Temps mort

Christian Lemoine

A regarder les heures tomber, contemplatif de la sémantique d’un temps sans passé. La confusion de l’immobile sur des lacis d’ennui répété, avec au bout l’ombre sur les pierres d’un cimetière transi dans sa gangue de cyprès raides comme des doigts. Ça s’écroule comme un voleur en fuite. Et pourtant rien ne bouge. Si ce n’est l’engrenage fourbe des entrailles, les vices cachés des viscères qui se dérèglent. Le goutte à goutte pernicieux qui bat dans les alvéoles, quand chacune d’entre elles joue de sa toute-puissance pour menacer l’édifice. Il est une course, un débat des membres engourdis, au-dessus de la chair. L’affolement serein dans la boîte crânienne. Ici le temps se déchaîne, ce tyran usurpateur, gonflé d’orgueil à phagocyter les pensées. Elles filent, sans espoir de se figer, se propulsent vers le vide qui les noie l’une après l’autre. Le temps ricane. Toutes, il les digèrera, jusqu’à la moindre poussière.
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