Sir William Bockett, prince populaire
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Ce visionnaire génial a apporté, à l'époque où seuls les nobles avaient des loisirs - et même que ça - un passe-temps bien énervant. Son amour de la France lui fit franchir les limites de l'Aquitaine que beaucoup d'Anglois occupent à nouveau. Anglais qui avaient amené avec eux le rugby, que nous aurions mérité d'inventer. Ou le foot ? Qu'il faudrait oublier, alors ...
Sa traversée des Cévennes vers la plaine languedocienne a vu son nom grandir. Ça nous ramène loin quand même. François Ier régnait chez nous, Henri VIII foutait le bordel en Ecosse. Mais la vie dans le sud était douce, et Bockett avait des rhumatismes, importés de sa terre natale. La pétanque régnait déjà en Languedoc depuis l'antiquité, et même avant, selon des vieux. Mais certaines régions de piémont étaient de fait exclues de cette pratique : il y avait rarement la place d'un jeu de boules dans les zones très pentues. Elles se consolaient dans la religion, mais là aussi, les papes avaient remis les choses rudement à plat, si l'on peut dire. Et les « boules carrées », en fait cubiques, avaient fait un flop.
Sir William Bockett, homme cultivé, voyageait, dit-on, avec un âne, et s'ennuyait fort au bivouac. Adroit de ses mains, il inventa le bilboquet. Grâce aux médias ou aux réseaux sociaux de l'époque, son invention se répandit comme une trainée de poudre. Les zones les plus abruptes des Cévennes parurent d'un coup plus avenantes, quand il ne fallut plus trois heures pour aller récupérer une boule quasi arrivée à Mèze, ou à Sète … La pétanque même, dit-on, en trembla sur ses bases. On se mit même à construire des usines pour les produire, aujourd'hui désaffectées. William Bockett était devenu célèbre ; il francisa son nom en François Boquet. Lauroux devint aussi la capitale mondiale du bilboquet et connut quelques siècles fastueux … Une colossale sculpture fut érigée à la gloire du grand homme, qui donna finalement son nom à ce sport, tout à fait malgré lui. De Bill Bockett à bilboquet. La pétanque l'a finalement emporté partout ailleurs, mais ici, les pentes ardues entre le Larzac et la vallée alluvionnaire ne permettent guère aux boules de s'arrêter. Pour cette raison, on voit encore souvent, en fin d'après-midi, les anciens y jouer assis sur les terrasses des cafés en sirotant un verre de boisson anisée. Les plus jeunes préfèrent une version qui se joue souvent plus en soirée, une variante en fait, dite bilboquet à moustache, dont je crains d'avoir oublié les règles exactes.