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Sandra Laguilliez

-          J’avais dix sept ans quand il est mort.

-          Quoi donc ?

Mon passé. Il s'est fait explosé la cervelle sur une route qui mène Piccadilly circus. C'est arrivé brutalement alors que je disais que j'avais une putain de vie. Et la BOOOM. Tout c'est envolé, le monde a disparût quelques instants. Quand j'ai rouvert les yeux, je ne me souvenais plus de rien.

Je ne vous parle pas de ce que l'on appelle tirer un trait sur le passé. Non je vous parle d'autre chose, de cent fois plus tragique. Je vous parle d'un tireur kamikaze qu'a foutu ma vie en l'air pour une poignée de dollar US.

Ce qui est le plus drôle c'est qu'avant de perdre mon passé je pensais ne pas avoir de future... Hey No Futur comme on dit a Piccadilly et autre part en England.

Mais maintenant que je n'ai plus de passé pour me consoler de ce futur abject.

Même si c'est pour le détruire c'est super important d'en avoir un. Entre nous, je dirais que je suis prête à payer des milliers d'euros pour le foutre en l'air ce salaud.

Comment on peut perdre son passé. Y a rien de plus simple. Appuyez sur la détente et faites vous exploser le crâne. Non sérieux, enfaîte il faut qu'il se passe quelque chose qui va tant vous dégoûtez que jamais vous ne voudriez plus y repenser de votre vie. Et pas besoin d’un putain de Kamikaze, payé US.

Franchement ya pas meilleure façon de commencer une nouvelle vie que part un meurtre. Un peu sanglant mais la vie est tellement terrible qu'il lui faut du sang pour s'abreuver d'amour. Le sang c’est à la vie ce que les souvenirs sont au passé.

J'avais dix sept ans ce jour là. J'aimais ma vie tout en la détestant. Je n'attendais rien de la vie, rien de plus que ce que tout le monde souhaite :

Amour, gloire, bonheur, argent. Mais vouloir ce que tout le monde veut n'est pas vraiment vouloir c'est plutôt suivre la tendance.

J'avais donc cette tendance à être comme les autres, à vouloir ce qu'ils voulaient, à dire ce qu'ils disaient, à faire ce qu'ils faisaient.

Ce jour là il s'est passé l'impensable. Mon père est mort.

Où aurait-il mieux fallut qu'il le soit. La souffrance est une chose que je ne peux supporter. Je tue la souffrance qui est en moi en la faisant exploser. Et mon père m'a fait souffrir alors ce jour là je l'ai tué d'une façon atroce. J'ai dit qu'il était mort et j'ai fait comme s'il l'était pour de vrai, je l’ai explosé mentalement. Il n'y a rien de pire pour les gens que d'être mort, sans l’être.

Les gens ne comprennent pas, l’amour qu'on leur porte, lorsque l'on décide de leur faire ce si précieux cadeau ils décident toujours soit de ne pas en vouloir, soit de ne pas l’apprécier à sa juste valeur.

Il n'a pas compris qui j'étais et ce que j'étais en mesure de lui offrir : Une vie que peu de gens ne peuvent rêver, moi je lui aurais donné mais il a tout gâché. Je ne lui en veux pas, mais il est mort ce jour là.

J’avais dix sept ans des rêves pleins la tête mais de vrais rêves réalisables. Personne ne s'intéressait à ce que je ressentais, les gens pensaient que jamais je ne deviendrais quelqu'un. Ils m'ignoraient parce qu'ils n'aimaient pas mes rêves de grandeurs et de gloire. Jamais je n'aurais demandé avoir le plus bel homme de la terre, ni même devenir plus riche que Rotchild, ou plus célèbre que Britney. Bien sur je voulais être reconnue et aimée pour ce que je faisais, mais uniquement parce que ce que je faisais en valait la peine.

Alors j’ai tout fait explosé : Boom et aujourd’hui je suis ce que j’aime, sans passé ouais, mais pas sans avenir. Non, finalement c’est bien, je me sens bien. Un type m’a offert un super job. Je m’occupe de lui des livres à sa place, il est éditeur, du coup j’invente ma vie au jour le jour.

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