Solstice d'été

alice-h

Eclairons nos nuits, volons le feu à ceux qui ont éteint notre flamme et fait de nous des suppliciés terrestres, devant remplir le tonneau percé de leurs tortionnaires. 

Au solstice d'été, quand nos nuits blanches seront enfin plus longues que nos jours sombres, nous deviendrons des Prométhée heureux. Condamnés à se faire dévorer leurs illusions par des vautours. Y croire, toujours et inlassablement, la foi se régénérant comme l'organe du même nom. 

Une fois la flamme capturée, nous la nourrirons d'alcool et de toutes nos embuches, pour qu'elles partent en fumée. 


Le diable dans la peau, les corps possédés, nous danserons.

Nos âmes jusqu'alors vacillantes de feux-follets exploseront de couleurs en un bouquet final.

Les bouches embrasées, nous flamboierons et crépiterons. 

Autour du feu, nous referons le monde avant qu'il ne nous défasse grâce à l'eau de nos larmes et à l'argile qui a façonné nos espoirs.


Les oreilles engourdies, et les corps épuisés, nous nous endormirons au milieu de confettis : cendres multicolores de nos peines consumées dans les feux de joie. 


Feux de joie de vivre. 


A l'aube, éveillés par nos rêves,nous ferons feux de tout bois pour qu'ils ne partent pas en fumée. 


Fatigués d'avoir tant vécu, avec cette étincelle qu'ont les enfants désabusés : pas  tout-à-fait brisés par les promesses qui mentent, nous repartirons. 


La gueule de bois et le coeur enflammé. 



"Pour moi, la fête est avant tout une ardente apothéose du présent, en face de l'inquiétude de l'avenir ; un calme écoulement de jours heureux ne suscite pas de fête : mais si, au sein du malheur, l'espoir renaît, si l'on retrouve une prise sur le monde et sur le temps, alors l'instant se met à flamber, on peut s'y enfermer et se consumer en lui : c'est une fête."

Simone de Beauvoir, La Force de l'âge


Photo : Pierre Beauregard https://www.from2point8.com/blog-2/page/12/



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