Plein d’eux se crée
absolu
Laissons le mystère faire son office il vaut mieux se taire et fermer tous les orifices, terrer le moindre secret d’un regard indiscret, quitte à faire des sacrifices.. l’œil hagard traîne souvent sans arrière-pensée mais on ne sait jamais de quoi est fait le hasard, ni l’esprit humain, qui peut se révéler barbare ; pensez à l’effet produit si l’idée lui prend de mettre à nu ses envies.. souvenez-vous de l’effet papillon, de cette fée en haillons… bâillonnez les bouches décousues, ne causez jamais aux bavards, faites barrage aux rumeurs qui courent le long des boulevards, et murmurent aux oreilles béates des murs bétonnés une flopée de sombres hypothèses. Cachez vos prothèses, ne montrez aucun signe de faiblesse, c’est là que le bas blesse, au niveau de la jambe de bois.
Pas besoin d’avoir fait hypokhâgne pour savoir qu’un secret laissé en plein cagnard finit par fondre comme l’amour sans garde-fou.. A trop l’exposer on finit par tous s’y cogner, il risque d’exploser, de laisser un peu de lui sur chacun de nous.. un secret dispersé, dispensé de garde, plus personne pour veiller sur lui, mais plusieurs pour le déchirer.. l’éparpiller aux quatre coins d’un monde déjà enseveli, noyé sous des millions de secrets éventrés.. un parmi tant d’autres, à peine créé déjà relégué au rang de rumeur…. C’est le propre de beaucoup de gens de propager la gangrène, la propagande ne gène que ceux qui l’appréhendent, que ceux après qui elle court.. ceux dont elle veut la peau.
Il n’appartient qu’à toi, tout du moins tu le crois.. ça peut être une pensée une envie, un fait…si solide et si éphémère, il s’effrite au moindre ressac, au moindre mouvement de l’amer.. un coup de sang l’emporte si loin, un cœur en pleurs l’usera jusqu’à la fin, (luttera contre le sel qui ronge sans faim)…
L’endetté s’en délivrera sans regret contre un petit pécule, l’infâme le balancera sans scrupule aux âmes pleines de fric ; la femme s’en servira à mauvais escient contre un peu plus de chic.
Murmure, qui renferme la blessure, qui colmate les crevasses
Torture, qui fait taire à jamais celui qu’elle a lié, qui le rend fou, allié de la haine, langue dévorée par l’haleine jamais plus exhalée. . plus aucun son n’a été émis, plus aucun mot n’a été craché depuis qu’il a juré. . unis par les liens du secret, engagement plus lourd que le mariage, plus contagieux que ceux du sang, car il contamine tous les organes, les parois, les membranes.. ce qui était censé le protéger se retrouve pris au piège de cette armure qu’il représentait.. corps devenu prison, prison sans barreau, plus rien n’en sort… le silence se fait, autour de l’être ainsi condamné.. lui qui pensait se promener dans un jardin, à l’abri des regards indiscrets.. s’est retrouvé obligé d’apporter chaque jour l’eau indispensable pour cultiver son potager, sous peine de mourir affamé… on ne se promène pas impunément dans le jardin d’autrui sans en récolter aussi les ennuis.. piétinez donc la terre sacrée de votre voisin, vous aurez de son chagrin sur la conscience et de son secret sous les semelles.. en essuyant vos chaussures vous en laisserez sur le paillasson.. quand vous secouerez ce paillasson vous disperserez les miettes de ce que votre voisin avait confiné pendant des années dans votre allée.. mais chut hein… ne le dites à personne.. c’est un secret…. Ou si, justement, dites-le à tout le monde, d’emblée, informez toute l’assemblée… personne ne vous croira.. enfin c’est à vous d’juger..
S’il en est ainsi dans les cieux, monde silencieux par excellence, sans mobile, danse immobile….