Simon

lwsiffer

Jour 2963

Tous les matins c'est la même routine. Une sonnerie me réveille et ne s'arrête que lorsque je sors du lit. Nu et tremblant de froid, je dois enlever les draps et les mettre dans le panier à linge. Le mur pivote et la douche apparaît. Le jet est automatique. Cinq minutes, pas plus. Juste le temps de me laver. L'ouverture aussi est automatique et je sors encore dégoulinant. Une trappe s'est ouverte à côté de la douche avec une serviette et une tenue propre. Le temps que je me sèche, la douche a disparu derrière le mur. Je mets la serviette dans le panier à linge.

Puis c'est l'heure du plateau. Glissé par l'ouverture sous la porte. Il contient toujours la même chose : une seringue à auto-injection, trois cachets dans une petite coupelle en plastique, un verre d'eau, une barre de céréales et une compote.

Je dois d'abord m'injecter le contenu de la seringue et ensuite prendre les cachets. Après, je peux manger tranquillement. Je prends toujours mon temps, assis sur mon lit car je sais que je vais m'ennuyer un moment.

Au bout d'une heure, ou deux, la « blouse blanche » arrive enfin. Toujours les mêmes gestes. Elle regarde mes yeux, mes oreilles, l'intérieur de ma gorge. Elle prend ma température et ma tension. Elle teste mes réflexes. A chaque fois, elle me donne un petit flacon dans lequel je dois faire pipi. Et puis elle s'en va et je dois encore attendre.

J'attends qu'on vienne me chercher pour aller voir Charline. Quand j'entends les bruits de pas, je suis déjà debout, je ne tiens plus en place. On déverrouille la porte et quelqu'un m'attend pour m'amener au bureau de Charline. J'ai toujours hâte de la voir. Sans vraiment comprendre pourquoi. Quand elle me voit arriver, elle m'accueille toujours gentiment.

Charline aussi est une blouse blanche, mais elle est différente. Avec elle, je dois juste parler. Je m'allonge sur le canapé et elle baisse un peu la lumière. Elle me parle doucement. Sa voix me berce, je l'entends à peine. Parfois je ne reste pas longtemps, je n'ai rien à lui dire et elle a l'air contrariée. Parfois je reste longtemps, peut-être une heure. Ou deux. Mais je ne me souviens pas de quoi je lui ai parlé. Et puis je ne me souviens pas avoir quitté son bureau. Je me retrouve dans ma chambre sans savoir comment je suis arrivé là.

J'attends encore. J'attends mon repas. Un plus gros repas que celui du matin. Je crois qu'on appelle ça le « déjeuner ». Glissé sous la porte, comme le plateau du matin. Cette fois je mange sur la petite table contre le mur. Quand j'ai terminé, la porte de ma chambre se déverrouille et je peux aller où je veux. Enfin, jusqu'à un certain point.

Mon univers est un long couloir avec des pièces de chaque côté. D'abord il y a ma chambre et en face les chambres des « blouses blanches ». Ensuite, je passe devant l'infirmerie et le bureau de Charline et une pièce qui ne sert plus sur laquelle il y a écrit « Conference room ». En face, il y a une très grande pièce ou je n'ai pas le droit d'aller, mais je crois qu'il y a beaucoup de blouses blanches à l'intérieur.

La dernière partie du couloir est celle que je préfère. Il y a la chambre du gentil monsieur qui nettoie et à côté le placard où il y a son matériel. En face, il y a la bibliothèque, ma pièce préférée. Je passe beaucoup de temps là.

Juste à côté de la bibliothèque il y a la chambre des gardes. Il y en a deux et celui qui me fait le plus peur c'est celui qui reste devant la porte qui ferme mon univers. Au bout du couloir. Il est toujours là. Je n'ai pas le droit de franchir cette porte. Je ne sais pas ce qu'il y a de l'autre côté.


Jour 2964

La séance d'aujourd'hui a été productive. Nous avons enfin obtenu des informations intéressantes que j'ai immédiatement communiquées au Dr. Ishimura, afin que l'équipe de décryptage se penche dessus sans tarder. La nouvelle formule du Docteur semble plus efficace même si le sujet présente parfois quelques problèmes de motricité. Néanmoins les séances se déroulent sans problèmes, aussi je valide l'utilisation de cette formule sur le long terme.


Jour 2965

Je suis enfin à l'intérieur. Tous ces contrôles de sécurité n'en finissaient pas. Les gardes m'ont conduit à ma cabine pour que je puisse m'installer et un des gradés est venu me voir pour me donner ma tenue et me faire visiter. Ça m'a déjà donné un premier aperçu des lieux. Il m'a montré les endroits où je pouvais aller et expliqué comment nettoyer. Mais c'est pas pour ce genre de nettoyage que je suis là.

Bref, pour l'instant je vais faire profil bas jusqu'à faire partie du décor. Une fois qu'ils m'auront oublié, j'essaierai d'en savoir plus sur l'agencement des lieux. D'ici là, silence radio.


Jour 2967

Depuis plusieurs jours, mes conversations avec Charline sont courtes. Mais bizarrement, elle n'a pas l'air déçu. Heureusement parce que je n'aime pas quand elle est déçue.

J'ai plus de temps libre dans ma journée alors je lis. J'adore lire. Je passe quasiment tout mon temps à la bibliothèque. Il n'y a jamais personne et je peux m'installer où je veux. J'aime la lumière dans cette pièce. Elle est chaude, pas comme dans ma chambre. Et puis il y a des fenêtres. Trop petites et trop hautes pour que je puisse voir l'extérieur mais je peux apercevoir le ciel un petit peu.

Parfois pour changer, je vais lire dans la Conference room. Là non plus il n'y a jamais personne. La pièce est moins accueillante mais les chaises sont plus confortables.

Ça fait longtemps que je n'ai pas vu le monsieur qui fait le ménage. C'est dommage, c'est la seule personne avec qui je peux discuter en dehors de Charline. Et il m'apprend des choses. J'espère qu'il reviendra vite.


Jour 2968

Les dernières séances ont toutes été infructueuses. Comme souvent après une bonne séance. Mais cela n'est pas très grave puisque les dernières informations ont pu être décryptées et ont permis d'empêcher une nouvelle attaque. Je n'ai pas tous les détails à ce sujet, vous les trouverez comme d'habitude dans le rapport de l'équipe d'intervention. Pas de changement au niveau du protocole des séances, la formule actuelle est toujours validée jusqu'à nouvel ordre.



Trois jours à bord. Je peux déjà dire que ça va être compliqué de glaner des informations. Je ne croise littéralement personne. Et beaucoup d'endroits me sont interdits d'accès, y compris dans la coursive même où se trouve ma cabine. Et avec les gardes qui surveillent tout et sont muets comme des tombes, ça me facilite encore moins le boulot.


Jour 2970

Hier quand j'ai voulu aller voir si le monsieur du nettoyage était revenu j'ai vu un homme dans le placard qui cherchait quelque chose. J'ai cru que c'était lui parce qu'il portait la même tenue mais ce n'était pas lui, alors je suis parti avant qu'il me voit.

Ce matin je suis resté longtemps dans le bureau de Charline et je suis fatigué, je n'ai pas la force de lire, ni d'écrire.



La séance de ce matin m'a laissée quelque peu perplexe. J'ai eu beaucoup de mal à retranscrire les paroles du sujet. Contrairement à d'habitude, son débit n'était pas fluide, il était agité et s'interrompait constamment, mélangeait ses phrases. J'ai transmis ce que j'ai pu à l'équipe de décryptage. Difficile de dire si la formule est en cause, pas de changement à prévoir pour l'instant sur son utilisation.


Jour 2971

Cet après-midi quelqu'un a frappé à ma porte. Un moment j'ai eu peur de m'être fait griller mais c'était juste un gamin. Il avait l'air surpris de me trouver là et me fixait d'un air ahuri. Il doit être un peu simplet, j'ai essayé de lui parler, apparemment il cherchait le gars que je remplace. Mis à part ça, je n'ai pas réussi à en tirer grand-chose. Peut-être le gamin d'un employé qui vit ici.



Quand j'ai frappé à la porte ce n'est pas le monsieur de d'habitude qui a ouvert mais un homme beaucoup plus jeune que je n'avais jamais vu. Il m'a dit qu'il remplaçait le monsieur d'avant. C'est la première fois que je vois quelqu'un d'aussi jeune ici, presque comme moi. Je crois. Il m'a dit qu'il s'appelait Peter mais quand il m'a demandé comment je m'appelle je n'ai pas pu répondre. Alors je suis parti. Je n'y avais jamais pensé, qu'est-ce que je dois répondre ? Il faudra que je demande à Charline.



Séance infructueuse aujourd'hui comme hier. Les dernières informations recueillies étant plus chaotiques que d'ordinaire, l'équipe de décryptage a eu plus de mal à tout déchiffrer et le groupe d'intervention n'a réussi que de justesse à éviter le pire, bien qu'il y ait apparemment eu quelques blessés. Les détails vous seront communiqués dans leur rapport.

Autre chose me préoccupe. Ce matin, le sujet m'a demandé s'il avait un nom. Je trouve à la fois étrange qu'il ne se soit pas posé la question avant et qu'il s'en préoccupe à présent. Bien sûr je ne lui ai pas répondu et j'ai voulu savoir pourquoi il me demandait ça, mais il n'a rien dit, comme s'il cachait quelque chose. Ce n'est peut-être que mon interprétation.

Formule approuvée.


Jour 2972

Aujourd'hui, on m'a demandé de faire le tri dans une salle de conférence inutilisée qui est pas loin de la partie des coursives où je n'ai pas le droit d'aller. Y a d'ailleurs un garde qui fait le planton. Je me dis que cette pièce serait peut-être exploitable. Pendant que je fouillais, le gamin de la dernière fois est entré. Il est bizarre, il m'a dit qu'il n'avait pas de nom. Mais, plus important, quand je lui ai demandé d'où il venait il m'a justement montré la partie des coursives derrière le garde. Je sais pas si c'est un de ces gosses de riches sur-protégé mais si je gagne sa confiance il pourra peut-être me servir.



Je suis inquiète après la séance de ce matin. Le sujet n'a pas cessé de répéter la même phrase en boucle pendant près d'une heure. J'ai essayé de le guider, de le rediriger sur autre chose mais c'était comme s'il ne m'entendait plus, il semblait en transe. C'est la première fois que ce genre de choses arrive. J'ai transmis la phrase à l'équipe de décryptage. Il n'est pas de mon ressors de décider si elle est pertinente ou non. Il est possible que la formule du Dr.Ishimura doive être révisée si cela venait à se reproduire.

Formule approuvée.


Jour 2973

Cet après-midi, le gamin est passé me voir. Il a l'air de m'apprécier, ce qui m'arrange bien pour le coup. Je dis gamin, mais il doit bien avoir 13 ou 14 ans. Il ne connaît pas son âge non plus et j'ai remarqué qu'il est toujours habillé en blanc, un peu comme un malade. Il est peut-être attardé. Il m'a dit qu'il était ici depuis toujours, bref impossible d'en savoir plus sur lui. Par contre, il a été très bavard sur l'agencement de cette coursive et les personnes qui y travaillent. Au vu de ce qu'il a dit, je ne suis pas sûr d'être au bon endroit, il y a l'air d'avoir que des toubibs ou quelque chose comme ça. Mais la présence des gardes est suspecte.


Jour 2976

Je vois Peter presque tous les jours. On s'entend bien. Il vient de l'extérieur ! Il a déjà vu le ciel en vrai ! Et la mer ! Et les arbres ! Je lui ai posé plein de questions et il m'en a posé plein aussi. Je lui ai parlé de Charline bien sûr, du Dr. Ishimura, des infirmières et des autres blouses blanches que je ne vois jamais. Je lui ai parlé de la bibliothèque aussi et des fois il vient me voir quand j'y suis. Il a l'air d'aimer cette pièce aussi.

Charline est très contrariée en ce moment. Pourtant je reste longtemps avec elle, mais elle ne semble pas satisfaite, alors je suis contrarié moi aussi.

Je viens de recevoir mon plateau. C'est curieux aujourd'hui il y a deux seringues et cinq cachets. Mais on m'a dit de tout prendre sinon je n'aurais pas mon repas. Alors j'ai tout pris. Je me sens bizarre, j'ai l'impression de ne pas voir comme il faut.



Après quatre séances similaires où la seule information obtenue était cette seule phrase en boucle, le Dr.Ishimura a pris l'initiative de changer la formule sans m'en avertir. Ou plutôt, il a simplement doublé les doses de DXM ! Résultat, le sujet n'a même pas pu être amené à mon bureau, on a frôlé l'overdose ! Il n'arrivait pas à marcher correctement et à commencer à vomir, puis il a été pris de tremblement et n'était plus capable de parler.

Il a été emmené immédiatement à l'infirmerie et sera gardé en observation pendant les prochains jours. Les séances seront de ce fait suspendues jusque-là et je suggère que le Dr.Ishimura revoit immédiatement sa formule en gardant cette fois à l'esprit le bien-être du sujet.

Nouvelle formule rejetée.


Jour 2979

Trois jours que j'avais pas vu le gamin et alors que j'inspectais la chaufferie, il a fait irruption dans la pièce et s'est jeté dans mes bras. Il m'a dit qu'il a été très malade et qu'il n'avait pas le droit de sortir de sa chambre. Il ne voulait plus me lâcher. J'ai dû le réconforter.

Je me demande vraiment ce qu'il fait là. Je pensais que c'était un gosse de riche mais c'est pas net son histoire. Il m'a parlé d'une certaine Charline qui a l'air d'être une sorte de psy, mais il ne se souvient pas de ses séances. Et il n'a jamais mis les pieds dehors ! Il m'a quand même demandé comment étaient les arbres ! Comme si y en avaient encore... Je vais essayer d'en savoir plus.

Sinon j'ai inspecté le circuit électrique de la plupart des pièces et deux endroits semblent convenir pour l'installation des sangsues. D'après le gamin, la pièce où se trouvent toutes les « blouses blanches » comme il les appelle, se trouve juste à côté. Ça doit être un genre de labo de recherches. Si c'est le cas, on aura accès à leur station de données. Vous pouvez déjà commencer à prévoir le colis.



J'ai été très malade. C'était horrible. Je ne sentais plus mon corps mais je me sentais mal quand même. Je voyais flou, je ne pouvais plus bouger, je ne savais plus où j'étais. L'infirmière m'a porté à l'infirmerie. Je suis resté longtemps allongé là. J'avais tout le temps envie de vomir. Après j'étais de nouveau dans ma chambre, mais toujours allongé.

Heureusement maintenant ça va mieux. Ce matin je n'avais qu'une seringue sur mon plateau, comme avant. Dès que j'ai pu sortir je suis allé voir Peter. J'avais besoin de le voir, et je l'ai serré très fort dans mes bras. Il a été gentil, il m'a caressé les cheveux et je me suis senti mieux.


Jour 2980

Les effets de surdose du traitement ont complètement disparu. L'infirmière et moi-même avons jugé opportun d'attendre encore quelques jours avant de tester la nouvelle formule. Je tiens à vous informer que le Dr.ishimura n'a pas jugé bon de m'informer des nouvelles molécules qu'il a utilisé. Son comportement m'a interpellé, il semblait à cran et m'a ordonné de lui donner directement le contenu de la prochaine séance sans passer par le protocole habituel. Je sais que notre travail peut être stressant mais j'espère qu'il n'est pas en train de perdre pied.

En attente des résultats de la nouvelle formule.


Jour 2981

Franchement si c'est pour faire de la merde à chaque fois, vous feriez mieux d'attendre les infos que je vais peut-être pouvoir récupérer ici ! Par contre, je vais avoir du mal à récupérer le colis avec toute leur putain de sécurité. J'ai le droit de descendre à terre mais je dois rester dans la zone sécurisée le long de la côte. Le passeur va devoir se débrouiller pour me rejoindre, parce que je me retaperai pas les fouilles au corps, scanners et autres tests d'identité. J'avais même dû laisser mes fringues ! Dès qu'il aura trouvé un moyen de passer, je me débrouillerai pour sortir, mais là je suis cloué au lit. Je crois que j'ai le « mal de mer ». J'en avais entendu parlé mais je ne m'attendais pas à ça. Enfin j'ai connu pire.



Je ne me sens pas très bien en ce moment. Je pensais que c'était fini mais j'ai encore vomi aujourd'hui. Dans le bureau de Charline en plus. Alors qu'elle est déjà de mauvaise humeur. En ce moment, il y a une tempête. J'ai aperçu les gouttes sur la fenêtre de la bibliothèque et je sens qu'on bouge beaucoup. Quand je suis allé voir Peter, il était allongé sur son lit à cause du mouvement. Moi aussi avant ça me rendait malade, mais je m'y suis habitué. Je me suis allongé à côté de lui et on est resté comme ça, sans rien dire avec juste le bruit de la tempête.


Jour 2982

Je ne comprends pas votre décision. Je ne sais pas ce que le Dr.Ishimura vous a dit mais il a sa part de responsabilité dans cet incident. Depuis que le sujet ne cesse de répéter la même phrase en boucle, il est particulièrement nerveux et je suis persuadée que sa nouvelle formule est plus puissante et que c'est elle qui a influencé le comportement du sujet lors de la dernière séance.

Oui je n'aurais pas dû laisser traîner ce coupe-papier, je suis en partie responsable de ce qui est arrivé. Mais j'ai toujours veillé au bon déroulement des séances et le sujet n'avait jamais eu de comportement dangereux auparavant. Il ne voulait pas réellement se blesser, il voulait, il devait transmettre quelque chose. C'est parce que j'ai tenté de l'arrêter qu'il m'a blessé également, mais il s'est même excusé à plusieurs reprises alors qu'il était encore dans un état second. Il ne doit même pas s'en souvenir.

Je suis plus inquiète pour les profondes entailles qu'il s'est faites à la main et je suis surprise que le Dr.Ishimura minimise la portée qu'elles pourraient avoir, vu la nécessité que le sujet avait de nous les transmettre. Il pourrait s'agir de symboles déchiffrables. Lui qui prend toujours au sérieux chaque élément nouveau pour l'étudier sous tous les angles, je ne comprend pas sa décision. Mais surtout je ne comprend pas que vous me retiriez la gestion des séances pour une seule erreur depuis tout ce temps. A son profit qui plus est ! Le Dr.Ishimura n'a pas les qualifications pour mener à bien ce genre de séances. Je ne vais sûrement pas accepter cette décision sans rien dire.



J'ai enfin ma permission pour descendre à terre. Je n'ai droit qu'à quarante-huit heures et il faut déjà plus de trois heures pour rejoindre la côte alors j'espère que le passeur sera bien au rendez-vous, en espérant qu'il ait échappé à la vigilance des gardes et réussi à passer les multiples grilles barbelées et électrifiées. On doit se retrouver dans le quartier des prostituées. Ça n'éveillera pas les soupçons, beaucoup d'hommes qui débarquent s'y rendent et après trois semaines à bord, je me taperais bien une pute.

Mais je vais surtout apprécier de respirer l'air frais. Je sais pas comment font ces gens pour rester enfermés sur leurs maudits rafiots. Je suppose que quand on peut avoir tout ce qu'on veut, ça contre-balance les mauvais côtés. Je ne sais pas si notre vie est pire que la leur finalement.


Jour 2983

Ce matin quand on m'a amené dans le bureau de Charline, c'est le docteur qui était là. Je ne comprends pas. Il a dit que Charline ne viendrait plus et que c'est lui qui s'occuperait de moi. J'avais envie de pleurer. Pourquoi Charline est partie ? Et puis je n'aime pas le docteur. Il me met mal à l'aise. C'est peut-être pour ça que je ne suis pas resté longtemps. Il n'a pas arrêté de me poser des questions sur mes coupures à la main, si je savais ce que ça voulait dire. Mais je n'en sais rien, je ne me souviens même pas me les avoir faites. Pourtant elles continuent de me lancer, mais au moins je n'ai plus de bandages. Le docteur avait l'air très déçu et m'a laissé partir. J'aurais bien aimé en parler à Peter mais il m'a dit qu'il partait pour la journée. Quelle chance il a !



Première séance avec le sujet.

Informations obtenues : aucune

Le sujet devait être perturbé par ma présence et l'absence de sa psy habituelle. Aucune nouvelle information sur l'énigme qui me concerne. Il n'y a plus de doute depuis qu'il a ces entailles sur la main. Je vais pouvoir tester de nouvelles formules sans avoir besoin de passer par le protocole habituel. La prochaine est déjà en préparation.

Notes : 一ノロ (formes des entailles)


Jour 2985

Je n'aime pas les séances avec le Dr.Ishimura ! Il me pose des questions sans arrêts, il ne me laisse jamais tranquille ! Parfois je ne comprends pas ce qu'il dit. Il va trop vite, sa voix est loin. Je ne sais plus. J'ai l'impression d'être là sans être là. Pendant les séances je ne sens plus mon corps, je n'arrive pas à bouger. J'ai peur. J'ai chaud. Et froid. Je transpire beaucoup et des fois je vomis. Je n'en peux plus ! Je veux voir Charline ! Je veux voir Peter!Où est Peter ? Il devrait déjà être rentré...


Jour 2986

Putain j'ai enfin réussi à rentrer ! Je m'attendais pas à devoir repasser tous les contrôles que j'avais eu à l'aller ! Même quand on fait partie du personnel, ils revérifient tout à chaque entrée. Heureusement que j'avais bien planqué les sangsues. Le problème c'est que j'étais tellement nerveux qu'ils ont eu des suspicions. Résultats, ils m'ont gardé pour un interrogatoire prolongé et ça m'a pris deux jours de plus pour revenir ! Enfin le principal c'est que j'ai pu remonter à bord.

A peine arrivé dans ma cabine, le gamin s'est jeté dans mes bras. Il était brûlant et moite de sueur. Je sentais son cœur cogner dans sa poitrine. Je ne sais pas ce qui s'est passé durant mon absence mais il semble amaigri et au bord de l'épuisement. Son comportement aussi était étrange et il avait l'air ailleurs. Je me demande si on ne l'a pas drogué.


Jour 2988

Sixième séance avec le sujet.

Informations obtenues : aucune

Je n'avance pas du tout avec le sujet, je commence à perdre patience. J'ai essayé différents dosages, différentes plantes, mais rien à faire. Je me demande s'il ne bloque pas de lui-même les informations. La pression des supérieurs commence à se faire sentir, je dois absolument trouver un protocole efficace et obtenir de nouvelles informations sur cette énigme.

Notes : d'après les mémo laissés par Charline, l'absence de sollicitations extérieures favorise les hallucinations. Je crois avoir trouver « l'outil » idéal pour la suite.


Jour 2989

Je n'arrive plus à me lever, quand j'essaye tout bouge autour de moi et j'ai envie de vomir. Ce matin j'avais trois seringues sur mon plateau ! J'ai refusé de les prendre, alors le Dr.Ishimura est entré dans ma chambre et me les a injecté de force. Comme je me débattais, il m'a traîné sur le sol jusqu'à son bureau et il m'a enfermé dans une espèce de boîte en métal. Après ça, je ne me souviens plus trop de ce qui s'est passé mais je sais que c'était horrible.

J'avais l'impression d'être seul au monde. Je criais et mes cris revenaient aussitôt, je n'entendais rien d'autres, je ne voyais rien. Et puis j'ai cru que j'allais disparaître. Ou que j'avais disparu. Et plus rien. Je me suis retrouvé dans ma chambre, je tremblais, j'avais les doigts écorchés.

Je veux voir Peter. Mais je n'arrive plus à me lever.



Les sangsues c'est la plaie ! Elles sont trop fragiles. La première m'a pété entre les doigts, la deuxième s'est cassée quand j'ai voulu l'installer dans le réseau. J'ai réussi à en placer une mais ça n'a rien donné. Il m'en reste encore mais c'est compliqué de prendre le temps de les mettre en place. Je crois que la bibliothèque sera le meilleur point d'entrée mais je peux pas rester trop longtemps dans une pièce sans éveiller les soupçons.

Je m'inquiète pour le gamin. Ça fait plusieurs jours que je ne l'ai pas vu mais je l'ai entendu gémir et même crier plusieurs fois. Mais il est du côté barré par le garde. J'ai entendu deux personnes se disputer aussi. Rien ne va dans cet endroit. Vivement que je me barre.



Septième séance avec le sujet.

Informations obtenues : aucune

La séance dans le caisson de privation sensorielle n'a rien donné. Le sujet a fait une crise de panique aiguë. Lorsque je l'ai sorti, il m'a sauté dessus. Heureusement qu'il est affaibli par le traitement. La prochaine fois je le sanglerai pour plus de sûreté.

Notes : Charline a fait irruption en entendant les cris du sujet, j'espère que les supérieurs n'auront pas vent de cette expérience.


Jour 2990

Où est-ce que je suis ? Qui je suis déjà ? Pourquoi je suis là ? Pourquoi on me fait ça ? Je ne sais plus où je suis. Qui était là ? Je déteste cette personne. Il y a quelqu'un que je veux voir mais je ne sais plus qui c'est. Il me manque. Mais comment il s'appelle ? Je ne sais plus.

Pourquoi je suis là ? Ça n'a pas de sens. Tout bouge... et... cette pièce est immense ! Je suis au plafond et je me vois en bas sur mon lit. J'ai froid... j'ai trop froid... je ne peux plus bouger...


Jour 2991

J'ai enfin réussi à implanter une sangsue dans le réseau et après plusieurs essais j'ai finalement eu un retour ! L'arrivée des données est assez lente mais ça fonctionne ! Certaines parties sont cryptées mais je pense avoir enfin une idée de ce qui se passe ici. La clé c'est le gamin ! C'est lui qu'on cherche depuis le début !Ils se servent de lui ! Je ne sais pas comment, mais il arrive à leurs donner des informations sur nos actions !

D'après les bribes de rapports que j'ai lu, ils lui font subir des expériences, je ne comprends pas tout. C'est peut-être de l'hypnose ou quelque chose du genre. On dirait qu'il peut prévoir l'avenir. Ça paraît dingue mais c'est à cause de lui que rien ne change et qu'on galère autant. Qu'est-ce que je fais maintenant ?


Jour 2995

Treizième séance avec le sujet.

Informations obtenues : la « fin du monde » est corrélée avec les « trois pierres »

Le sujet est complètement amorphe et n'arrive plus à se tenir debout. Les séances se passent dans sa chambre dorénavant. Je le sangle à son lit et lui injecte la formule directement en intraveineuse. C'est plus efficace. Même s'il a tendance à convulser. Cette fois il bougeait tellement qu'il a bien failli s'ouvrir la tête contre le bord du lit. Mais je ne le laisserai pas y passer avant qu'il m'ait tout dit sur la fin du monde.

Ce n'est sûrement pas la fin au sens littéral mais quelque chose de radical va sans doute arriver et je commence à sentir l'urgence en moi. Je ne dors plus, je ne mange plus. Il va me rendre fou.

L'énigme des trois pierres, qui continue à revenir en boucle, doit y être liée, mais je n'ai pas trouvé les deux personnes qui correspondent aux deux autres pierres. Les manifestes n'ont rien donné. Pourtant, elles doivent être là, tout près, si la fin du monde est proche. Pourquoi ne me parles-tu pas, sale gosse ?

Notes : Les infirmières ne voulaient plus me laisser faire. Je les ai fait renvoyer à terre. Plus besoin de soins pour le sujet. Tant qu'il reste en vie.



Vous voulez que je tue le gamin ? Sérieusement ?! Il doit y avoir un autre moyen ! C'est une victime, comme nous tous ! Une victime de ce système pourri ! Je ne le laisserai pas crever sur ce bateau! Il est temps de passer à l'action.



Peter envoya son message au chef de troupe, sachant pertinemment qu'il ne le recevrait pas avant plusieurs heures et se leva, bien déterminer à faire quelque chose. Il récupéra l'arme de poing qu'il avait dissimuler dans l'aération, la planqua sous son tee-shirt et vérifia que son couteau de combat était toujours attaché à sa cheville.


Il sortit de sa chambre tranquillement, récupéra son chariot de nettoyage dans le placard et avança comme si de rien n'était. Avec un garde à chaque bout du couloir, il allait devoir être rapide. Il s'approcha du premier, faisant mine de rentrer dans une salle et, au dernier moment, il se jeta sur lui pour lui mettre un bon coup de poing dans l'estomac et au menton. Il entendit l'autre sortir son arme derrière lui et se baissa instinctivement pour esquiver une balle, avant de se retourner et de lui tirer dans la tête. Puis il revint sur le premier qui se relevait mais celui-ci donna un coup de pied dans son arme qui, atterrit à l'autre bout du couloir. Peter prit un coup dans l'épaule et se cogna contre le mur mais il esquiva le coup suivant, saisit son couteau et passa derrière le garde pour lui trancher la gorge.

Il resta immobile quelques secondes pour reprendre son souffle et épia les bruits alentours, mais personne ne semblait les avoir entendus. Ils avaient pourtant tiré. Où étaient-ils tous passés ?


Il récupéra son arme et se précipita dans la partie de la coursive où se trouvait la chambre du garçon. Il n'y avait que deux portes et d'après ce qu'il lui avait dit, ça ne pouvait être que celle qui avait une trappe en bas. Il s'agenouilla et la poussa pour regarder à l'intérieur. Il était allongé par terre. Il ne voyait que ses jambes mais il comprit qu'il était inerte comme il ne lui répondait pas.

Il se releva et tenta d'entrer dans la pièce en face mais elle était verrouillée également. Il essaya également le grand laboratoire qui lui était interdit d'accès mais curieusement, celui-ci n'était pas verrouillé.

Il fouilla partout sans savoir quoi chercher quand soudain il entendit comme un hoquet. Il avança dans la direction du bruit et en ouvrant un casier, il trouva deux femmes en blouses blanches, apeurées et en pleurs. Elles avaient dû entendre les coups de feu et se cacher là. Il les menaça de son arme pour les faire sortir et leur demanda comment ouvrir la porte de la chambre du garçon. L'une d'elle lui montra sa carte magnétique et il les fit sortir pour rejoindre la chambre et les faire déverrouiller la porte.

« Désolé », dit-il avant de leur mettre une balle dans la tête.


Il entra et trouva le garçon à moitié inconscient sur le sol. Il s'était ouvert les veines avec une vis du lit et une petite marre de sang commençait à se former au niveau de ses poignets. Il s'agenouilla auprès de lui, posa son arme à terre et tenta de lui faire reprendre ses esprits. Le garçon bâtit des paupières et leva les yeux,  une expression de terreur sur son visage.


Peter comprit trop tard et ressentit une douleur fulgurante à la tête, qui le fit basculer sur le côté. Sonné et aveuglé par le sang, Peter se retrouva sur le dos et vit au-dessus de lui le Dr.Ishimura, son couteau à la main. Quel con ! Il avait baisser sa garde. Il devait déjà être là, à l'attendre. Bien sûr qu'il avait entendu les coups de feu. Il essaya de récupérer son arme mais le docteur lui écrasa la main, un sourire mauvais sur le visage. Mais son sourire s'évanouit quand il vit le nom de Peter sur son badge d'employé. Il se jeta sur lui et l'empoigna par le col.

-Peter ?! Tu t'appelles Peter ?!


Peter ne comprenait plus rien. Il ne savait plus s'il devait s'inquiéter pour le garçon qui se vidait de son sang, ou pour lui-même. Le docteur avait une force terrible et il n'arrivait pas à se dégager, il l'étouffait. Il semblait complètement fou et soudain, il le releva, le plaqua contre le mur et le poignarda dans le ventre. Peter écarquilla les yeux de surprise et hoqueta alors que le docteur le poignardait une deuxième fois.


-TU !... T'APPELLES !... PETER !...TU !... T'APPELLES !... PETER !... criait-il en le poignardant simultanément avec ses cris.


Peter avait arrêté de se débattre et tomba au sol lorsque le docteur le relâcha. Il avait repris son calme. Puis, réalisant que son précieux sujet risquait de mourir d'une seconde à l'autre, il se précipita sur le lit, déchira les couvertures et lui banda les poignets.


-Alors c'était lui ?! cria-t-il en s'occupant des blessures. C'était lui la deuxième pierre ? Eh bien, il ne réalisera plus rien à présent ! Terminé la fin du monde ! Mais avant de mourir tu vas me dire qui est la troisième pierre !

Il approcha la perche à intraveineuse et piqua le bras du garçon, qui reprit partiellement conscience sous la douleur. Le docteur attendit que la formule fasse effet mais le garçon se mit subitement à convulser.

-Non ! Nooon !

Le docteur essaya de le stabiliser mais son cœur s'arrêta de battre.

-Pas maintenant ! Tu dois me dire ! hurla-t-il en secouant le garçon.

Il se mit au-dessus de lui et commença un massage cardiaque. Le temps lui parut long, mais il finit par sentir un frémissement dans le corps du garçon. Son pouls était revenu. Soudain, une détonation assourdissante lui vrilla les tympans et il s'effondra.

Au prix d'un terrible effort, Peter s'était traîné jusqu'à son arme pendant que le docteur était occupé et lui avait tiré dans la tête. Il la laissa tomber, continua à se traîner jusqu'au garçon et posa sa main sur son torse. Il sentit un battement sous ses doigts refroidis et esquissa un sourire. Le sang l'étouffait déjà et il s'effondra sur le sol, définitivement.





Lorsque le garçon repris connaissance, une alarme sonnait par intermittence dans un silence de mort. Il se redressa lentement et trouva à ses côtés deux corps, celui de l'homme qu'il détestait le plus et celui de l'homme qu'il aimait le plus. Mais il se sentait tellement vidé qu'il n'eut même pas la force de pleurer.

Il se releva et tituba jusqu'à la porte de sa chambre restée ouverte. Il marcha mécaniquement vers le bout de la coursive, sans prêter attention aux deux infirmières exécutées par Peter et aux deux corps des gardes qu'il enjamba pour atteindre la porte. Pour la première fois, il allait pouvoir la franchir. Plus d'obstacle, il lui suffisait juste de l'ouvrir.

Il eut l'impression de traverser un véritable labyrinthe de couloirs, d'escaliers, de portes, sans croiser personnes. Instinctivement, il essayait d'avancer vers le haut et il finit par déboucher à l'air libre. Le ciel, enfin ! Il prit une grande inspiration, appréciant l'air frais du dehors. Il faisait presque nuit et il pouvait déjà apercevoir quelques étoiles dans le ciel et, à perte de vue, la mer, et d'innombrables bateaux semblables à celui sur lequel il se trouvait.

Il n'avait toujours pas vu âme qui vive depuis qu'il avait quitté sa chambre. Mais il avait l'impression que quelque chose se passait. Comme une effervescence. Des bruits de moteurs au loin. Et soudain, des coups de feu. Et puis une explosion. Suivie d'une autre. Le ciel rougeoyait et le vent portait des tourbillons de fumées et des étincelles de feu.

Il regardait tout ça avec un regard extérieur, comme si cela ne le concernait pas. Il était enfin libre. Grâce à Peter. Il pouvait enfin respirer. Il bascula lentement la tête en arrière pour embrasser le ciel et, cette fois, les larmes coulèrent enfin.






Tandis que les combats faisaient rages contre les navigants, les supérieurs de Peter se rendirent sur le bateau d'où il avait envoyé son dernier message. Le bâtiment était vide, la plupart de la structure n'avait pas été exploitée. Les employés avaient dû s'enfuir bien avant qu'ils n'arrivent mais ils trouvèrent les quelques victimes laissées par Peter et son corps à lui, qu'ils récupèrent avec ses effets personnels. Ils emportèrent toutes les données disponibles, manuscrites ou virtuelles et placèrent des explosifs avant d'abandonner le navire.


Alors qu'ils s'en retournaient vers la terre ferme et qu'autour les villes-baquebots tombaient les unes après les autres,  le chef se prit à croire qu'une nouvelle ère allait peut-être pouvoir commencer et que les choses allaient changer. Il était déçu de ne pas avoir mis la main sur le garçon dont Peter leur avait parlé. Il aurait pu leur être utile. Mais sa disparition mettait fin à l'oppression des navigants, s'il en croyait les informations de Peter et les explosions qui se succédaient autour de lui.


Il sortit de sa veste un vieux carnet récupéré dans un des bureaux du laboratoire. Il n'avait lu que la première page, mais ce journal de bord allait sans doute lui en apprendre beaucoup.


« Jour 1

Nous avons terminé l'installation des équipements de recherche et la chambre automatisée est prête à l'emploi. Toute l'équipe a été briefée et l'enfant est arrivé il y a une heure dans son caisson léthargique. On a pas voulu m'en dire plus sur ses origines mais je crois qu'il est issu d'un ancien pays disparu d'Amérique et qu'il a été soumis dès son plus jeune âge à la réclusion, aux privations et à des rites ancestraux de divinations par l'utilisation de drogues naturelles.

Ce sont ces processus que nous voulons remettre en place pour pouvoir utiliser à notre avantage ce que cet enfant est capable de percevoir. Afin que nous soyons définitivement à l'abri et pour éviter de nouvelles pertes tragiques.

Son nom d'origine étant imprononçable, nous avons décidé en hommage à Saint-Pierre de le nommer Simon.


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