clef de l'Heinquoica égarée
cedille
Ce matin là, A c'était réveillé serein, enjoué même.
Il sentait en lui, l'appel du large.
Bien sûr, tout le monde devait partir, le bail s'arrêtait là.
Mais il n'avait prévenu aucun de ses colocataires, pas de mot d'adieu non plus.
Diva piaffait d'impatience à l'arrière. Il se sentait heureux de sortir de nos vies.
Il regarda la maison une dernière fois et démarra.
Nous avions rendez-vous au p.m.u de V, là où on s'était séparés.
J'avais cette boule au ventre, et un fort sentiment d'abandon.
Il est apparu, je sentait son détachement comme un poignard déjà planté dans le lien.
Il m'a sourit, je n'ai pas dit un mot.
Je l'ai pris dans mes bras pour être avec lui au delà du verbe.
Il a répondu à mon étreinte par un vrai câlin, puis s'est assis.
Mes larmes s'étendaient sur mon sourire. Ma gorge jusque là trop serrée pour dire, a tout à coup laissée s'échapper une cohorte de mots d'encouragements et d'amours incontrôlables. Avec ce tressaillement, tout dire avant qu'il soit trop tard, charger son sac de plus plus plus pour qu'il soit plus fort.
il m'a regardé et m'a dit " viens avec moi".
J'avais rêvée ces mots tant de fois...
Une semaine de report, a vivre des choses si intenses que le poignard serait encore plus douloureux.
-oui laisse moi prendre trois bricoles et mettre un mot au collocs.
J'abandonnais là ma prépa, mes réunions , mes notes, les fondations de ma vie rêvée.
L comprendrait-elle. J'avais trahis une fois auparavant les limites de l'amitié pour un homme.
Mais ne pas dire oui là ,tout de suite, m'apparaissait comme un non à la vie.
J'ai pris trois fringues pour revenir d'ici peu.
J'avais si peur qu'il m'échappe, qu'il change d'avis, qu'il me file entre les doigts.
Il m'attendait, son sourire était celui des premières fois, nos débuts.
Putain, deux ans à l'attendre, et il se décidait quand il était sur de s'enfuir.
Ces jours ont été hors du monde, hors de toute les contraintes de temps.
Mais quelque chose comme le quatrième jours, j'ai rallumé mon portable.
Erreur fatale.
Le départ ne se ferait pas sans moi, il me fallait rentrer, le quitter et cette fois pour de bon.
Nous, séparer.
Je regardais A comme la personne pour qui je ressentait le plus d'attachement, en essayant de fixer son image, qui s'enfuyait déjà.
Sans mot dire, je pris mes affaires dans la voiture, caressait Diva, lançait un regard à celle-ci, lançait un regard à A.
Déposait une lettre sur son volant et tendis le pouce.
Le temps qu'il comprenne, j'étais déjà en route.
Un poignard fiché dans le respirateur.
Rebrousser la route. Le chemin de sa liberté éludait la mienne.
J'espérais juste ne pas refermer la petite fêlure qui laissait entrer la lumière sous sa carapace et que j'avais tant de fois entraperçu sans être sûre.
Il n'est pas reparu dans ma vie cet été là. Je me suis empêchée de l'attendre même si chaque bout de ma peau était imprégné de la sienne. Je suis passé de la couche des uns à la couche de celles des autres pour éviter le tête à tête avec mon manque.
Ce qu'il a vécu lui, je n'en ai pas la moindre idée.
C'est une vrai question et de quoi ?
L'illusion qu'il se faisait de lui même, besoin de rien,ni de personne,s'est elle avérée ?
A t-il rencontré un amour capable de l'enraciner, ou déraciné avec lui.
Ce qui est sûr, c'est que le vide qu'il a laissé là où il était passé, ne pouvait être habité par quiconque.
J'attend qu'il toque un matin à la porte, de retour. Réparé de cette fuite, prêt à construire.
Mes mains se teintent d'argile, l'argile se teinte de rides.
J'ai vécue d'autres histoires, tachée de me lever en dehors de cet espoir et de me coucher sans déception.
Je le visualise heureux et serein comme le jour du départ.