Renoncement

Je me suis vu, imaginé...

J'ai espéré, parfois rêvé... Puis aujourd'hui, comme hier, comme demain, je suis.

Je suis parce que j'ai fait des choix. Et parce que j'ai renoncé.

J'ai renoncé à vivre en étant la bonne poire, en étant l'homme qu'on vient voir, l'homme dont on se sert comme d'un mouchoir, celui qui rend service mais ne demande jamais, celui qui souffre en silence, mais qui continue à aider.

J'ai renoncé à une santé solide. Trop douteuse, trop capricieuse, elle se joue de moi, et joue avec cette carcasse qui constitue mon corps. Souvent je boîte, ou suis appareillé... Attelles, orthèses, afin d'alléger, ce fardeau de douleur qui pèse sur mes épaules, cette constante faux qui découpe mes frêles jambes.

J'ai renoncé à ma propre fin, celle qu'on m'avait annoncé, j'ai refusé d'y croire, je l'ai haïe, je l'ai bannie, je l'ai faite tomber bien avant qu'elle ne me cueille, bien avant que vienne cette Faucheuse en linceul.

J'ai renoncé à des amis, amies, en quoi j'avais confiance, j'ai perdu de belles âmes, ou sont-ce elles qui m'ont perdu? Je crois que des deux côtés il y eut perte, je crois que c'est de mon côté qu'il y a des choses regrettées. 

J'ai renoncé à ma terre native, à ma région, mon soleil à moi, je me suis exilé sans trop avoir le choix, j'ai perdu certaines choses, certaines habitudes, une partie de mon sourire... Celle que je retrouve là-bas lorsque je m'y évade. 

J'ai renoncé à des choses, plus ou moins importantes. Ce furent des défaites, parfois, des victoires lentes... J'ai eu ce goût amer dans la bouche, ces larmes qui ne coulaient pas, puis finalement une bonne chose, ou parfois pas.

J'ai renoncé à bien des choses, j'en ai trouvé d'autres à la place, qui comblent une partie du vide laissé, de l'espace. J'ai découvert une forme de sérénité, une résistance, une force jamais soupçonnée... 

J'ai découvert une âme, je me suis découvert... Jusqu'à quand vais-je me surprendre? Où vais-je aller? Sur quels chemins sinueux mes pas vont-ils me mener?