“T’as pas ton Damart, tu rentres pas”

Le Bruit Et La Harpie

Si vous avez lu la presse du 20 mars, vous savez que cette date a commémoré l’arrivée du printemps. Sinon, je vous l’accorde, on a eu peu d’indices depuis une semaine. Qui dit printemps dit grand ménage. Et comme je ne suis pas spécialement une fan du récurage, je procrastine en faisant le tri dans ma garde-robe. Mon armoire déglutit des bouts de tissus quand je l’ouvre et j’en ai assez de piocher à l’aide d’une lampe frontale le matin.

En avant ! Il s’agit d’être rationnelle et de ne pas craquer. Un détachement total face aux bons souvenirs (“Oh celui-là, je le portais pour mon 3ème rendez-vous avec Jérémie en 3ème“).

La tâche est mince et fastidieuse : jeter ce qui est usé jusqu’à la corde (Fini les “Non, celui-là je peux pas, je l’aime trop“, je l’aime trop depuis 10 ans et ça se voit) ; donner ce qui est trop petit pour moi ; et vendre les vêtements de bonnes marques jamais portés ou quasi pas (oh ça va hein ! on a tous ou toutes “un ou deux” achats compulsifs regretté dès qu’on est rentrés chez nous!).

Tant qu’à faire, je vais essayer de récupérer des deniers en proposant mes vêtements dans un dépôt vente. Pas folle la guêpe. Je m’aventure dans l’un d’entre eux, avec un gros sac IKEA bleu rempli à ras bord. Je ne vous cache pas ma jubilation intérieure : je vais me faire un petit pactole avec son contenu.

Note pour plus tard : toujours mesurer son enthousiasme. Dès l’entrée dans la boutique, je comprends que ma mission ne sera pas aussi simple que prévue. Autour de moi, des vêtements fleuris d’avant-guerre, des pièces datant d’une époque que les moins de 60 ans ne peuvent pas connaitre. Du Damart en pagaille, du fleuri fané, du flashy éteint, du blanc cassé devenu marronnasse. Wow.

Je vous arrête une seconde, il ne s’agit pas du genre de caverne d’Ali Baba de fripes qui font des ravages ces derniers temps, mode vintage oblige. On serait plutôt dans le catalogue des Trois Suisses de 1962, avant l’influence de Salut les Copains. Du beige, du beige et encore du beige, tant de beige qu’il en devient presque invisible. J’ai la tête qui tourne.

Nouvelle note pour plus tard : vérifier mes infos sur Internet. Essentiel. Je ne vous parlerai pas de mon air bête, ce n’est pas le propos. Sans attendre, la vendeuse, bien tapie derrière un portant de beige, attaque :

“Ah non et non ! Il faut prendre rendez-vous pour les vêtements !”

Cette femme a du cœur, je sens qu’on pourrait être amies. Et, sans jeter un coup d’œil à mon sac :

“Je ne prends que de la marque !”

Cette précision était indispensable car seule, je pense que je n’aurais pas vraiment pu deviner. Je me trouvais dans le temple de Givenchy et on ne m’aurait rien dit!

“Vous appelez après l’Ascension, le rush sera passé et je pourrais peut-être prendre de nouveaux vêtements”.

J’aurais pu prendre le temps de lui demander ce qu’était le “rush de l’Ascension” mais, en toute honnêteté, les mots m’ont manqué.

Résultat : échec partiel de mon nettoyage de printemps et une superbe excuse pour garder mes fringues. Je retenterais peut-être le coup plus tard, mais d’ici là, ce sera surement le rush de la Pentecôte.

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