Rêves Passés

eaurelie

Cette nuit, j'ai rêvé de mon Ancien. L'Ancien Ami, l'Ancienne Vie, l'Ancien Temps. Il est vieux ce temps là. On fêtera bientôt nos deux ans de silence complet. Les anniversaires stupides, j'en suis la reine. Je les aime bien, ces anniversaires qui ne servent à rien. çà sert à mesurer la vitesse du temps, comme j'aime à dire. On réalise que c'est la merde. Que çà va décidément trop vite et que ces trois cent soixante cinq jours fois deux sont passés à toute vitesse et pour beaucoup, se sont déroulés en Espagne. Loin de lui mais si près de notre vie. Si près.

Cette nuit, j'ai rêvé de l'Ancien. Après avoir rêvé de l'Homme au Pull hier. Je cumule les journées lourdes de rêves qui ne s'évaporent pas.

L'Ancien devait nous emmener quelque part, ma soeur et moi. Alors on était en voiture et je devais l'appeler. C'était lui qui m'appelait, en fait.

Appui sur le bouton Vert.

"Salut c'est M. S."

"Oui, je sais. çà va?"

Et le reste, je m'en souviens pas.

Je me souviens seulement de ta voix. Ta voix. La vraie, tu sais. La tienne. Celle qui résonnait mal quand on s'appelait le midi. Celle qui m'accueillait après tes yeux quand tu venais me récupérer à la gare. On le connait ce fichu parking où les vingt premières minutes sont gratuites. Ta voix. Ta voix sur les films. Précieusement gardés. Peut être que je ne les regarderai plus jamais mais je sais qu'ils sont tous là, pas loin. Je sais aussi que te revoir me tuerait une nouvelle fois. Que j'aurais trop mal et trop peur pour toi. De savoir ce que tu deviens. De savoir si tu es heureux ou malheureux. De savoir si tu t'en sors. De savoir si tu retourneras à l'Arola dans quelques semaines. Je t'ai pas dit mais je finis le 22 Mai. Je finis le 22 Mai ma vie d'étudiante. çà fait peur. Mais pas autant que tes silences radio, tes mots si affreux et ta disparition.

J'ai disparu de ta vie aussi, il faut pas croire. Je t'ai fait disparaitre comme je me suis fait disparaitre. Mais il reste les mots. Et les mots, tu sais, ce sont les pires. Je les trouve terribles. Terriblement menaçants.

Me revient notre amitié, mon beau. Me revient nos longues, très longues années passées quotidiennement ensemble. Et cette fin brutale. L'ouverture sur le Bonheur pour toi et le retour à l'état sauvage pour moi.

Et pourtant, ta voix dans ce téléphone qui n'existait pas, était claire. Perturbée, comme tu l'aurais été si tu avais dû renouer le contact avec moi un jour. Mais claire. Et identique. Le souvenir m'est revenu. Et j'étais tellement heureuse de t'entendre. Comme un souffle trop longtemps retenu.

On ne peut pas rayer une amitié comme la nôtre. On peut l'occulter, la ranger dans un endroit sombre et chercher à la faire prendre l'eau mais on ne peut pas remplacer ces milliers de journées, de messages, d'appels, d'heures passées ensemble. Non, on ne peut pas.

Je n'ai pas la moindre idée de si tu continues à lire mes mots mais j'ai quand même envie, en honneur à cet instant de mon rêve, si clair encore, de te dire que je pense quotidiennement à toi, souvent dans le tram, quand je rentre. Que j'espère du fond du ventre que tu vas bien. Que tu es heureux et que les mots que tu écris ne sont pas le reflet de ta réalité quotidienne.

Que je voudrais pouvoir te serrer contre moi, très très fort et que je voudrais te rappeler les derniers mots que je t'ai dit, accrochée à ta portière "Oublie pas que je suis là pour toi. Oublie pas que tu peux me parler, malgré le fait que je ne comprenne pas tout."

Je voudrais qu'on retrouve notre accord parfait.


Rêve. 

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