Sur les moments de répits

peterpanpan

Lorsque l'on souffre de dépression, on prend ce que l'on sait s'offrir comme moments de répits. Le calme et la tranquillité d'esprit, la douceur de vivre dans un instant qui sait se faire confortable et chaleureux. Avant d'arriver à ce moment de répit que je suis en train de vivre, j'ai essayé pendant une heure d'assortir des tenues faites avec des vestes achetées d'occasion et qui ne me vont pas parfaitement aux épaules. J'aime les tenues sobres et élégantes, le côté désuet ne me rebute pas, m'attire même, tant toute ma personne semble s'en couvrir avec naturel. La physionomie de mon visage est comme ces tenues, semblant à la fois passé et hors du temps. Je porte le costume parfois dans les moments les moins propices, me rendant compte du décalage qui s'opère à partir de moi jusqu'à la honte, ne comprenant pas exactement d'où me vient cet instinct de me démarquer, si cela tient simplement d'un goût particulier qui se serait nourri des extravagances d'un esprit en solitude, ou si cela tient du travestissement, de l'envie de paraître, en public, plus une figure qu'une personne. Quoi qu'il en soit, j'essayais donc mes tenues, pressentant juste avant la montée d'un de mes pics de stress quotidien, et j'étais soulagé un temps de ma tension qui s'épongeait au contact de la laine et du coton, des chemises et du mohair. Las de cet exercice, je décidais de descendre prendre un café, et c'est à cet instant  que j'ai senti non pas le répit venir mais qui s'était installé tranquillement sans faire de bruits. C'est à ce moment, alors que je dois rentrer dans le détail de ce qu'est à proprement parler un moment de répit que j'en perd doucement la substance. Cependant je puis dire ceci. Le corps n'émet plus de tensions. Le stress est dissout, l'angoisse inerte. Chaque geste domestique est réalisé avec un profond contentement, oserais-je dire avec bonheur. Le simple fait de se tenir dans sa cuisine, et de voir sa cuisine, donne la conviction sentimentale que tout est bien, que notre vie est bonne, que nous avons su nous diriger d'une manière cohérente dans la vie, faire face à nos états d'esprits avec efficacité. C'est le temps où nous sommes vainqueur. On a vaincu le café, on a vaincu son cerveau, on a vaincu son corps. Ce n'est cependant pas un sentiment de domination mais de contrôle qui nous dirige (!). C'est un état d'harmonie entre soi et son monde. Nous avons su épandre notre territoire au delà des limites de notre esprit pour y construire un logement à l'image de nos préoccupations, nous avons su trouver aux sensations abstraites de notre cerveau des occupations qui les investissent efficacement. 


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