Rêves d’éléphant
Christian Attard
Lorsque Lakshmi naquit, sa grand-mère fit de nombreuses offrandes au temple pour que la petite fille connaisse tout au long de son existence le bonheur et la félicité qu'elle n'avait jamais eus.
La famille de l'enfant vivait près de Iritty à la pointe sud-ouest de la grande poche de calamar que forme l'Inde, dans une petite ferme, non loin du village. On ne les classait pas parmi les plus pauvres mais sûrement pas parmi les plus riches et leur quotidien était souvent bien difficile.
Très tôt, les parents de Lakshmi comprirent que leur enfant était différente de ses nombreux frères et sœurs. Fine, le teint très mat, elle avait pourtant les cheveux d'un blond d'or qui contrastait étrangement avec toutes ses petites compagnes à l'école communale. Mais sa différence ne s'arrêtait pas à ses seuls traits physiques car Lakshmi était une enfant calme, silencieuse et toujours souriante. Caractères plaisants mais qui pourtant ne furent pas, non plus, ceux qui distinguaient, s'il en était encore besoin, l'enfant de tant d'autres. Lakshmi adorait les éléphants et les éléphants adoraient la petite enfant blonde.
A la sortie de l'école, elle ne manquait jamais une occasion d'aller admirer les pachydermes au travail à quelques pas de chez elle, dans les bois et sur les collines. Elle restait jusqu'à la fin de leur journée, assise à l'ombre d'un grand banian. Les bêtes gigantesques charriaient des troncs de tecks immenses tendant des chaînes reliées à leurs puissants harnais. Parfois même, de leur seule trompe, ils emportaient un arbre isolé, arrachaient un rocher ou une souche. En fin d'après-midi, elle galopait derrière eux vers les berges du fleuve où les cornacs les menaient au bain et riait à leurs jeux dans la boue et l'eau tiède.
Les années passèrent et Lakshmi grandit en grâce et en beauté. Plus d'un garçon l'avait demandée en mariage et ses parents, patients ne voulaient pour elle que le meilleur parti du pays. Elle, elle ne regardait que ses éléphants. Les cornacs l'adoraient et, la connaissant depuis sa plus tendre enfance, l'autorisaient maintenant à approcher et à soigner les bêtes. Ce qu'elle faisait avec une adresse et une réussite remarquable.
Mais ce que personne ne savait, parce que cela n'appartenait qu'à elle, c'est que depuis qu'elle avait gardé souvenir de ses rêves, elle rêvait d'éléphants.
Souvent, dans une brume d'or, elle dansait pour eux. Bras et trompes enlacés, les géants frôlaient avec précaution et douceur leur tendre sœur. Ou, dans les eaux d'or du grand fleuve, elle nageait autour d'eux alors que de leurs yeux humides, ils ne la quittaient pas d'un geste de peur de la heurter. Ces monstres de muscles et de chair devenaient placides et langoureux autour de son corps souple et ondoyant.
Le temps passa encore et Lakshmi se maria avec un honorable petit fonctionnaire de Cherkala sur la côte. Bientôt, elle dut quitter sa chère famille et ses vieux amis les éléphants. Leur séparation fut déchirante et longtemps les cornacs d'Iiritty racontèrent comment les jours qui suivirent le départ de Lakshmi, les bêtes refusèrent de travailler et barrirent plaintivement.
Sans eux la vie, pourtant aisée de la jeune femme perdait chaque jour un peu plus de couleur, d'odeur et de saveur. Lakshmi, si gaie, si volontaire s'étiolait dans la société policée de son trop sérieux époux. Puis, elle tomba malade et fut prise de fièvres. Dans son cauchemar, cette nuit là, elle vit venir vers elle, deux majestueux éléphants blancs. Leur large poitrail battait sous l'effet d'une charge trop rapide. Ils unirent leur trompe pour la soulever et l'emportèrent ainsi dans une course folle à travers bois et marais, collines et jungles. Puis, elle ne se souvint plus de rien. Au matin, quand les grands éléphants la déposèrent tendrement au pied de la colline, il n'y avait plus de ville, la Grande Vague avait tout emporté.
Votre texte est magnifique, on le lit comme on glisserait dans le courant d'une rivière: on ne s'arrête pas. Je viens de la réunion, et bien que vous décriviez l'Inde, j'ai eu l'agréable souvenir de ma terre... Il y a quelques fautes d'inattention qui sont restées, mais ce n'est pas bien gênant.
· Il y a plus de 10 ans ·Bravo
koya-al-gaad
Merci Koya,
· Il y a plus de 10 ans ·Vous me touchez beaucoup et je suis heureux que mon texte ait pu vous plaire. A l'attention ! J'ai des fautes d'attention, c'est vrai, bien trop souvent. Je vais essayer de me corriger. Merci
J'arrive ici et je vais lire et vous lire aussi.
A bientôt.
Christian Attard
Je suis moi-même une grande habituée des fautes d'attention, ce n'est pas une chose bien grave, le sens n'en est pas touché pour autant.
· Il y a plus de 10 ans ·Si vous avez des difficultés avec certaines fonctionnalités du site n'hésitez pas à me demander des renseignements, ce sera avec plaisir :)
Bonne continuation, mes salutations sincères
koya-al-gaad