Retrouvailles

giuglietta

LA PEUR (I)

VAINCRE LA PEUR (I)

Retrouvailles




Un soir, il revient.

Loin dans les galaxies du bout de l'univers, les astres noirs s'allument et près d'ici s'éteignent des milliers de soleil. Symphonie dissonante, tant de notes jouées un peu partout, qui résonnent ensemble, jetées les unes contre les autres s'annulent dans un violent tintamarre. Mes tempes battent, de mes tympans percés monte un cri muet, du sang coule à la commissure de mes lèvres, entre mes cuisses, aux veines des poignets, il coule à flot sombre et épais de mes oreilles, s'accroche aux créoles d'argent qui scintillent et dégouttent. J'esquisse un vague sourire et mes lèvres s'entrouvrent, sèches et craquelées, sur un rictus d'horreur et ma gorge étranglée se ferme sur les mots d'amour condamnés au tombeau. Je vacille, je tombe, tous mes os se fracassent. Des miettes de moi se rassemblent, roulées en boule sous la table basse, d'autres fragments épars volent comme poussière dans la lumière mauve et dorée qui précède cette nuit de retrouvailles.

Décomposée, recomposée, je me dresse encore sur mes jambes de glace qui fondent à nouveau et je suis à genoux. Une bombe à retardement fait exploser mon cœur, mon ventre s'ouvre en déchirure sur une armée de papillons si violets qu'ils sont noirs, ils déploient leur ailes froissées et volettent autour de moi dans une orgie de battements confus qui tonnent comme l'orage. Mon sexe pleure toujours des larmes de sang bleu, mes mains fripées et squelettiques griffent mes rouges yeux. Je meurs encore, dix, cent, mille fois de toutes les façons atroces qu'inventa la nature, sous toutes les tortures qu'on inventé les hommes. Je rescucite toujours pour mieux crever de peur et de douleur dans une apocalypse de mes sens, et mon cerveau bouillonne comme du plomb fondu.

Et puis, je dis :

Bonsoir, tu es venu.

Et après on s'embrasse...




  • « …sur les mots d'amour condamnés au tombeau. » Mon ex-amour m’interdit aussi, que je lui parle en mots d’Amour. J’en suis navré, contrit, et malheureux tout simplement. J’aime bien ton style.

    · Il y a plus de 7 ans ·
    Photo rv livre

    Hervé Lénervé

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