SNOW

Aurelie Blondel

Partie 8

Et je m'endormais, pleine de culpabilité, dans ses bras."

Le début de nuit fut agité. Je n'étais plus habituée à dormir avec un homme depuis longtemps.

Je le regardais dans son sommeil. Il n'était pas et ne m'inspirait jamais la neige.
Il paraissait serein. Il était vraiment beau. Et tellement gentil. 
Je m'en voulais encore plus dans ma façon de penser et d'agir. 
Je me demandais aussi ce qu'il pouvait bien me trouver. Je notais intérieurement que je lui poserai la question.
Je profitais de son profond sommeil pour lire mes textos et y répondre. Du moins ceux de Snow.

Il y avait toujours LA question que je n'avais jamais osé lui poser. Cela remontait à nos tout premiers échanges... "La belle et la bête... Dans la véritable histoire, ça se finit mal"
Je lui répondais malgré l'heure tardive et lui demandais quand il serait possible de se voir. 

A mon grand étonnement, j'eus une réponse quasi immédiate. 
-Maintenant...Si tu peux. Je ne dors pas, je suis dans ma voiture, garé sur le parking en face de chez toi.
J'hallucinais !! Il ne voulait pas non plus faire poser des caméras tant qu'il y était? Quel culot !
Mais puisqu'il était là, je m'extirpai de mon lit et à pas de loup, pris quelques vêtements à la hâte, les enfilai et sortis discrètement pour le rejoindre. J'allais affronter la bête !

Il ne me fallut pas plus de trois minutes pour me retrouver dans l'habitacle étroit de sa voiture, assise à côté de lui. Cette proximité me mettait mal à l'aise mais j'étais décidée à tirer les choses au clair. Je ne me dégonflerai pas. 
J'allumais avec une nonchalance et une confiance feinte une cigarette, sachant pertinemment qu'il détestait la fumée et l'odeur du tabac. 
Je lui demandais enfin, agressivement, combien de temps il comptait camper sous mes fenêtres. 
Il me confia en toute simplicité et sans s'offusquer de mon agacement qu'il était arrivé trop tard pour trouver un hôtel et n'avait pas le choix de dormir dans sa voiture.
Alors il n'était pas revenu... Soulagement... Tristesse...
Puis la colère de nouveau.

-"Tu pensais t'offrir une semaine de vacances comme la dernière fois, les frais d'hôtel en moins ? J'y crois pas !!"
Ma voix, d'ordinaire si grave, parvenait presque à atteindre les aiguës.
Je lâchais tout ce que j'avais sur le cœur, tout ce que j'avais contenu depuis tout ce temps, pour le ménager, parce que j'espérais je ne sais quoi. Il m'avait dit m'aimer, j'avais goûté sa douceur et obtenu sa tendresse furtivement. Je savais qu'il en avait au fond de lui. Je pensais à une carapace, un être écorché par la vie. Je m'étais plantée. Royalement!

J'étais avec lui dans cette foutue bagnole à trois heures du mat' à essayer de communiquer avec la personne la moins communicante que je connaisse alors qu'un homme qui m'aimait dormait dans mon lit. Mais il me fallait ses réponses. 
"Pourquoi la Bête ? C'est quoi la vraie fin?"
Il me regardait sans que je ne parvienne à déchiffrer la moindre émotion. Il ne semblait pas se souvenir de ça. 
"Dois-je te rafraîchir la mémoire?"

D'une voix cinglante, il siffla, mâchoires serrées :
-"T'as fini oui??? Je ne suis pas le mec le plus beau, le plus musclé, le plus intelligent mais je ne suis pas complètement con non plus! Et je ne suis pas non plus le salaud que tu aimes me penser être ! Tu fais les questions/réponses toute seule. Non pire encore, tu tires juste des conclusions sans rien savoir! Je ne suis pas venu ici pour m'offrir une escapade amoureuse..."
-"Normal, faut un cœur pour ça ... et communiquer aussi"
-"... Arrête de m'interrompre bordel! Je ne suis pas ici pour le sexe. Je suis venu justement pour te parler en face à face, tout t'expliquer"
-"T'es pas venu pour le sexe ?? Et ce que tu m'as fait en pleine rue tout à l'heure c'était quoi?"
"... Tu fais chier putain! Tu marques un point. Ok, je suis un con, j'ai agit comme un con, excuse moi. Je ne le sens pas ce type avec qui tu es. Il ne t'apportera rien de bon...
-"Ah c'est sur que t'es l'homme le mieux placé pour savoir qui est bien pour moi et ce qui est bon.." lui répondis-je d'un ton ironique "...Tu te mouches vraiment pas du coude."

-"Dans la véritable histoire, la bête reste condamné à être la bête et sa rose perd toutes ses pétales. Quand à la Belle, elle épouse Gaston. Gaston à la con!! Ça ne te donne pas un air de vécu actuel? 
Je suis la Bête. Je ne suis pas beau, je suis plutôt renfrogné, je me méfie des autres. Toi, tu es tout l'inverse de moi, tu rayonnes et magnétises. Et tu es si belle... Pourquoi ne le vois-tu pas?
Je t'ai dit que je t'aimais et c'est la vérité. Je t'aime à en crever. Je pensais qu'on souffrait du même amour... Je ne peux pas revenir. Ma famille a besoin de moi..."
-"Ta famille...?"
-"... Stop! Je te vois déjà te faire des films et m'imaginer avec femme et enfants. Je parle de mes parents. Ils ont besoin de moi. Je ne peux pas tout t'expliquer... Sois indulgente s'il te plaît. Je suis venu en espérant que peut-être... tu viendrais toi."

Je restais complètement stoïque. Incapable de penser ou savoir si je devais le croire ou non. 
Il me parlait réellement pour la première fois. Il n'avait jamais daigné m'expliquer quoique ce soit et là, il espérait que je puisse le suivre... On marchait sur la tête. 
Le suivre pour une histoire d'une semaine, à la sauvette et du virtuel. Non ! 
-"Moi aussi je t'aimais. J'ai attendu, tu m'as laissé moisir. J'ai tourné la page. Une petite page vu la durée de notre "relation"... Comment on peut aimer quelqu'un dont on a honte dis moi ?"
-"Honte de toi? Mais tu sors ça d'où? Jamais !! Oui j'aurai du tout t'expliquer avant, j'ai eu tort. Je te demande pardon ma belle..."

Il me demandait pardon. Il reconnaissait enfin le mal qu'il m'avait infligé. Ce que j'avais besoin d'entendre pour avancer. 
Mes nerfs se calmèrent progressivement et ma voix s'adoucit. 
Nous avions notre première vraie discussion, enfin. 

-"... Qu'est-ce qui a pu te faire penser avoir honte de toi?"
J'allais enfin pouvoir me libérer de ce poids:
-"Notre seule semaine passée ensemble avant de t'enfuir... du moins c'est à ça que ça ressemblait. Je me suis rendue compte que tu avais évité et éludé toutes mes propositions de sorties "en amoureux". Tu ne voulais me voir qu'à l'abri des regards dans ta chambre d'hôtel. Comme des amants."

Tout ce temps, j'étais restée focalisée sur cette unique semaine. Sans parvenir à tourner la page. Une semaine seulement. Je me sentais bien stupide d'un coup.

-"Je... Non! C'est pas ça du tout. Merde quel con! Je voulais juste profiter de chaque seconde avec toi, rien qu'à moi, sans personne autour. Merde! Je capte tout maintenant. Pourquoi t'as rien dit? Merde! Comment t'aurais pu me le dire... Ça n'aurait pas du être uniquement charnel, t'as raison."

Il était pétri de remords. Ça me faisait mal parce que je comprenais maintenant aussi les raisons de son départ précipité, son attitude. 
Aussi lui tendis-je la main.
-"On fait la paix ?"
Il me prit dans ses bras. Un câlin sans arrières-pensées. Il me souhaita d'être heureuse. 
Je déposais un baiser humide de larmes et empli de tendresse sur sa joue et sortis de sa voiture. 
Voilà, nous nous étions finalement tout dit, nous avions réussi. Et c'était bel et bien fini. J'avais mes réponses et lui les siennes. Je pouvais avancer et penser à lui comme à un ami. 
Il démarra sa voiture et ouvrit la fenêtre côté passager.
-"C'est pas de la jalousie. Méfie toi de Gaston s'il te plaît."

Je rentrais chez moi de la même façon dont j'en étais partie, sur la pointe des pieds. J'enlevais mes vêtements et me lovais toute gelée contre "Gaston". Je le scrutai à nouveau. Je me promis de le lire, ce véritable conte. En attendant, je ne voyais pas de Gaston dans mon lit et me mis à en rire. Ah sacré Snow...
Mon rire le réveilla. Même au réveil il était beau. Il pivota vers moi et me sourit : "Je ronflais c'est ça?"
Un mensonge de plus... 
-"Oui..." Je l'embrassai "...Rendors toi, la nuit n'est pas fini"
-"Non Madame !! J'ai une revanche à prendre" me dit-il avec un sourire coquin. Il me tourna sur le dos et vint se caler entre mes cuisses. 
Il me fit sentir sa virilité bien réveillée et je l'accueillis dur et brûlant en moi sans fermer les yeux, sans m'évader. 
-"Tu es glacée comme si t'avais passé la nuit dehors..." me chuchota-t-il à l'oreille. "...J'ai de quoi te réchauffer."

Et d'un coup de rein volontaire et puissant, il finit de s'introduire en moi, nos bouches collées et avides, mes gémissements de plaisir mêlés à ses soupirs. 


Aurélie.

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