Regards

masque

Quand les étoiles naissent d’une obscure clarté
Et que le grand soleil au couchant est tombé
Que les montagnes pointent leurs sommets enneigés
Et que le ciel tombe dans la mer déchirée…

J’aperçois ton visage qui m’appelle.

Quand la brume envahit les landes en plein été
Et que le noir brouillard réveille les damnés
Que se dessinent dans l’air des figures torturées
Et que de ma démence je ne peux me cacher…

J’aperçois ton visage qui m’appelle.

Quand je fuis éperdue dans de vertes vallées
Où lumière apaisante ne cesse de briller
Que mes durs pieds nus frôlent l’herbe glacée
Et que les ténèbres tentent de me rattraper…

J’aperçois ton visage qui m’appelle.

Quand au bord du lac je veux me reposer
Et l’infinie céleste de mes yeux contempler
Que l’océan se brouille de nuages déchaînés
Et que l’écume des jours au rivage est échouée…

J’aperçois ton visage qui m’appelle.

Quand la forêt chuchote une douce mélopée
En répétant mon nom de sa voix envoûtée
Que sous couvert des arbres je peux te regarder
Comme si c’était là toute ma destinée…

J’aperçois ton visage qui m’appelle.

Quand nos corps s’entremêlent comme deux être enchaînés
Et que mon cœur devient un ardent brasier
Que tes cuisses se transforment en refuge secret
Et que tes lèvres m’offrent leurre exquise pureté…

J’aperçois ton visage qui m’appelle.

Quand tes yeux morts et vides comme deux caveaux hantés
M’invitent tendrement à de nouveaux bienfaits
Que le vent au dehors déclame l’épopée
De ma charogne puante par les siècles oubliés…

J’aperçois ton visage qui m’appelle.

Et je traîne mon corps par-delà les années
Car tel est le fardeau que les dieux m’ont donné
Et quand je te regarde, je n’aperçois jamais
Que le pâle reflet de mon âme déchirée…

Monstruosité.

Quand la brume au matin s’est enfin dissipée
Que les senteurs d’alcool sont un peu atténuées
Que je contemple en moi un être diminué
Que je comprends soudain l’absurde vérité…

J’aperçois mon visage qui t’appelle.

Nos regards n’ont jamais existé.

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