Sauvage

Jade Tigana

Aujourd'hui, j'ai cessé de t'aimer.

Ce matin là, il faisait une chaleur étouffante. Je me promenais aux abords d'une étendue désertique, je déambulais, à demie animée, dans cette immensité de grains de sel. Mes pieds, tièdes, s'enfonçaient dans le sable chaud, embrassant ma silhouette, épousant mes formes. J'avais pour usage de me  rendre en ce lieu dès que mon esprit ne trouvait pas refuge, lorsqu'en somme, mon petit monde à moi, avait besoin d'un ailleurs. Je m'y évadais avec légèreté, comme si j'eusse été en apesanteur, me laissant guider, tel un automate dénué d'affects, par l'atmosphère épurée qui m'entourait. Je marchais sans but, je cheminais à la dérive, je sentais seulement, oui, je ressentais avant même d'en appeler à la raison. J'avais d'ailleurs nommé ce désert, «  plage de velours », car l'on y éprouvait une sensation de douceur, mais une douceur ardente. Je brulais d'envie de murmurer ton prénom, mais les lettres fondaient dans ma bouche. Ce prénom qui, autrefois, trouvait un son mielleux au creux de mes lèvres,  n'avait désormais plus la même résonnance. Tes lettres de miel avaient disparu. Je compris alors que nos souvenirs avaient fondu, ils avaient fondu avec l'été..

Ton prénom je le criais pourtant, comme pour l'inciter à rencontrer un quelconque écho dans l'espace, mais notre infinité à nous s'était transformée en un sombre néant. Ton nom, je l'avais détourné, je l'avais perverti, je le bafouillais, et ne le proclamais plus avec délicatesse, ton nom n'était plus, il avait fusionné avec l'oubli, il avait brûlé avec le passé.

 

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