Sur les planches

cecile-g

DO, je me concentre. RE, j’inspire jusqu’à saturation. MI, j’expire calmement et je prends conscience de tout mon corps. FA, familièrement mes doigts reprennent vie. Au SOL, on se réinvente. LA ou tout prend vie et SI ; et si tout foirait. Sur les planches, je suis frêle à l’instar d’une mélodie improvisée d’un piano douloureux. Vêtue légèrement, d’un jean troué et d’un marcel blanc en coton, mes avant-bras surchargés de bracelets gothiques noirs, je parais fanée, desséchée et poussiéreuse. Puis, je parviens à devenir ce jeune homme dragueur avec une justesse aberrante qui énerve la jeune femme timide et récalcitrante assise à côté de moi.

Propulser à la cime des arbres, mon âme légère se délecte de cette phase insensée. En apesanteur, l’apothéose révèle sa beauté électrique ; un mélange sublime d’une ivresse insouciante. Je perçois une folle pincée hallucinogène. Des pointilleux instants comme des brins d’une vie frôlent langoureusement la brise.

-          « Vous attendez quelqu’un charmante demoiselle ? ». J’entame la conversation tout en allumant une cigarette, assis les jambes écartées, la main droite sur mon genou, la main gauche tenant aux creux de mes doigts la clope.

-          « Oui, ma sœur ! ». Elle commence à rougir.

-          « Vous vous êtes donné rendez-vous dans un parc ? »

-          « Qu’est-ce que ça peut vous foutre ? »

-          « Rien ou presque », lui répondis-je, souriant.

Je décide de rester muet une minute environ, afin de lui laisser le temps de reprendre son calme. Je m’adosse au siège songeur. Son visage pâle se saupoudre de blush à chaque fois que nos regards se croisent. Je m’amuse de ces réactions.

-          « Sans vous offensez, puis-je vous demandez votre prénom ? », me redressant tranquillement pour lui montrer mon intérêt sans l’agacer.

-          « Si, je suis offensée ! Flora. »

-          « Très joli prénom. »

-          « Et le vôtre ? », me demanda t’elle m’ayant tourné le dos. J’étais surpris qu’elle me prête attention.

-          « Bastien. »

Elles se détérioreront sous l’influence néfaste d’un quotidien à l’odeur moribonde. Je m’intoxique dans l’œil du cyclone. Abattu par ce constat accablant, mon ardeur se calcine, se congestionne. Néanmoins, une nitescence se reflète sur cette agonie. Cette infime lueur survivra-t-elle à cet endoctrinement infectieux ?

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