Rio Bravo: violence, inceste et alcoolisme

Y K

Fusillades, morts par dizaines, explosions : ces scènes de combat qui relèvent du quotidien du flic de cinéma sont généralement suivies de moment de calme, de réflexion voire de choc. Le héros ayant généralement perdu au moins un ou plusieurs copains dans la bataille a la décence de se demander ne serait-ce que très brièvement « mais pourquoi toute cette violence inutile mon dieu, où cela nous mène-t-il en définitive !» et autres réflexions métaphysiques du genre, avant d'aller rejoindre l'héroïne qui s'impatiente sous la couette.

Rien de tout cela dans Rio Bravo : après s'être battu sans relâche, avoir tué plein de méchants et explosé une maison, les gentils rentrent en sifflotant joyeusement à la manière des sept nains revenant de la cueillette aux champignons et s'en vont s'enfiler quelques bières bien fraîches, car au Texas, il fait chaud.Cette scène qui respire la joie de vivre est à l'image du film : léger, avec un semblant de tension qui ne trompe personne, ce qui n'est de toute façon pas le but.
L'histoire est la suivante : dans son bled poussiéreux d'environ 500 mètres de long, John Wayne retient prisonnier un méchant. Le hic, c'est que le frère du méchant, lui même méchant (ce qui est plutôt courant, la méchanceté affectant très souvent tous les membres d'une même famille), est prêt à tout pour le sortir de prison. Mais John Wayne il dit bah non les gars y a pas moyen. Bam. Le mec l'a mauvaise, promet de repasser avec des potes méchants et hop on a notre scénario.
La magie de Rio Bravo ne réside donc pas tant dans l'histoire que dans la psychologie des personnages, les valeurs transmises et quelques scènes d'anthologie.
John Wayne, revêt une fois de plus le costume du shérif taciturne, sans peur et sans reproche, costume d'ailleurs passablement loufoque, dont on peut se demander quel degré de crédibilité il lui aurait conféré à l'époque sauvage de la conquête de l'ouest: chemise rouge tirant sur le rose, pantalon ayant visiblement rétréci au lavage et chapeau sur lequel l'équipe entière du film a dû s'asseoir par erreur avant chaque prise. Mais bon, John Wayne aurait la classe en string léopard, n'en voulons pas à son costumier.
Pour se battre contre les méchants, John est soutenu par une équipe de choc :
Un alcoolique en mal d'amour semi dépressif qui passe la moitié de son temps à pleurnicher, un vieil handicapé édenté encore plus difficile à comprendre que mon grand père et un croisement entre Elvis Presley et un 2be3 à peine pubère mais déjà fumeur invétéré. Cerise sur le gâteau, notre shérif en pantalons courts  finit par s'enamouracher d'une adorable créature dont il pourrait facilement être le grand père, mais ce type de relation vaguement incestueuse ne semblant gêner personne, tout le monde est très content pour lui et le laisse s'éclater.
Ce joyeux petit groupe doit donc venir à bout d'une vingtaine de méchants super énervés, et je laisserai ici planer le suspense sur le dénouement de l'histoire.Et puis non tiens, je vais faire comme dans wikipedia:
ATTENTION, ce qui suit contient des éléments qui dévoilent l'intrigue totalement imprévisible du film: 
A la fin, les gentils gagnent. TADAA.
Les valeurs exposées par ce film sont donc un condensé des grandes valeurs américaines que l'on retrouve dans un certain nombre de western de l'époque : victoire des faibles contre les puissants, tolérance et acceptation de la diversité au sein de l'entreprise et non discrimination à l'embauche (vieux, handicapés, alcooliques, puceaux, tous ont leur chance en tant qu'adjoint) ou encore relation politiquement incorrecte du type suggar daddy clairement affichée.
On retiendra enfin la scène absolument mythique et vaguement surréaliste au cours de laquelle les trois adjoints, dont deux sont par ailleurs crooners professionnels dans la vraie vie, improvisent une sympathique petite balade parfaitement coordonnée et visiblement mixée en stéréo avant d'aller buter du méchant, le tout sous l'œil ému de Grandpa John Wayne.

Au final, un western paillette certes, mais un summum du genre, un must du classique, réunissant une palette des plus grandes stars de l'époque pour un bon moment de cinéma.
A voir de préférence avec des pop corns, de la glace vanille noix de pécan et du Coca Cola.

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