PROMENADE DANS L'ANGOISSE
d-rudsek
PROMENADE DANS L’ANGOISSE
Je suis un arbre sans tête qui domine le nombre
Je suis si seul sur terre, c’est incroyable
Je ne peux compter que sur moi dans cet univers qui me navre
Tant de rats, partout, impitoyables
La peste circule et c’est grave
De délire en délire, c’est pire
C’est pitoyable, c’est minable
Les eaux du fleuve renvoient l’image sans âge
De la lumière du jour finissant, de la noirceur arrivant
Tout sombre, tout est sombre, tout est sombré
Tout est sombre, et je me noie, je me noie dans ce gouffre
Tout croule, tout s’écroule, tout s’est écroulé
Que deviens-je ? Insignifiant
Mais, porté par la belle illusion que les mots me sauveront
Je pose, dépose, dispose, compose et impose des choses
Je range, dérange, mélange, arrange et tout tangue
Je sollicite, je solutionne, je salue ceux
Qui sont seuls, je suis seul
Je broies, je détruis, j’assomme, j’assène, j’assassine
Je montre que je sais être monstre
J’erre, je tempère, mais je perds mes repères
J’ai su, j’ai dû, j’ai pu, j’ai reçu, j’ai perdu
Je souffle, je souffre, je suinte, je coule
Je me détériore, je me dissous, je suis réduit
Je ne suis plus rien
Le matin arrive, le soleil balaie la nuit
Épars par-ci, épars par là, des petits bouts de moi ont froid
J’assemble, je rassemble, je me rassemble
Je me lève, je bouge mes lèvres
Je bruisse, je chuchote, je parle, je hurle
Je prononce, j’annonce, je dénonce
Pas une once de moi n'est restée dans les ronces
D.Rudsek 2006