Quand t'es seule.

Tu fais une crise d'angoisse, tu te pètes les ligaments croisés, tu passes ta vie à avoir mal et à craquer. Tu envoies des messages désespérés parce que tu l'es réellement, à un frère qui s'en fou, parce qu'il s'en tape profondément. Tu vas tellement mal que tu te dis qu'il le saura, qu'il ne pourra pas fermer les yeux, parce que c'est ton frère. 

Et puis tu te plantes, encore une fois. Encore une fois, tu portes de l'espoir à quelqu'un qui ne te donnera rien, même pas un Bonjour, même pas un Merci, même pas un câlin. Il ne t'offrira rien et t'es là en train de répéter aux pompiers dans l'ambulance que si, tu vas crever. Tu vas crever parce que tu n'arrives plus à respirer. Tu vas crever parce que l'angoisse monte tellement qu'elle te tétanise et te fait trembler. Tu pleures de peur et tu as envie de hurler sans le pouvoir. 

Dans ces moments-là, tu veux ton frère, tu veux quelqu'un que t'aimes, qui t'aimes. Tu ne sais même pas ce que tu désires réellement, peut-être tout effacer et tout recommencer à zéro. Peut-être changer de vie, de ville, de pays et de planète et te redécouvrir chaque instant dans la plus belle des pesanteurs. Tu le veux contre toi parce que tu sais et tu as vu de tes propres yeux qu'il était le Seul Homme sur terre, qui arrivait à te clamer, à te raisonner, à te dire " T'inquiètes pas, en gros, ça va aller". 

Mais t'as trop d'ennuis pleins la tête, trop de soucis qui débordent par toutes parts, t'es à cran, t'en peux plus et tu n'as jamais voulu tomber si bas en trois ans. Trois ans, c'est le temps qu'il aurait fallu à un frère pour reconstruire quelqu'un. Trois ans, c'est aussi le temps qu'il faut à une soeur pour dégringoler littéralement, sans compassion, ni tendresse, ni soutien. 

Alors t'es là, tu lui hurles à la gueule Appelle-moi, Aide-moi, t'es mon frère, t'en va pas. Mais tout ce que tu trouves dans ta Perte, c'est de l'ignorance, de la désinvolture et de la Pitié. C'est vrai, quoi, une fille qui va mal et qui souffre le martyr, on n'en veut pas. 

Mais ce que mon frère oublie c'est que je n'ai pas toujours été comme ça et qu'avant, j'étais la première pour la vie, pour la pesanteur, le calme, la sérénité et la joie. Alors y'a des jours parfaits où tu cultives ta joie et ton bonheur. Et y'a des jours noirs où tu subis les conséquences de vingt-deux ans de tortures, d'échecs et de malheurs. 

Quand tout va bien, c'est ton frère qui te porte au sommet et profiterai presque de ton bonheur avec toi. Quand tout va mal, c'est ce même frère que tu peux chercher à en hurler tes tripes, parce qu'il ne bougerait pas ses fesses pour qu'enfin, tu ailles bien.

Pacifique, lâche, patient et utopiste, il attend. Il attend que ça aille mieux alors que de jours en jours, le tout empire. Il attends que je me sente bien, alors que ces rares fois sont mensuelles ou presque. 

Il attend. Ouai, il fait comme le vieux pépé, il regarde passer le train en se disant sagement, sans bouger son cul et figé comme une statut de pierre, on verra demain. Mais demain, la peine s'installera plus profondément encore, mais demain, l'angoisse prendra son pied et tuera encore davantage. Mais demain, la peine reviendra et martyrisera la victime encore plus fort.

Alors, lui, spectateur con, il assiste à la chute de sa soeur, à sa déchéance, à son malheur et rit de cette peine comme il rirait d'un spectacle de marionnettes. Je crois pas qu'il comprenne, je crois pas qu'il sache, je pense pas qu'il puisse s'imaginer...Que pour faire des crises d'angoisse à mon âge, alors que ce n'était pas habituel avant, c'est que véritablement, on est en train de craquer.