Dans le port de Brest passent les chalands
Navires de commerce poussifs et puants
Lâchant vers le ciel de maigres fumées
Que rabat la bruine toute la journée
Devant ma fenêtre glissent les bateaux
Les petits en tête remorquent les gros
Coques aluminées, qu'on peint et qu'on brique,
Chargements de blé, de fûts, de barriques
Que les grues transbordent inlassablement
Dans un va et vient allègre et bruyant
Mais pour peu qu'un cotre vienne faire relâche,
Une goélette et son équipage,
-Depuis le carreau je les aperçois
Les uns qui s'affairent et les autres pas,
A briquer les cuivres et les écoutilles,
Et dans les huniers graisser les manilles-
Ou qu'au crépuscule résonnent au loin
Les cornes de brume, je me vois, soudain,
Je m'imagine,
Debout, seul, à la proue d'un vieux transatlantique
En route pour le Nouveau Monde
Et pourquoi pas jusqu'à l'Arctique
La lumière née des petits matins
Qui blanchit la mer d'un voile d'airain
Et le vieux navire qui roule et qui tangue
Sur la grande houle et la mer exsangue
Vagues paresseuses qu'enfourne l'étrave
Tandis que le pont vibre du son grave
Des moteurs, que dans le lointain
L'horizon se charge de nuées d'ardoise
Jetant sur les flots un reflet turquoise
Annonçant le grain
Je m'en vais, seul, debout
À la proue d'un vieux transatlantique
En route pour le Nouveau Monde
Et pourquoi pas jusqu'à l'Arctique
(Ou comment voyager derrière sa fenêtre)
merci ! Pas toujours facile de garder un espace au rêve.
· Il y a presque 9 ans ·J'ai beaucoup aimé "Maïalisme".
Susanne Derève