Scène d'escalade

Holly Storm

  (...)La partie était loin d’être finie. La rive opposée à celle où nous nous tenions quelques secondes auparavant ne menait nulle part. Devant Laura et moi, il n’y avait qu’un mur qui paraissait terriblement solide et infranchissable.

  Nous jurâmes chacune dans notre langue maternelle.

  A tout hasard, je levai les yeux au ciel. Comme l’endroit était beaucoup trop sombre pour que des yeux normaux puissent y voir quoique ce soit, mes yeux rouges ne purent m’offrir qu’une vision floue et teintée de nuances froides. Cela ne m’empêcha par de noter un détail :

  -Laura, regarde là-haut avec un de tes sorts.

  J’aurais juré que Laura me lança un regard perplexe à ce moment-là, mais elle ne discuta pas et envoya un sort en l’air – pour être plus précise, elle relança son sort allumant une petite boule lumineuse au creux de sa paume, puis par un procédé dont elle détenait le secret elle l’envoya en hauteur.

  J’avais bien vu : avant que la lumière ne s’estompe, elle nous permit de voir que le reste du chemin ne se trouvait non pas devant nous, mais bien au-dessus de nous. Les murs étaient tapissés de crochets semblables à ceux dont on se sert pour amarrer les bateaux aux ports ; de planches de bois – sans doute vestiges d’un quelconque échafaudage – et certaines pierres ressortaient légèrement de la cloison. Légèrement, mais néanmoins assez pour y accrocher quelque chose.     Comme une main.

  Je descendit de la planche de Laura.

  -J’imagine que tu ne peux pas me transporter là-haut avec ta planche.

  -A moins que tu n’ais envie de te suspendre à ma taille, non, je ne peux pas, me confirma-t-elle.

  -Très bien.

  Je pris un peu d’élan, et courus comme une folle droit vers la cloison pierreuse en face de moi. Je serais sans doute rentrée droit dedans si au dernier moment je n’avais pas bondi contre lui, ce qui eu pour effet, une fraction de seconde, de me permettre d’adhérer au mur. La détention busque de ma jambe associée à la propulsion que m’apporta mon bras quand il fila comme une flèche au-dessus de mon crâne m’éleva plus haut encore qu’un saut normal, et la main finissant fièrement le membre supérieur tendu qui était le mien s’agrippa au premier objet qu’elle sentit sous ses doigts, à savoir un crochet.

  Je restai bien cinq secondes en suspension pour reprendre mon souffle, puis comme ma paume me brûlait à force de devoir supporter tout mon poids, je réunis toute mon énergie de mon bras calciné – celui qui m’empêchait de tomber – le plia aussi rapidement que possible et montai encore plus haut que précédemment. Une pierre en relief caressa les doigts de ma main droite, ils se refermèrent aussi sec sur elle. Etant suffisamment large pour permettre à un dictionnaire de s’y lover, j’en profitais pour y insérer mon autre main. Mes pieds glissèrent contre la surface du mur, tentant pitoyablement de trouver une bonne prise, jusqu’à ce qu’ils abandonnent faute de résultat.

  -On peut savoir se que tu compte faire ? me rabroua Laura.

  Je ramenai mes genoux contre mon torse, les détendis brusquement, ni vraiment à l’horizontal ni vraiment à la vertical, entre les deux ; elles poussèrent mon corps un peu plus en hauteur, et mes doigts frôlèrent la pierre jusqu’à ce qu’ils rencontrent une autre brique en relief. Instinctivement, ils s’y accrochèrent de toute leur force.

  -Ça se voit, non ? ricanai-je au dessus de Laura, je vais escalader le mur.

  -Tu es au courant qu’on ne sait pas jusqu’où il monte ?

  Je posai mes pieds sur une petite prise que je venais de retrouver, que se soit le crochet où la pierre en relief précédant celle où je m’étais suspendue.

  -Je sais, soupirai-je en m’accrochant avec une main au morceau de bois à un point supérieur.

  Même si je mettais toutes les étincelles de magie qu’il me restait dans mon Rubrum Nocte, il ne me permettrait pas de voir plus loin. Juste moins flou.

  -On se rejoint en haut, me lança Laura au passage, en filant à la vertical.

  En me décalant d’un petit saut vers la gauche pour attraper une autre planche de bois, je songeais que Laura était décidément de plus en plus détestable.

  J’allais tenté de me suspendre encore une fois pour essayer de saisir ce qu’il me semblait être un crochet lorsque je remarquai que la planche de bois grâce à laquelle je ne tombais pas n’était pas le vestige d’un échafaudage, mais faisait parti d’une structure qui s’étendait sur tout l’espace du tunnel à la vertical. Pour être plus précise, les longs morceaux de bois rectangulaires étaient liés entre eux et formaient une sorte de grillage.

  Je me suspendis avec mes deux mains à la planche, me décalai davantage vers la gauche jusqu’à ce que j’arrive sur une autre plus large. Avec la force de mes bras, je me hissai dessus, posai mes pieds sur elle, restai accroupie et fis travailler mon équilibre en espérant de toutes mes forces que le bois n’allait pas céder sous mon poids, si faible soit il. Heureusement, il n’en fut rien.

  -Ça va comme tu veux là-haut ? ironisai-je en mettant mes bras en croix pour avoir une meilleure stabilité.

  -Tu n’es plus très loin du sommet !

  -C’est vrai ?

  -Oui ! Allez, monte !

  Je fis la moue, mais n’ajoutai aucun commentaire, et me mis à la recherche d’une autre prise. Là ! au-dessus de ma tête, une planche de bois qui n’avait pas la longueur collée au mur, mais bien la largeur. Elle offrait une excellente prise – tout du moins, elle en avait l’air.

  Etant déjà dans une position adéquate, il me suffit de donner l’impulsion nécessaire à mes jambes pour qu’elles me propulsent en l’air, et mes bras tendus n’eurent qu’à se passer autour de ce morceau de bois pour m’accorder une nouvelle fois le privilège de m’élever davantage dans ce tunnel vertical.

  Encore une fois, je me hissai à la force de mes coudes pour lui grimper dessus. Je regardai en face de moi et remarquai immanquablement la pierre en relief à un point bien supérieur du sommet de mon crâne. Génial.

  Je m’approchai le plus possible du mur, courai de quelques pas sur lui comme je l’avais fais au début de l’escalade, et m’agrippai sans mal sur elle. Vint ensuite une étape un peu plus délicate, à savoir un décalage vers la droite, suspendue par d’autres pierres, et de temps à autre par des crochets. Cela m’était indispensable pour atteindre l’autre pôle du tunnel, où il y avait des moyens presque sûrs d’atteindre son sommet sans risquer de tomber. Je dis « presque »…

  L’avance terminée, je montai encore grâce à non pas une pierre en relief, mais un trou à même le mur. Ensuite, je m’élevai plus haut grâce à une série de crochet qui m’offrirent des prisent non seulement pour mes doigts mais aussi pour mes pieds une fois que je fus suffisamment avancée.

  -Quelle galère, marmonnai-je dans ma barbe.

  -Tu as dis quelque chose ? lança la voix de Laura à quelques mètres au-dessus de moi.

  -Non non, mentis-je.

  La dernière ligne droite : avant d’atteindre la petite plateforme en bois sur laquelle avait atterri Laura il me fallait attraper un mince morceau fait dans la même matière, aussi fin qu’une branche, accroché en dessous de cette même plateforme. Implorant le ciel de toutes mes forces, je ramenai mes genoux à même mon torse, bondit en arrière grâce à mes jambes, j’empoignai cette branche et me restai les jambes dans le vide sans pour autant tomber. Jusque là, tout se passa bien. Malheureusement vint après l’évènement inévitable que j’avais redouté.

  La branche, ne supportant pas mon poids, craqua et piqua vers le sol, m’emportant avec elle dans sa chute.

  Je pense avoir crié à ce moment précis. Je crois, je n’en suis pas sûre. La seule chose dont je me souvienne précisément, c’est que Laura saisit vivement mon poignet brûlé avant que je ne tombe et m’empêcha de faire le chemin inverse de manière précipitée et… définitive.

  Je regardai la branche tomber jusqu’à ce qu’elle soit hors de vue, et même quand se fut le cas mes yeux ne purent se détacher du trou béant et noir qui avait faillit m’engloutir. C’est quand ma semblable me fit monter sur la plateforme que je réussis à décrocher mon regard et à regarder droit devant moi.

  -C’est la deuxième fois que tu me sauves la vie en quelques minutes…, haletai-je en m’asseyant à même le sol.

  -Et alors ?

  -Alors… merci.

  Laura fit une grimace, me remit de force debout et m’entraîna avec elle en me tenant fermement par le poignet.

  -Attends qu’on soit sortie de cette histoire avant de me remercier.

  Je levai les yeux au ciel.

  Chassez le naturel, il revient au galop !

  Quelques pas plus tard, mon Rubrum Nocte me permit de voir que le sol rocheux ne s’étendait pas loin mais au contraire s’arrêtait net pour ne laisser voir qu’un précipice abyssal. Laura et moi nous stoppâmes sans équivoque.

  -Wow, soufflai-je, joli gouffre.

  -Ngnnnnnnn… ghhhhhhhh…

  Laura lâcha ma main et s’effondra sur le sol. Elle serra fébrilement son crâne entre ses fines mains en continuant de pousser des gémissements indistincts.

  -Laura ! m’écriai-je en m’accroupissant à ses côtés.

  Elle souffla un mot inaudible, et quelques instants plus tard une auréole dorée tourna autour du sommet de sa tête comme une toupie en furie. Elle se redressa difficilement sur les coudes.

  -Mes réserves de magie s’épuisent. Je ne vais pas tenir encore très longtemps.

  Elle s’aida de mon bras afin de se remettre sur ses jambes.

  -Mais… ça va aller ?

  -Oui, oui. Je pense pouvoir tenir jusqu'à ce qu'on ait fini notre... affaire.

  Elle avait beau avoir un ton assuré et une expression sereine, j’étais persuadée qu’à l’intérieur il n’en était rien. Toutefois, si c’était le cas, ce n’était ni plus ni moins qu’une raison supplémentaire pour avancer plus vite.

  Laura lança son sort de luminosité et examina le précipice. En y regardant de plus près et en poussant un peu mon Rubrum Nocte, je remarquai qu’il se dressait au beau milieu de ce gouffre une structure en bois formant un grillage similaire à celle du tunnel vertical que j’avais escaladé. Nous nous consultâmes d’un simple regard, puis prîmes de l’élan et sautâmes de planche en planche, morceau de bois à morceau de bois, sans nous arrêter ni nous poser de questions ; jusqu’à ce que nous atteignîmes la rive voisine. Cela ne fut pas long, environ dix secondes, quinze à tout casser.

  En face de nous résidait une grille fermée infranchissable. Nous examinâmes les alentours et Laura remarqua, un peu recalé sur le côté, un palan cuivré chargé de plomb. J’allais suggérer que nous l’utilisions toutes les deux lorsque, à bout de forces, elle s’effondra contre le mur en se tenant fermement la tête entre les mains.

  Je devrai encore me débrouiller seule.

  -Je vais voir si je peux t’ouvrir la grille, lançai-je par-dessus mon épaule en utilisant le palan.

  Mon corps à la masse insignifiante comparé à celle du plomb se retrouva propulsé en hauteur et il s’en fallu de peu pour que je ne me fracasse pas la tête contre le plafond rocailleux.

  Dès que mes jambes eurent retrouvé le sol, je m’empressai de chercher par où je devais passer pour continuer. Là ! sur la droite, ce n’était pas à proprement parlé un couloir, mais au moins n’était-ce pas un cul-de-sac. Je courus dans cette direction, puis compris vite, au vu des obstacles, ce que je devais faire. Quelques caisses se reposaient contre la paroi rocheuse, je montai dessus, fis quelques enjambés rapide, puis bondis et attrapai un petit cerceau en aluminium accroché au bout d’une chaîne. L’élan que lui apporta ma venue soudaine le fit tourner à l’angle du couloir, m’emportant avec lui. Lorsque la chaîne fut tendu à son maximum, je lâchai le tout et laissai tranquillement mon corps se faire emporter par sa lancé, pour atterrir sur une planche de bois accroché au mur. J’attendis d’être parfaitement sûr d’avoir trouvé un bon équilibre, puis sautai sur un barre de zinc se trouvant un peu plus loin, l’attrapai avec mes deux mains, me balançai à la force de mes bras et me jetai sur une autre planche de bois.

  Cette fois, sans attendre, je continuai ma course sur une deuxième planche, puis une troisième – qui elle, étant plus bas, fut plus facile à atteindre. Je risquai un coup d’œil en bas et remarquai que j’étais à plusieurs dizaines de mètres au-dessus d’une rivière aux eaux aussi sombre que celles du lac précédent.

  Personnellement, je n’avais pas trop envie de vérifier par moi-même si elles accueillaient les mêmes habitants, bien que la réponse me paraissait évidente.

  Je marchai sur la poutre, courai d’un pas sur le mur et m’agrippai à une pierre en relief. Tenue uniquement par un bras, je fis travailler mes muscles, me propulsai en l’ai et attrapai une planche clouée complètement contre le mur. Il fut ensuite beaucoup plus facile de l’escalader à l’aide de ses jumelles se trouvant à peine plus haut, et de ce fait facile à atteindre.

  Je me hissai sur le sol qui se trouvait au bout de cette ascension, me remis debout et me décontractai les muscles présents dans les bras et les jambes. Je profitai de mes quelques instants sur le sol ferme, puis pris de l’élan, bondis sur une poutre, ensuite sur une deuxième, m’accrochai à une barre métallique réunissant les des murs parallèle formant le couloir, me balançai sur elle et me catapultai sur une autre poutre.

  Je dois dire que cela commençait à devenir assez répétitif.

  Je continuai d’avancer, tantôt en sautant, tantôt en me projetant, et j’arrivai à nouveau sur la terre ferme – ou plutôt sur la roche ferme. Un coup d’œil à gauche, un coup d’œil à droite, et je choisis finalement la droite. Pourquoi ? Tout simplement parce que je venais de repérer la grille derrière laquelle se trouvait Laura. De ce côté-ci néanmoins se trouvait une manivelle permettant d’actionner le mécanisme pour pouvait l’ouvrir. C’est ce que je fis.

  Laura avança, titubante et fatiguée, l’halo doré au dessus de sa tête se faisant de plus en plus faible.

  -Laura…, prononçai-je pitoyablement comme si le fait de dire son nom pouvait la guérir et lui redonner toutes ses étincelles de magie de manière instantanée.

  Elle se releva en prenant appui sur la roche, tint debout à grand peine, mais réussit néanmoins à marcher. C’était ça le gros problème des adeptes : quand il faut vraiment que nous maintenions un sort actif alors que nous sommes presque à court d’étincelles, plutôt que de le lâcher, notre corps puise dans la première source d’énergie qu’il trouve, à savoir les forces vitales.

  Ce qui pouvait s’avérer très dangereux, surtout si, comme Laura, cela faisait près de trois jours que l’on activait un sort sans se reposer ni pratiquer le rituel.

  -Qu’y a-t-il devant, demanda-t-elle en pointant du doigt l’immense étendue noire qui faisait office de couloir.

  Elle avait désactivé son sort de lumière, et donc ne savait vraiment pas ce qu’elle désignait, et était obligé de me tenir la main pour de pas se perdre.

  -Il n’y a qu’un seul moyen de le savoir, lui dis-je en souriant, bien qu’elle soit incapable de me voir.

  Elle dut lire dans mes pensées car elle me fit la mine refrogné qu’elle fait lorsqu’on fait preuve de sentiments envers elle. 

  Le couloir s'étendait sur plusieurs mètres, ensuite il descendait en escalier. J'haussai un sourcil brun. Un peu vieux jeu, enfin! J'avertissai Laura de la descente, serrai un peu plus fort sa main dans la mienne, et nous descendîmes vers la dernière ligne droite.

  Les affrontements.

  • Très bien... quelqu'un d'autre? Allez, s'il vous plaît!!!!!!

    · Il y a environ 12 ans ·
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    Holly Storm

  • Petit extrait du bouquin que je suis en train d'écrire (j'ai presque fini!) En fait j'ai de gros doute sur cette partie, j'aurais aimé avoir des conseils d'auteurs confirmés, qu'ils me disent si c'est lourd ou pas, ce que je devrais changer et ce que je devrais garder... EN gros ce que vous en pensez cher lecteurs!

    · Il y a environ 12 ans ·
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    Holly Storm

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