Réveillonner perdu le goût

Jean Claude Blanc

soir de Noël recommencé...sauf que nos gosses dégoûtés tellement choyés toute l'année, s'en font plus guère une fête

                        Réveillonner, perdu le goût

24 décembre 2017

Presque fin d'année, où on banquette

S'ingurgitant finement le bec

De dinde, de bûche et tas d'étrennes

Pour le détour, ça vaut la peine

Pourquoi se priver, en quarantaine

Quand le Champagne, coule à flot

Au point que demain vont faire carême 

Qui se bourrent la gueule de Pernod

Le Père Noël, que mise en scène

 

S'en est fini des longues nuits

Les jours rallongent, mon sexe aussi

Vais pas bouder devant une nana

Si jeune fille extravertie

Sauf que je me damne pour le foie gras

Même à gerber, j'en bave d'envie

 

Chauds les marrons,  « ces boit sans soif »

A terminer complètement paffes

Car n'y a pas menu plaisir

L'eau minérale, ne peut que nuire

Pour se marrer, y'a bien que l'ivresse

Ses abonnés font des prouesses

 

A domicile faire la fête

Pour picoler, pas de préjudice

Même si on est cuité pompette

Pas contrôlé par la police

 

Après maintes tournées d'apéro

C'est la ruée sur le festin

On se dispute entre copains

Chacun sa cuisse, part de gâteau

Car n'y a bien que les voisins

Que ça emmerde, ces « couche tôt »

Se réunir une fois l'an

C'est pas le diable entre parents

En voudraient plus les enfants

Mais trop souvent, désobligeant

 

Distribution de jouets à gogo

Sans le barbu sur son traineau

On a beau faire, se déguiser

Prendre sa cape, son bonnet rouge

Ils n'y croient nos marmousets

Y'a pas peu de chance que ça les bouge

 

En quelques minutes, ces gosses comblés

Déjà pas mal, servis à souhait

Nous autres adultes affamés

Ce qu'on a hâte de dîner

A la chandelle, du pur effet

 

Comme les symboles, faut respecter

Jusqu'à minuit on va jeûner

Où le petit Jésus enfin parait

Selon le rituel, instant sacré

Dont nous païens, on s'en passerait

 

Pour prendre patience, polis, prévenants

On ne crache pas sur l'anisette

Y'a pas mort d'homme au tournant

Ni de flicailles ce soir qui guettent

 

Alors que dès qu'on passe à table

De s'empiffrer, bien incapables

Ingrats que nous sommes, pas bonne chère

N'honorant pas la ménagère

Pour ses extras pas ordinaires

Mal remerciée pour son offrande

Les crocs n'agissent pas sur commande

L'esprit ailleurs pour commenter

Tout ce qui fait actualité

La météo, chiens écrasés

 

Pas les derniers pour la critique

De ces suffisants en politique

Ce qu'ils trafiquent, on n'en sait rien

Mais ils nous servent de coupe-faim

De gauche à droite, la même clique

 

Dans leur coin, mômes affairés

A déficeler leurs paquets

En attendant nous foutent la paix

Regards figés sur la télé

Où Sébastien et ses paillettes

Leur en apprend sur la quéquette

 

Quand arrive l'heure du dessert

Etant gavés comme des oies

On fait une pause pour digérer

S'en racontant des plus salés

Grivoiseries, ça va de soi

Histoires à se rouler par terre

Mais sur le compte des mégères

Riant à gorge déployée

Sans faire gaffe à nos couvées

Ces chenapans toujours en veille

Comme les murs, ont des oreilles

 

Simulant l'air étonné

Qu'il n'y a pas de cheminée

Encore moins d'hotte sur le dos

Ni de brave type rudement chargé

A ce vacarme étranger

Alors qu'on porte ce lourd fardeau

Nous qui casquons en vérité

Riches présents, d'enfants gâtés

 

Le savent que trop, ces petits malins

Souhaitant trouver en leurs souliers

Evidemment pas des bouquins

Si difficiles à décrypter

Se suffisant de gros billets

Finalement, ça nous va bien

Ne sachant plus que leur acheter

Nous vieux barbons, désabusés

Par ce progrès qui nous dérange

On se souvient à en rêver

Des papillotes et des oranges

Dont on devait se contenter

Juste un sapin pour marquer le coup

Quelques bougies, c'était de bon goût

Pour tant de bonheur s'extasier

Ça les dépasse nos petits anges

 

Ainsi s'achève cette année

Trop de boustifaille, aucun regret

Nous prévoyant, pas la gaieté

Pensent déjà à l'an prochain

Insupportables nos gamins

En voudront plus, sûr et certain

Car c'est de mode, mener grand train

Et même le comble d'infortune

De leur promettre sans cesse la lune

 

Même sans joie, on doit trinquer

Dans tous les sens du verbe « douiller »

A la santé de notre porte-monnaie

Dont les replis sont guères épais

Il se fait tard, près de minuit

Bientôt va naitre, Christ à grands cris

Tandis que lassés de festoyer

Baillent aux corneilles, les invités

Se retirent sur la pointe des pieds

 

Déjà jaillissent feux d'artifices…

Une fois encore que de la fumée

Nos chérubins qu'ont tous les vices

Pour s'endormir sur leurs lauriers

De ces deux semaines sur l'oreiller

Une vraie aubaine, tant de vacances

Manque pas de crèche, notre tendre engeance  

Mais tout bébés, émerveillés

Ils ne font pas la différence

Entre un morceau de pain rassis

Et un garage, poupée Barbie  

Leur gratitude n'a pas de prix JC Blanc décembre 2017

Signaler ce texte