Pourquoi j'aime la forêt

Gabriel Meunier

La forêt, la véritable forêt, pas celles des parcs de loisirs ou ces décors de carton pâte où tout est prévu, mais les forêts hantées de loups, fleuries de biches, de champignons et de lutins

Oh, ce n'est pas pour cueillir des fleurs
ou caresser le renard avec mon pot de beurre
ou chantonner au bord des ruisseaux
en attendant quelque jeune hobereau

NON, NON ET NON !

j'aime la forêt pour sortir des sentiers battus
j'aime la forêt pour des rencontres inconnues
j'aime la forêt pour me cacher
j'aime la forêt pour faire peur à la maréchaussée
j'aime la forêt la lumière y est douce
j'aime la forêt sa petite musique effleure la mousse
j'aime la forêt ici temps n'existe plus
j'aime la forêt ici même les pierres sont vaincues
j'aime la forêt quand je suis triste
j'aime la forêt quand ont disparus nos calculs misérabilistes
j'aime la forêt quand le givre mord le sang
j'aime la forêt quand l'obscurité dissous chaque tourment
j'aime la forêt elle ne me demande rien
j'aime cette forêt qui envoûte ensorcelle d'infinis mystères

je hais vos plantations à répétition
je hais vos panneaux vos barrières et leurs alignements lugubres
je crache sur vos bourgeons secs sur les mousses sans champignons
je crache sur vos réverbères pour tout croissant de lune

et vos soirs étouffés de silence sans promesse de renaissance
je pleure sur les champs vides
sans chants d'oiseaux

quand vos machines auront-elles fini de parader
de conquérir ces immensités mortifères ?
Pour rien.


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