Rendu sheriff de ma contrée

Jean Claude Blanc

Après un mois de confinement le résultat pas très brillant avec mon étoile j'enfourche le cheval de Lucky Luke en Auvergne

          Rendu sheriff de ma contrée

 

En cette période de pandémie

J'ai l'avantage vivre au large

Pour moi c'est pas la pénurie

Comme sheriff du village

Une petite vieille et son mari

Pas besoin de conseils, restent sages

Ne risquent pas mourir d'ennui

Les préoccupent ces ravages

Obnubilés par les images

Qu'on leur sert, en guise de potage

 

Faisant le tour des chaumières

Ces résidences secondaires

Plupart du temps, vide désert

Restent chez eux les grabataires

Quant aux touristes y'en a guère

Veulent pas subir leur heure dernière

Macron l'avoue, « oui c'est la guerre »

Faut faire l'école buissonnière

Et c'est pourquoi, suis volontaire

Comme Ranger missionnaire

A me taper le cul par terre

 

Me fais des potes auprès des buses

Corbeaux, renards, çà les amuse

Sans oublier ma chère Muse

Une douce hermine qui en abuse

De ma bonté, face à ses ruses

De La Fontaine, souvent j'en use

 

Tiens mon journal de solitaire

Tourne les pages de mon bréviaire

Ici c'est pas franchement l'Enfer

Car aujourd'hui, c'est pas hier

Comme qui dirait un visionnaire

Bien que progresse la galère

De ce virus qui manque pas d'air

Et nous met rouge de colère

La cause d'infection pulmonaire

Laissant bouche bée sur le derrière

Le péquin atteint qui désespère

 

Je pense à vous gens de la ville

Vivant dans des cités serviles

Pour ne pas dire bandes de débiles

Qui sortent leur automobile

Rattrapés par la garde civile

Qui veille au grain, si on resquille

 

J'ai fait le plein de mon frigo

Kil de bière et pernod

Ainsi mon ventre, se tient au chaud

Un bout de lard, boite d'haricots

Morceau de fromage plein d'asticots

Même qu'on m'appelle « Lulu costaud »

 

J'écoute, distrait cette télé

Où y'a que des chats écrasés

Sans regarder ce qui se passe

Mais cette fois, bonjour l'angoisse

Il y a des morts par milliers

Pas rigolo mais ça me lasse

Compte les morts et les blessés

Monsieur Loyal avec grande classe

Son jugement de Salomon

Nous en apprend pour pas un rond

20 heures pétantes, à pas rater

Rituel oblige, pour cette poisse

     Entre BFM et LCI

Qui se disputent les parts de marché

Faire de l'audience, n'a pas de prix

J'hésite un peu, entre les deux

Qui narrera plus de saloperies

Record à battre, j'en fais le pari

Hélas sûr de gagner

Qui mettra plus de fric en jeu

Avec la mort à petit feu

 

Tape le soleil devant ma porte

Métamorphose des cloportes

Jusqu'à chez moi, le diable m'emporte

Je bronze à l'œil, je supporte

Cette rude nature, qu'est la plus forte

Bien que sheriff, ne suis en sorte

Que général d'une armée morte

 

Parait qu'on est les plus heureux

En notre campagne de chiens galeux

Seul pauvre cow-boy, vous le confirme

Pas de compagne, ni d'intime

Concocte moi-même ma cuisine

Rire de tout n'est pas un crime

 

Les rats des villes, les rats des champs

De La Fontaine, cette fable

Au goût du jour moins croustillant

Lorsque nous tombe sur le râble

Ce petit virus mais très méchant

Touche miséreux et innocents

Dans ces quartiers de mendiants

Où y'a pas même l'eau potable

L'Afrique encore manque d'argent

Pour se nourrir, se mettre à table

Se consacre à l'indispensable

Mais impossible pas suffisant

Tandis que festoie notre occident

Où on compte les morts par accident

Leur déversant fumée d'encens

 

En place du cœur j'ai le corps gros

A ce régime laisserai ma peau

Mais n'y a pas de conséquence

La science avance mais pas au trot

Sûr que demain ferai abstinence

Au gras au maigre élevé très tôt

En plus de çà dès l'âge ado

Par chance j'ai évité Mac Do

Avec ses chiottes ses lavabos

Vite fait bien fait pour quelques euros

 

J'attends chaque soir le verdict

De l'homme prophète de la santé

A ses discours suis addicte

Bois ses paroles comme du petit lait

 

Me fait une belle jambe, ses avertissements

Qui tombent à plat plupart du temps

Tous confinés, évidemment

Trouille des flics, amende sur le champ

 

On va en prendre pour quelques semaines

Car on est bons comme la romaine

Pourvu que l'on s'en sorte indemnes

Ça mérite serrer nos chaines

Emprisonnés ça vaut la peine

Dans les cités une autre rengaine

Ce qu'ils sont blêmes nos HLM

Rester cloitrer attise la haine

Sur mes montagnes, au-delà des plaines

Vais gambader à perdre haleine

Tout en riant comme une baleine

En ignorant ce phénomène

Mais pas plus con que la moyenne

Va mon soutien à ceux que j'aime

Question tendresse, aucun problème

 

Rendu sheriff malgré moi

Avec l'étoile aux vifs éclats

Nul besoin de pistolet

N'ayant personne à trucider

 

Que cette maladie qui pique le nez

Et nous pousse à éternuer

M'empêche pas de cavaler

A l'infini de mes obsessions

A l'horizon des filles canon

Hélas rares dans la région

 

Pourvu que ça dure, dès maintenant

Chante mon coucou, plein de serment

Pour ces nanas fleuris nichons

Vous le répète en tous les tons

 

Prenez soin de vos grands parents

Votre sainte famille, et en sachant

Que vous serez à leur image

Dans quelques années, prenant de l'âge

Mais bienheureux d'être dorlotés

Par vos enfants bien éduqués

Pour poursuivre la chevauchée

Si fantastique par cette peste

N'ayez pas peur à ce mal funeste

Alors ne reprenez pas la veste

Vous ressassant « j'y suis, j'y reste »

(De Mac Mahon lu dans le texte)  

N'hésitez pas à faire le test

« on en a pas » honteux prétexte

De nos élus, tous en détresse  

Leur promesse vaut bien une messe   JC Blanc avril 2020

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