée.
Les sangsues.
Les hommes qui ronflent dans mon lit.
Ceux qui te trompent quand toi tu pars en tournée. Ils t’attendent au bout du quai de la gare de Lyon pour te / te l’annoncer.
Les autres qui t’attendent au bout de la même gare de Lyon avec leur chemise blanche et leurs dents et leurs cheveux qui ont poussé, et toi tu n’oses plus t’approcher de cette fin de quai / Mon dieu, il est venu, il est beau, il est à moi.
Celui qui dort dans mon lit jusqu’à quatre heures de l’après-midi, tous les jours, là, doré, à point ; et rouspétant.
Ceux qui savent que tu n’y arriveras jamais.
Ceux qui savent que tu es hystérique.
Ceux qui te filent des cystites.
Ceux qui prennent des poses couchées, dont tu dois admirer l’immaculé slip Klein, le poitrail tendu.
Ceux qui doivent déjà s’en aller.
Ceux qui t’offrent un pullover rose PQ aux manches trop courtes, au col détendu.
Tous ceux qui oublient mon anniversaire.
Ce sont les hommes qui ronflent dans mon lit.
Ceux avec qui tu danses la jambe plâtrée sur les toitures du VIIè, à la lueur d’Eiffel.
Le brave H. Belgique doux comme une peluche cherche F. battue, pour la convaincre que l’amour dans le respect, virgule la bonne humeur, virgule ça existe ! Photo svp.
Ceux qui se branlent avec tes cheveux ondulés.
Celui qui rend l’avortement le plus beau jour de l’existence.
Celui dont tu jettes secrètement les draps tachés de sang dans la poubelle d’une ruelle d’une contrée islamique.
Ceux qui te cuisinent des poulpes aux brocolis marinés.
Ceux qui veulent partager ta couche et qui pourtant sont mon oncle à toi, l’oncle de Linda, le père de Linda.
EHAQLVAG : Bueno, mi monólogo !
LFQC : Celui qui ronfle toujours et encore / et quand il est là / dans mon lit.
Celui qui ronfle toujours et encore et quand il est là dans mon lit.
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MONOLOGUE DU SOUS-CHAMPION D’EUROPE (EHAQLVAG)
(La traduction de ce texte a été distribuée au public à l’entrée).
EHAQLVAG : Bueno pues nada, mi monólogo ! Una vez de gira, andaba yo por Santiago de Compostela con un maquinista /un buen amigo que se murió hace un par de años, le cayó un proyector encima./
LA VOIX OFF: il buvait des coups avec un ami régisseur, qui est mort, parce qu’il s’est pris un projecteur sur la tête.
EHAQLVAG : Y bueno; andábamos leyendo un periódico deportivo, tomando una cerveza y : vimos un anuncio de un concurso para un campeonato europeo de Play station, y ahí : me apunté. Miré las bases del concurso y había que coger el Pro evolution soccer, jugar una liga contra la consola con un equipo que tú eligieses, y claro, ganar la liga.
Comprenez? Ayúdame joder!
LFQC : Bon, il a répondu à une annonce dans le journal pour participer à un championnat européen de football sur play station. Voilà.
EHAQLVAG : ¿Qué, nada más?
LFQC : Non!
EHAQLVAG : Entonces yo pensé claro, todo el mundo que se apunte va a jugar o con el Real Madrid o con el Barça, entonces yo cogí al Albacete. Jugué y gané esa liga con el Albacete. Y me seleccionaron. Quedé tercero seleccionado de 1500.
Entonces me hicieron viajar a Madrid, venían concursantes de toda Europa. Total que nos pusieron una pantalla de cine de puta madre. Y claro tenías que jugar con tu equipo, con el que tú habías hecho la liga, o sea yo jugar la copa de Europa con el Albacete, es surrealista! Pues, empezamos a jugar y yo iba clasificándome y clasificándome y terminé llegando a la final de la copa de Europa de fútbol, con el Albacete !
LFQC : Je suis arrivé en finale de la coupe d’Europe ; et j’avais choisi de jouer avec la petite équipe de l’Albacete - c’est comme si je disais avec Bussac-sur-Charente.
EHAQLVAG : Y perdí la copa de Europa por 2 goles a 3
LFQC : Et j’ai perdu 2 à 3
EHAQLVAG : contra un chaval holandés que jugaba con el Ajax.
LFQC : contre un Hollandais qui jouait avec l’Ajax.
EHAQLVAG : Y nada, logré llegar a la final de la copa de Europa de play station, yo que casi fui jugador profesional de fútbol a los 17 años. Pero unos días antes de entrar en el Barça, pues, me atropelló un coche. En fin.
LFQC : Je suis arrivé en finale de la coupe de play station, moi qui ai failli devenir footballeur professionnel à 17 ans ; mais quelques jours avant de rentrer au Barça, j’ai été renversé par une voiture
EHAQLVAG : Yo soy un tipo que no tiene tiempo casi ni de vivir su vida,
LFQC : Je suis un type qui n’a pratiquement pas le temps d’en avoir une, de vie,
EHAQLVAG : siempre estoy de gira por aqui, por alla,
LFQC : je suis toujours en tournée, par monts et par vaux,
EHAQLVAG : y cuando llego a las cuatro de Munich, a las ocho me tomo otro avión para Corea,
y cuando por fin vuelvo a mi casa, en Barcelona,
EHAQLVAG : et quand enfin je rentre dans mon chez moi à Barcelone,
EHAQLVAG : tengo el tiempo de lavar mi ropa sucia, y a las cinco de la mañana pongo la ropa húmeda en una bolsa de basura dentro de mi maleta naranja, y me tomo un taxi : « al aeropuerto », que ya nos vamos a Milán !
LFQC : J’ai tout juste le temps de laver mon linge sale, et à cinq heures du mat, je mets les fringues humides dans un sac poubelle que je fourre à l’intérieur de ma valise-maison orange, et je chope un taxi pour l’aéroport. Eh oui, nous partons créer le spectacle à Milan.
Y tengo un grupo de música heavy metal,
LFQC : Et j’ai un groupe de Heavy metal,
EHAQLVAG : pero ensayo con ellos por internet, desde mis habitaciones de hotel 5 estrellas!
LFQC : Mais je suis obligé de répéter avec eux via internet, depuis mes chambres d’hôtel 3 étoiles, à partir de quatre heures du matin, après la fête de 1è, dans chaque putain de ville du globe.
EHAQLVAG : Y tengo una novia que vive en París,
LFQC : ♫ Et j’ai une fiancée
que je n’appelle jamais
qui habite à Paris ♫
EHAQLVAG : y la llamo por teléfono, por lo menos cinco veces al dia!
LFQC : Ah bon ? Mais je lui envoie des roses par interflora accompagnées du message électronique :
EHAQLVAG :« te quiero »
Y soy un cabrón,
LFQC : Et je suis un enfoiré, oui,
EHAQLVAG : siempre he sido un tipo genial, eficaz y divertido,
LFQC : parce que j’ai toujours été un type génial, hypra efficace et très très drôle. Je bois des canons jusqu’à l’aube en compagnie des gens avec lesquels je suis forcé de bosser ; et à l’aube je recommence à travailler, dur, toujours pour les autres.
EHAQLVAG : Pero no he dicho todo eso ! Siempre he sido muy colega de los que me contrataban, los de la Fura dels Baus, Rodrigo García, la com…
LFQC : Je me suis toujours démerdé pour être super pote de ceux qui m’embauchaient. Mais ma putain de vie à moi, c’est quoi ? Elle est où ?
EHAQLVAG : Y no sé, hay gente que sabe hacer cosas especiales,
LFQC : Et y’a des gens brillants,
EHAQLVAG : yo no.
LFQC : Toi non.
EHAQLVAG : Yo ni juego al futbol,
LFQC : Toi tu ne joues même plus au foot,
EHAQLVAG : yo sólo sé jugar a la vídeo consola.
LFQC : Tu sais juste jouer à la console vidéo.
EHAQLVAG : Es todo.
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DUO CHORÉGRAPHIÉ : LA GUERRE DES ESCABEAUX
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LES LARMES DE CANCER
Face public, il se décollent du ventre des flacons de larmes artificielles et s’en versent dans les yeux. Puis ils se décolleront les scotchs « Fragile » du ventre et se les colleront sur le visage, avant d’effectuer les « Portés monstrueux », tentatives acrobatiques de se rejoindre les yeux bandés de scotch.
VOIX OFF : Les larmes de cancer.
Ce qui m’a le plus blessé, c’est que tu te sois mise à m’aimer depuis que tu as su que je suis malade.
Me dolió mucho, sabés. Ca m’a déchiré, le jour où tu as basculé dans l’amour.
Ton cancer, c’est la seule chose sincère que tu avais à me donner. C’est pour ça.
EHAQLVAG : Ké tu as komancé à m’aimer ?
LFQC : Oui, pour ton cancer, que j’ai commencé à t’aimer.
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DUO CHORÉGRAPHIÉ : PORTÉS MONSTRUEUX.
LA VOIX OFF (ton froid, autoritaire, sans qu’on sache bien auquel des deux il s’adresse, et sans que cela corresponde aux actions des acteurs):
Froid, glacial, oui, cherche, tiède, chaud, brûlant /
Remonte, pas par là, à droite /descends /
Aimez-vous! Aimez-vous maintenant ! Allez ! Toi aussi /
La cuisse, vas-y ! vas-y ! Non, le pancréas!/
Sortez ! Sortez ! /
Revenez ! Revenez ! Ne me laissez pas seul. Ma plus belle histoire d’amour, c’est vous. Revenez. Sans vous, je ne suis plus. Revenez.
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MONOLOGUE DE LA MORT (EHAQLVAG)
Chuchoté, secret, très intime et doux, avec amour et un fond de sourire sublime. Il est seul et a récupéré son poisson parmi le public ; il le verse dans un aquarium lumineux, et lui confie :
EHAQLVAG : Mi Ronaldinho, amigo. Qué tal ? Dur, hein, la Femme qui crie... Mi Ronaldinho : Elle ne sait pas. Quasiment rien. Ils ne savent pas.
Quand elle dort à mes côtés, je me lève doucement / et je/
Quand on est tous au restaurant en tournée, avec les branchés du théâtre, je m’absente / je reviens dans une minute ! / et je/
Quand je vais chez mes parents, attablés devant les cailles et les huîtres, je m’éclipse / j’en ai pour deux secondes ! / et je /
Je / Je voulais vous dire q/ je voulais vous annoncer que j’ai un/ Personne ne le sait, car je me dois d’être l’Homme joyeux, l’Homme aimé de tous.
Et j’ai peur, Ronaldinho. Immensément : Peur.
Donc : en public, je me lève, je m’absente et je m’éclipse et je / CRACHE CHAQUE NUIT CHAQUE JOUR DU SANG. Du sang couleur cancer.
Mi Ronaldinho, amigo, chante avec moi : à ma peut-être Mort :
♫ CHANT FUNERAIRE KURDE
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MONOLOGUE DU PERMIS DE CONDUIRE (LFQC)
Elle est rentrée et sur son chant se met à effectuer des mouvements chorégraphiques qui la portent à tremper différentes parties de son corps dans son aquarium à lui où évolue le poisson vivant. Au bout du cinquième mouvement, il la prend par les cheveux et lui plonge violemment la tête dans l’eau. Tout le texte suivant sera ponctué par d’intempestifs plongeons de tête dans l’aquarium.
EHAQLVAG : Uno !
LFQC : La première fois : c’est surtout parce que j’étais extrêmement nerveuse. Je ne contrôlais rien. Pas même ma vue. Je n’arrivais pas à lire les numéros. Je m’arrêtais trop tard dans l’avenue bordée de, c’était des platanes il me semble. Je découvrais les angles droits à ma manière : brusque et farouche. Lui, était café au lait, et il rigolait. Il m’a ordonné « prenez à droite quand vous le pourrez » et je suis rentrée en plein dans le panneau.
EHAQLVAG : Quoi, du sens interdit ?
LFQC : Oui. Là je n’ai pas compris ce qui m’arrivait, comme propulsée en arrière : c’était lui qui faisait stop ; pas moi.
EHAQLVAG : Dos !
LFQC : La deuxième fois, à peu près pareil, sauf que/
EHAQLVAG : Tres !
LFQC : La troisième fois, j’y ai bien pensé au rond-point, puisque c’est ma terreur ; pourtant j’ai oublié d’épouser, épouser sa maudite forme ; pour me rattraper, j’ai massacré son sordide angle mort.
EHAQLVAG : cuatro
LFQC : L’avant-dernière fois, j’étais bien décidée, je te jure. Mais pour rentrer sur les montagnes russes, j’ai oublié d’étinceler,
EHAQLVAG : de clignoter ?
LFQC : Euh, oui. Je ne savais pas non plus qu’étant la dernière de la file, je devais afficher ma Détresse. Détresse. Détresse. Cependant je voulais encore me sauver. Mais je me plante là, à la fourche du choix crucial, entre la droite et la gauche, la gauche et la droite
EHAQLVAG : derecha !
LFQC : Derecha ? ah, c’est vrai. Et c’était, c’était : une sortie d’autoroute. Alors lui, (il ressemblait à un père noël aux yeux d’acier et il zozotait mamademoiselle, il suffira que vous m’inspiriez conconcon-fiance. » il m’a arraché autoritairement les commandes et tel Batman, oui, c’est ridicule, il a foncé foncé jusqu’à la case départ.
EHAQLVAG : cinco !
LFQC : Et y’a pas si longtemps, encore une tentative. Mais j’ai suivi un avion blanc dans le ciel, un songe, et par erreur on s’est retrouvé sur un parking, ça s’appelle / mon dieu préservez-nous de la banlieue, comment échapper de ce dédale goudronné ? / Et la terrible vache masculine cassante aux prunelles translucides m’a dégluti « c’est vous qui nous avez fourré dans ce parking, vous sortez toute seule », et moi je/
EHAQLVAG : C’est pas ça la conduite mademoiselle.
Du latin Condurre, mademoiselle : savoir conduire, c’est savoir se conduire.
LFQC : Alors depuis, je crois très profondément que je suis une inadaptée. Que je ne sais pas me conduire ; en toute sécurité, en respectant les normes de la route ainsi que les autres usagers. Me rendre maître de mon véhicule, c’est-à-dire du mien, celui de ma vie.
Que je ne suis pas prête. Que je ne suis pas femme. Que je ne suis pas finie ni dégrossie. Que je ne sais pas avancer. Avancer. A allure règlementaire. Avancer.
Et vite, vite, afin de parvenir à me coincer dans les embouteillages moutonneux de clonage de masse, pour suivre leur même direction, huilée, mécanisée, asphyxiée et crachotante. Sardine en vie Sardine en vie, ou plus du tout en vie ?
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♫ BEETHOVEN + MUSIQUE ANNONCIATRICE ♫
C’EST LA FIN
VOIX OFF : Titre : « C’est la fin » : pour cette scène JE dirai les répliques de LUI ; je lirai également les didascalies.
LA VOIX OFF : Elle, la Femme qui crie, l’a attendu toute la journée, pensant déjeuner, goûter, puis dîner avec lui. Il rentre, après avoir dû passer sa journée à démonter des projecteurs pour des collègues super guay. A son arrivée, elle lui flanque un coup de pied dans l’estomac / casse le canapé de chez lui / et lui crache dessus.
LA VOIX OFF : Lui : Enfin tu es sincère avec moi, enfin, tu as les couilles de me montrer que tu ne m’aimes pas, enfin, tu montres vraiment qui tu es.
Elle : Ok, rupture.
LFQC : OK, rupture : toi et moi, on n’a effectivement rien à voir.
LA VOIX OFF : Lui. OK rupture.
LA VOIX OFF : Didascalie : Comme elle ne connaît pas la ville, il l’accompagne tout de même dans un bar espingouin pour qu’elle s’achète un sandwich de tortilla.
Elle :
LFQC : Juste : te demander pardon. Pour le crachat : je suis violente ; c’est malgré moi.
LA VOIX OFF : Lui : OK mais non ! Le bref reste de temps qu’il me reste à vivre, je veux rester en paix : par conséquent : sans toi ; hors de portée de tes cris.
LA VOIX OFF : Didascalie : Ils arrivent en retard à un concert. Chacun de son côté. Il boit, se drogue avec ses espagnolos. Elle, en tas, oubliée. Ils finissent par rentrer dans sa maison.
LFQC : Tu avais raison. Non. Plus rien à foutre ; avec toi.
LA VOIX OFF : Un silence.
Lui : Y yo, qué voy a hacer solo, sin vos ?
EHAQLVAG : Oye, puedes leer con un tono más sincero ?
LA VOIX OFF : Y yo, qué voy a hacer solo, sin vos ?
Qu’est-ce que je vais faire, moi ? Sans toi ? Tu sais, tout à l’heure, je mentais, quand je disais rupture. Pour te faire comprendre que cracher : non. Mais / Reste / Reste / Reste avec moi.
LFQC : Je, je reste avec toi, je /
Je. Je fais ce que je peux. Je n’arrive pas ; à rien. A conduire ; ne pas me faire virer; à communiquer ; vous supporter ; à chanter ; ne pas cracher ; te crier, me crier.
Je fais ce que je peux, et je n’y arrive pas très bien. Par conséquent : je ne réussis pas à, à, ai-mer. Aimer. Je n’ai pas de place dans moi pour l’amour, non, il ne s’emboîte pas, il n’a pas du tout la même forme que mon dedans : anguleux.
Je te jure, je crois, je rêve que parfois le rat quasiment crevé que j’ai dans l’œsophage, il périt, il remonte, il va ressortir, mais non, non, il a des mini griffes rouges, il s’accroche là-dedans, et ça me brûle ; c’est pour ça que j’ai toujours soif, t’as remarqué ? Je suis continuellement en lutte, je suis épuisée.
EHAQLVAG : Chhhhht.
LFQC : Epuisée.
EHAQLVAG : Chhhhhhhhhht. Epuisée. Agotada. Tu es épuisée. Je suis épuisé. Moi aussi, j’ai un rat, il est là ce rat, dans mon estomac. Il arrache, cisaille, grossit, il m’arrache moi. Et toi. Nous sommes épuisés. Comme après la tourmente.
Chht. Ecoute. Ecoute-le, ce grondement assourdissant, qui s’éloigne. Il s’enfuit, loin de nous. Reste avec moi et dors, ne t’inquiète pas, dors, ma Femme, qui crie, dors.
LFQC : Mais tu parlais français ? Qui es-tu ? A quoi joues-tu ?
EHALLVAG : Endors-toi, chhhht.
EHALLVAG + LFQC : chhhhhhhhht.
♫ Symphonie des « chhht » et Long Orage ♫
(La lumière baisse. Ils s’embrassent longuement, rompus mais ensemble et s’endorment par terre.)
FIN
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