Sujet d'invention
aymkhaelo
« Quoi de pire qu'être confronté à la mort ? Ce destin irréfutable, funeste qui ne peut s'éviter tant pour le disparu que pour les gens qui l'aiment ? Alors voilà le jeu, voilà l'offense. Comment vous dire la peine que j'ai eu de me remettre de cet acte, si animal et vicieux soit-il ? C'est un jeu pour vous certes, c'est un malheur pour moi. Comme lui, je ne reconnais que le ventre que j'ai quitté, c'est le fruit de ma femme. C'est l'espérance de mes beaux jours. Tenter de le tuer ? Jouer avec la mort ? Mais vous êtes ignobles, monstrueux ! Vous n'êtes pas des Hommes. Vous n'êtes qu'un ramassis des restes de votre chère création et de votre cher Dieu. Regardez, j'ai des traces de coup de fouet à la place des tatouages. Comment donc faut-il faire pour que vous compreniez ? Mains, nez, bouche, yeux, jambes, cœur. Nous sommes de la même essence. Nous ne sommes pas le classement aussi futile qu'il soit d'un penseur arriéré et suprématiste. Comment vous dire, comment vous faire comprendre ?
L'Histoire me donnera probablement raison, et je le pense très sincèrement. Vous êtes voués à l'échec. Femmes, enfants. Plus rien ne vous arrête dans votre quête de sang. Je peux tout donner mais la lune reste accrochée au ciel. Dans ce monde où tout a un prix, la vie coûte cher, la mort est gratuite.
Des sauvages. Des sauvages, sommes-nous ainsi considérés ? Des sauvages car, pour vous nous ne sommes pas à l'image de votre Dieu ? Des sauvages car nous ne vivons pas dans le même environnement ? Dans la même société ? Ce n'est pas ce cadre qui nous unit, mais bien les valeurs humaines intrinsèques à tous les peuples. Autant de valeurs qui peuvent faire de nous des gens qui réfléchissent à plus grand. Mais encore faut-il apprendre à vivre avec son temps, évoluer au jour le jour, ne pas attendre le futur comme réponse, vivre pour soi tout en partageant ce qu'on a et ce que l'on a pu vivre. C'est un choix, ne pas s'attendre à ce que l'autre offre quoi que ce soit. Faire d'un désir un élan de joie de vivre et de générosité. Cette vision restreinte du monde ne vous mène à rien et nous entraîne tous dans un obscurantisme religieux fou. Je ne souhaite pas exister trop longtemps pour en devenir insupportable. Je ne veux pas devenir un poids qui dérangerait autant des personnes proches que la société dans laquelle je vivrai. Je voudrais vivre assez longtemps pour goûter aux cadeaux de la vie, à ses secrets et désirs et laisser ma place à un nouveau venu sur cette Terre pour qu'il puisse lui même pouvoir savourer les mystères de la Vie.
Je vous ai côtoyé, je vous ai observé, je vous ai compris. Difficilement, je trouve le sommeil mais mon menton est toujours pointé vers le soleil. Vous venez toujours en paix, armés jusqu'aux sourcils. Il n'y a d'égal à votre soif de domination que votre souci d'enrichissement. Car oui, disons le franchement. Vos intérêts personnels priment devant l'intérêt collectif. Mais cela est peine perdue. Mon peuple vit, ma famille vit. Vos oreilles sont fermées mais je laisserai ma trace. Nous avons tous cette destination. Vos ongles continuent à pousser, vous pourrez griffer votre cercueil. »