Qui sait...

louzaki

Je ne peux pas dire que je n'y avais pas pensé. Ce serait mentir...
Je ne peux que m'avouer que lorsque j'ai décidé de sauter dans la cuve, j'espérais autre chose que la mort. Mais c'est la faute à tous ces comics que je lisais quand j'étais môme, tous ces anti-héros nés d'une chute dans un bain d'acide, après un accident. Alors bien sûr, dans ma tête de grand gamin de 31 ans, je me suis dis qu'il se passera un truc, une sorte de miracle pour moi.
Comme ça, on dirait que je n'ai pas réfléchis. Que j'ai vu la cuve, que j'ai sauté. Mais je n'en pouvais plus de réfléchir. Encore une fois, je me retrouvais seul. Et cette fois-ci, c'était encore plus douloureux que la fois précédente. Oui c'est le lot de l'Homme d'être accompagné et ensuite seul mais je m'en fichais. Ma vie était fichue. À n'importe quel endroit où je posais les yeux, je la voyais. Sa façon de sourire, de pleurer, de lire. Je voulais arrêter d'y penser mais essayez... C'est pas si facile, surtout pour moi. 
Ce fût comme une drogue et s'en détacher était impossible. J'étais trop faible, trop lâche pour ça alors j'ai réfléchis à comment arrêter d'y penser. Une solution, ne plus penser du tout. Je suis un mec douillet malgré tout, je n'aime pas avoir mal, vous commencez à comprendre la difficulté ? 
J'analysais le problème comme si ma vie en dépendait (ce qui était le cas). Je passais des jours et des nuits à écrire, à téléphoner à des rescapés d'accidents, je faisais chier les gens dans le bonheur et le malheur, je ne laissais personne tranquille et ça me faisait du bien. Oui... bien sûr que c'était malsain mais je ne vous l'ai pas dit que j'étais malsain aussi ? Non ? Autant pour moi.
J'emmerdais la terre entière et vous avec. Je m'éclatais à programmer ma mort. Je vous voyais souffrir et j'en étais heureux. J'en oubliais ma propre souffrance. 
Et puis, un jour où j'allais faire les courses, regarder les prix de la mort au rats dans un grand supermarché, j'ai vu ce truc, cette énorme cuve avec le symbole "Radioactif" dessus. 
Mon sang n'a fait qu'un tour, je suis monté au dessus sur la passerelle, pas surveillée évidemment, comme si un Dieu en qui je ne croyais pas me donner le feu vert. Vert... Le liquide était même trop vert, gluant, un truc de film à deux sous. Une seconde, je me suis demandé si je n'étais pas dans un film, si tout ça n'était pas programmé depuis le début, si on ne m'attendait pas derrière le décor pour m'applaudir de mon courage d'en finir. Alors, dans ma caboche de gamin de 10 ans, je me suis dis que c'était ça. J'en étais sûr. Alors j'ai sauté.

Aujourd'hui, évidemment, j'en suis moins sûr. Je suis assis depuis que j'ai rouvert les yeux sur une chaise noire. Il y a pleins de gens avec moi mais eux, ils ne parlent pas. Ils attendent. Quoi ? J'en sais rien, j'ai essayé de leur demander mais personne ne me regarde dans les yeux. Alors évidemment, aujourd'hui, je me demande si j'ai pas fait une connerie finalement. Je pense toujours autant à Elle. Alors en attendant qu'il se passe quelque chose, j'essaie de me souvenir des comics que je lisais quand j'étais môme.
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