Paris, le 11 juillet (version pile)
Fionavanessabis
Résumé pour donner des repères aux lecteurs :
Alice Liddell est pianiste. Elle est venue à Paris pour interpréter le concerto en sol de Ravel. Un accident dont elle a été témoin lui a endolori l'épaule. Elle a accepté de visiter Paris secret avec un inconnu qui l'a abordée à la terrasse de son hôtel.
La profession d'Augustin est plus trouble. Il a embrouillé la Britannique Alice avec un sigle sur une carte de visite et un soi-disant bureau. Mais le cycliste réchappé de l'accident auquel a assisté Alice, et qui n'est autre que le cousin Henri auquel écrivait Augustin, a laissé échapper, sous perfusion anti douleurs il est vrai, qu'il est aussi dans le trafic d'animaux.
Amanda est la cousine d'Alice, celle-là à qui elle écrivait.
Jules traque des animaux exotiques pour les fournir à ses clients. Le jour de l'accident, son chauffeur a laissé filer un wallaby qu'ils recherchent depuis dans Paris.
Pile ou face ?
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Puis faites votre choix !
version pile
Après son café noisette, Amanda se sentit mieux. Elle releva le menton. Ce n'était pas tous les jours, tout de même, qu'on se trouvait nez-à-nez avec un animal d'un autre continent. En pleine capitale. Elle avait appelé un commissariat. Elle l'avait trouvé petit pour un kangourou. La jeune femme s'était simplement approchée, lui avait tendu un caramel. Il l'avait regardée de côté. Elle avait déposé le caramel bien en vue au milieu du trottoir et avait reculé. L'animal, un wallaby de Bennett, l'avait toisée et avait chipé le caramel en biaisant. Amanda se demandait encore si le sucre n'était pas dangereux pour certaines espèces, comme pour le chien diabétique de son voisin en Angleterre.
Amanda rassembla ses esprits, paya la note, et se mit en route pour l'hôtel. Elle devait absolument avoir une conversation rationnelle avec sa cousine, qui perdait littéralement la tête.
Paris, le 12 Juillet
Chère Alice,
Je vous remercie encore pour l'agréable déjeuner d'hier que vous honorâtes de votre présence. J'eus l'occasion d'y voir confirmée mon impression de vous ; vous apprenez vite, votre français s'affermit de jour en jour, c'est pourquoi je choisis de vous écrire dans cette langue qui est la mienne.
Ne vous privez surtout pas de me rendre la pareille, n'hésitez pas à m'écrire, et à exercer ainsi sur moi votre irrésistible langue d'Anglaise.
Je vous imagine d'ici, me regardant sans piper mot, cherchant instinctivement le sens de mes phrases. Vous prenez cet air de filer doux, et l'instant d'après me troublez par votre regard qui me fait vous soupçonner de vouloir vous faire picorer toute crue. Très chère, vous me mettez la barre haute et je ne suis pas de bois à la vue de vos charmes.
Si je suis audacieux avec vous, c'est que je vous ai bien écoutée. Faire mon Gaulois pour masquer le trouble qui fut mien à vous entendre raconter l'Adagio Assai du concerto que vous répétez. Vous écouter mais goûter surtout à la vivacité de vos prunelles quand vous parliez musique et que votre coeur s'emballa. Vous interroger à mon tour, après que vous ayiez questionné à loisir le Gaulois que je suis sur l'héritage révolutionnaire : sourire à votre obsession de la liberté qui, m'avez-vous confié, vous fit défaut. Vous regarder perdre les mots surtout, et vous perdre dans votre belle audace solitaire d'être toute absorbée dans le goût de votre cuillérée de dessert. Me retrouver brusquement cueilli, devant votre liberté de ne rien dire, votre choix de ne pas combler constamment la conversation de mots. Votre silence si parlant qui m'ouvre la porte de votre intimité tangible. Fait résonner les mots échangés un instant auparavant. Les éprouve dans leur écho en moi. Votre conversation eut tout d'une musique ; ouverture, montée douce de la mélodie, enchevêtrement thématique et variations caressantes, brusque éclat de rire et volte-face, accents et point d'orgue, accalmie, doux giron d'une berceuse, silence, bruissement de l'auditoire.
Et lorsque vous êtes partie, belle Alice, je suis revenu à moi et j'ai applaudi à ce que j'avais entrevu de vous.
Laissez-moi vite, Alice, redevenir votre auditoire, laissez-moi vous dire que je voudrais vous revoir, laissez-moi vous jouer du seul instrument que je connaisse, le langage, laissez-moi vivement espérer votre réponse.
Augustin
Invitation for Augustin
Paris, 12th of July
Please understand that I would be delighted to open the doors to you during our first set of rehearsals for the concerto in G written by your talented compatriot, Maurice Ravel. You only need to say to the concierge of the theater that you are a friend of Alice Liddell's. That which I hope you will soon be.
Your friend,
Alice.
P.S. I have now discovered your letter at the hotel's reception desk. I cannot answer to it briefly, but please take my invitation for the first step of an answer.
version face : à suivre...