Sad Bear
daria
Sad Bear, le dernier album solo de Tony Sly, chanteur charismatique des No Use for a Name, est sorti en 2011, un an avant la mort de son auteur. Aujourd'hui, il ressemble à s'y méprendre à un testament et il est difficile à celui que les mélodies de Tony Sly ont accompagné durant de longues années de ne pas sentir sa gorge se serrer à l'écoute de cette demi-heure de ballades désabusées, entrecoupées de déclarations d'amour éperdu à sa femme et à ses deux filles. On ne sait l'époux et le père qui leur a été pris mais on les plaint d'avoir pour toujours ce témoignage sonore de l'affection qu'elles avaient inspirée et de la bêtise crasse de la mort. Quant à nous, nous avons perdu la plus belle voix du punk mélodique. Elle est ici parfaitement mise en valeur par des arrangements dépouillés et le génie mélodique qui a imprimé cette touche de mélancolie inimitable à No use For a Name. Entre deux accélérations de rythme et malgré l'esprit potache de l'écurie (Fat Wreck Chords) à laquelle il appartenait, le groupe a toujours su instiller une part de solennité à ses albums.
De temps en temps, Tony Sly s'échappait pour déverser les urnes de tristesse dont son grand coeur était plein, en duo avec Joey Cape (chanteur de Lagwagon), pour un album acoustique ou seul. Sad Bear aura été la dernière de ces escapades. On ne peut que le déplorer en savourant les 12 courts morceaux de cet album d'une franchise et d'une simplicité désarmantes.
La cause de la mort de Tony Sly, à 41 ans, n'a pas été rendue publique mais peu importe. À quoi bon expliquer l'inacceptable ? Les ours n'ont jamais été aussi tristes que depuis l'été 2012 et nous aussi. Parmi les mots tendres, ironiques, révoltés et souvent naïfs choisis pour ce dernier album, « Hey God i've got a message for you : i don't think you exist », se révèle cruellement prémonitoire, comme un dernier pied de nez du vieux punk aux épaules larges et à l'âme fragile à cette absurdité qu'est la vie.
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