PLUMES DE SANG
Elise Valere
Au clair de la lune, j’entends les corbeaux si proches à m’épier
Ces oiseaux-là que j’invente ne sont pas chien et chat
Ils griffent les portes de la cave avec mes doigts d’enfant
Une souris frôle mes pieds, j’ai peur du grand escalier
Viens me chercher, s’il te plait maman
Mon ami Pierrot, prête moi ta plume pour écrire ce mot
Je t’ouvre mes veines comme on balaie devant le metro
Ma famille est morte, je n’ai plus de feu
Ouvre-moi ta porte … pour l’amour non-lieu
Mes larmes en sel coulent sur la maison du conte de fée
Ce breuvage n’est pas le bon, ma mère préfère le bourbon
Les murs sales clouent ma tête qui claque des dents
Je promets d’être sage car je ne veux plus expier
Ce n’est pas ma faute s’il fait nuit dedans
Mon ami Pierrot, prête moi ta plume pour écrire ce mot
Je te porte mes peines com’ on pagaie pas gai ces maux
Ma famille est morte, je n’ai plus de feu
Ouvre-moi ta porte … pour l’amour non-lieu
Au clair de la lune, j’aurai aimé des racines à te faire rêver
Mais l’enfant qu’on bat sent vraiment mauvais dans les galas
Le passé à prix coutant dit adieu aux cerises d’antan
Personne sur son blanc destrier, juste moi à renier
Le cri d'une bâtarde qui délire son père absent
Mon ami Pierrot, prête moi ta plume pour écrire ce mot
Je t’offre les rennes comme on débraye avant le dodo
Ma famille est morte, je n’ai plus de feu
Ouvre-moi ta porte … pour l’amour non-lieu
Tant de jeunes hommes se vautrent sur ma mère imbibée
L’araignée a le bourdon quand je suis seule à la maison
Mes yeux s’évadent à travers les cils du conte au présent
Me voici marquise des anges au sein d’un monde exilé
Bien loin des coups qui pleurent ma peau d’enfant
Mon ami Pierrot, prête moi ta plume pour écrire ce mot…