Rencontrer la Ville

Salim Shelow

Rencontrer la ville


Rien de trop exaltant mais il me semble qu'il s'est passé quelque chose. C'est ce genre de rencontre qui n'a ni sens ni queue mais qui reste en tête.
Paris la capitale, sa robe authentique, son gris fleuve et son trafic midi. Je marche ici un peu comme partout, ni ne parle ni n'agit,  j'observe là un peu comme tout le temps.

Ébloui, sous un rayon de décembre, je souris ce rare du douzième. Du Pont Neuf de Paris, que la Seine sous-vole, je retrouve la magie, la chaleur, la ville. Une histoire, ni drame, ni victoire. C'est un compte de vie, épisode invisible.
Je suis ni le faible ni l'invincible, mais ici, en ce lieu où les flots filent sous mon pas, il y a cette sensation. Entre la majesté de celui qui culmine et l'insignifiance du seul dans un tout. Admirable et percutante vue de cette belle Paris, je suis sous ton charme, peut être pour ma première fois. 
Je n'ai jamais su te regarder, et si je venais ici ce n'étais pas pour toi. Tu n'étais qu'un passage, une diversion. Oublier au divertir tout ce qui nous pourri le jour, voilà ce que tu m'as toujours servi. Et puis les scènes bruyantes de ta jeunesse fin de semaine ne m'ont plus donné l'envi. Enfin, je n'ai plus ton temps. Tu sais il y a des choses à faire et d'autres que l'on a déjà faites, tout cela ne te laisse pas grand place.

Mais à cet instant c'est toi d'abord et puis moi ensuite. Nous sommes ce que l'on échange. Douce lumière partagée, nous échangeons ce que nous sommes. Je suis la ville, toi mon passant, admirablement immobile. Je n'en ai pas tant des comme toi. Il y a un temps que tu me contemples là. Pas un mot, dressé sans un geste. Je te fais ma pierre, tu me fais ta chair. Silence lumineux, il y a de l'astre en toi. Je me regarde quand je te vois, je t'écoute quand je m'entends.

Libre sentiment, personne ici ne se doute. je dois te quitter, ta beauté, ma belle Paris, ma Ville.

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