THE BOUNTY HUNTER

suemai

ÉPISODE 1 - TEXTE DÉPOSÉ

Vingt-six bougies, plutôt canon, je bosse en solo pour le FBI depuis six mois. Recrutée d'une prison de Dallas, à sécurité moyenne, pour divers délits, dont un meurtre par légitime défense, on me proposa le job. J'acceptai. Je m'nomme Yana... Yana Yanovish, chasseuse de primes.

On m'assigna un agent d'probation, un genre d'ange-gardien qui m'talonnait pratiquement nuit et jour. Andy Smiss. Une pourriture d'balèze sur deux pattes, tout juste bon à vous cirer les pompes; du genre le cerveau ramollo. J'me pliai à tous les stages : Maitrise des arts martiaux, cours de fin de bac, à faire chier une merde. Tire au pistolet. Maintien, maquillage et tous le fatras de la pouponnette. Je pris sur moi et j'encaissai toute leur bidoche sans rechigner. Puis, un jour, on me passa l'examen d'sortie. Il semblait que j'devenais recommandable. Par contre, me dit l'évaluateur :

— Il n'y a qu'un secteur qui te convienne : Le Bounty hunter, t'es partante, ma grande?

Le «ma grande» me donnait envie d'gerber, mais pas l'choix, j'devais jouer leur truc. Pas d'discussion, me dis-je.

— C'est ok M'sieur, Bounty hunter, ça m'va. J'devais assurer. C'est pour quand ?

—Tu démarres le vendredi qui vient. Smiss va te mettre au parfum.

De retour à ma cambuse, Smiss m'expliqua le boulot. Je travaillais en solo. On me donnait des missions non protégées et j'devais faire la besogne dans l'calme et l'anonymat.

— Ça donne quoi pour le port d'armes et l'reste, demandais-je ?

— Ton badge d'agente, pour un organisme indépendant, inconnu, permis de port d'armes, faux papiers et le tralala. Libre de circuler partout dans le pays. T'as un Smartphone, on te fournit les données de la nouvelle mission, c'est vu ?

— Ça m'va. Ça veut dire pas d'couverture ?

— T'as tout compris Yana. Tu bosses en solitaire. En cas de coup dur, on t'a jamais vu.

— Pas mal comme truc, moi qui comptait t'épouser Smiss…

Il en blêmissait l'mec. J'en rigolai un coup. Il me balança une gifle. Je pris sur moi.

— J'oubliais… tu nous fais la dure, on t'bute, compris ?!

— Ça va, ça va Smiss, t'énerves pas.

— D'accord la duchesse, tu vas te pointer chez l'vieux Bert pour ton artillerie. Ensuite les fringues et les p'tits joujoux à pompons et au final : C'est quoi la caisse que tu préfères, t'as l'choix ?

— Moto, possible ?

— Modèle ?

— Barigo, 500 Méga cross

— Mais c'est quoi c'délire

—Tiens v'la une adresse et un téléphone tu demandes Classy et j'lui écrivis sur bout d'papier. T'as qu'à dire que j'passerai.

— Ok, c'est bon... Alors tu te pointes chez le vieux Bert et tu rappliques.

Arrivée au stand du flingue, j'vis un homme, d'un âge, avancé, qui se déplaçait difficilement. Il m'rappelait en tous points mon grand-père, la seule personne qui m'fit comprendre, un jour, ce que signifiait le mot amour.

— Pardon, scusez-moi monsieur, dis-je pratiquement émue ?

— Oui, oui, je suis à vous dans une minute.

Une sonnerie d'micro-ondes s'fit entendre et il vint m'rejoindre, rapidement en boitillant.

— Non… non… monsieur, terminez vot'e repas, s'il vous plait, j'peux attendre, pas d'soucis.

— Vous êtes la nouvelle Bounty hunter, n'est-ce pas ?

— Oui, mais… comment connaissez-vous toutes ces choses ?

— J'ai appris à écouter, Mlle Yana, qu'écouter. Je vous ouvre la porte de coté.

J'contournai la pièce et j'y découvris une porte ouverte. J'entrai.

— Yana… vous connaissez mon prénom ?

— Oui et votre nom de famille, Yanovish.

— Mais… mais… comment s'fait-il, j'suis identifiée au nom de Yana Slatter.

— Par votre grand-père Yana, Soulchyn Yanovish, un homme bien et un grand ami, un peu sorcier sur les bords. Il m'a révélé qu'un jour, je vous rencontrerais. Il ne m'en a dit plus, puisqu'il est mort dans mes bras.

— Vous avez connu mon grand-père et comment vous m'avez r'connue ?

— Je ne sais pas Yana, au timbre de votre voix, à votre gentillesse, au parfum de lavande que vous dégagez.

Mon savon à la lavande, que j'pense aussitôt.

Il m'parla beaucoup d'mon grand-père que j'avais si peu connu. Il m'coula des larmes, moi la tueuse, l'exterminatrice, le sans-scrupule. J'ai aimé de suite cet homme. J'l'aidai à déballer cet infect repas congelé et j'l'assistai, voyant qu'il éprouvait des difficultés d'coordination. J'lui offris quelques chocolats volés à la cantine. Il les dévora, puis me r'mercia.

— Voici deux carabines Winchester d'un calibre 44/40, à canon tronqué, que j'ai remodifié et qui vous fourniront précision et puissance de tir. Je vous suggère de les porter sur chacune de vos cuisses à hauteur de main. J'ai une gaine pour chacune d'elle. Ce haut de corps et ce pantalon sont tissés dans un matériel particulier et à l'épreuve de projectiles. Ils ne vous offrent pas une couverture parfaite, mais atténueront les blessures potentielles Voilà, c'est ce que je peux vous offrir de mieux. Afin de bien camoufler vos armes, lorsqu'on vous présentera les vêtements, munissez-vous d'une longue veste de chez Calvin Klein. Vous me l'apporterez et je la trafiquerai. Elle vous laissera une grande liberté de mouvement, et puis-je ajouter qu'elle vous sierra à ravir, rigola-t-il. Maintenant, voici les armes habituelles que choisissent les agents. Avant votre départ, je vous remettrez tout ceci. Soyez prudente, le dernier Bounty hunter s'est fait tuer en moins de quelques heures. Maintenant voici votre artillerie normale et retournez auprès de ce taré de Smiss. N'oubliez pas de me rapporter la veste afin que je la modifie.

J'tins un bon moment cet homme dans mes bras. Puis, toujours sous le coup d'l'émotion, je me retirai.

— Excellent choix me retourna Smiss, apercevant mes armes. Les fringues maintenant.

J'me fis plaisir, un ensemble petite culotte soutien-gorge d'un rouge vif et un tas d'choses qui m'plaisaient. Lorsque la veste longue se présenta j'la demandai aussitôt.

***

J'roulais en direction de Los Angeles d'puis quelques heures et j'repensais à cet homme. Il avait adapté la veste, utilisant un velcro afin d'camoufler les armes. J'roulais toujours. Pour mes trois premières années, on m'payait 25 000$ par an, incluant un petit compte de dépenses et 50$ la tête. Puis, je grimpais à 35 000$ pour les trois années subséquentes, augmentation de 15% d'mes frais d'dépenses et 60$ par r'froidissements.

— Mais ils sont malades, c'est à chier leur truc. Risquer ma peau pour un salaire de crève faim…

J'pris la décision de m'emparer de tout ce qu'je pourrais trouver qu'y avait d'la valeur.

Après une bonne douche et étendue sur le lit du motel, j'consultais, sur écran, le dossier d'un certain Joe Palentino. Identifié comme trafiquant d'armes, de drogues, d'alcool et d'un tas d'autres trucs. Le type semblait pas faire dans la ouate. Au bas du rapport on indiquait : «Éliminer.» Hôtel la fleur de jasmin, centre ville, sur Beverley Hills boulevard. Je stoppai à hauteur de «Fred Astaire», enfin… son empreinte sur le trottoir et j'observai. À un certain moment, j'identifiai une ruelle à environ 150 mètres des lieux. Je m'y rendis et j'planquai la moto à l'ombre des r'gards. J'retirai mon casque et j'le scotchai à la moto. J'entrai dans c'fameux hôtel. Les cheveux dénoués et plutôt aguichantes, on m'reluquait. J'me dandinais un max. J'm'assieds au comptoir. J'retirai mes bottes et j'commandai une bière. D'jolis pieds aux ongles peints en rose, de quoi exciter ma tribune. J'buvais lentement, lorsqu'un type s'approcha.

— Tu t'cherches un copain ma jolie, m'dit-il ?

— Pas vraiment, du con, un certain palenbavo,

J'changeai l'nom volontairement. Aussitôt les louveteaux apparurent. Une bonne dizaine de mecs plutôt décatis.

— Tu connais l'mec que j'recherche, vieux déchet ?

Le type s'emballa et se jeta sur moi. J'le mis au sol en quelques secondes. Ils reculèrent tous. J'me retournai consommer ma bière. J'en sentis un s'approcher. Je l'étendis du pied et je me retournai, à nouveau. J'ouvris ma veste, laissant apparaitre mes carabines tronquées bien en vue. Ils reculèrent tous. J'répétai ma question. On m'indiqua une porte tout au fond. J'm'y rendis. Du pied, j'la défonçai et je fis une roulade de coté. Les chargeurs se vidèrent. C'est là que j'entrai. J'les tuais tous, un à un. Ne restait que Palantino. Il pissait d'trouille et cherchait son flingue les mains tremblantes. J'avançai sans broncher. Je l'étendis sur le bureau, j'le regardai un moment, puis, j'lui explosai la tête. J'me saisis d'un sac et j'y fourguais tout c'que je trouvais, drogue et argent. Soudain, j'entendis pleurer. Une fille sortit de derrière le bureau. Gloria qu'elle s'nommait. Elle crevait d'peur. Après quelques secondes, j'la rassurai.

— Ya d'autres trucs qui ont d'la valeur ici ?

Elle m'indiqua un coffre derrière moi, tout au fond d'la pièce. Il se camouflait derrière le poster d'une pute aux gros nichons. J'arrachai tout. En touchant la poignée, j'm'aperçus que l'coffre n'était pas bouclé. J'ouvris. Un joli pactole s'étalait d'vant moi. J'm'emparai de tout. Je pris Gloria par la main et nous sortîmes. Nous roulions d'puis un moment. Je m'arrêtai. Gloria n'en finassait plus d'me remercier. J'devais évacuer et rapide.

— À Santa-Monica, me dit Gloria, Palantino y a un jet privé et j'connais les codes d'accès. Le pilote est un ami.

Bert, pensais-je soudainement… J'trouverai bien l'moyen d'le récupérer plus tard.

Nous v'là à rouler à fond vers l'aéroport de Santa-Monica. Sur place, j'laissai la moto en plan et j'suivis Gloria, les épaules garnis d'sacs contenant billets, drogues, bijoux et autres peccadilles. Arrivées à hauteur du hangar, Gloria se r'tourna et me braqua, un flingue à la main. Je déposai les armes. Un hélico atterrit aussitôt. Smiss débarqua et je me r'trouvai, de nouveau, confinée dans ma cellule de Dallas. 

***

Deux années s'écoulèrent et un aprèm, on me demanda à la salle des visites. J'pensai aussitôt à Burt et je m'y précipitai, accompagnée de cinq agents de sécurité. Il s'agissait d'Smiss.

— Alors ma jolie, prête à reprendre du service ?

J'répondis rien. On r'vint au quartier central du FBI. Smiss m'expliqua que tous les bons agents débutaient et reproduisaient l'même pattern, tel que je l'avais fait. Après quelques années d'une nouvelle incarcération, j'compris que nous dev'nions des pions manipulables à volonté. Encore une fois j'me tue. J'me ré-entrainai. Je refis tous les programmes. Un matin, je fus prête pour une nouvelle mission. Smiss m'accompagna à l'arsenal. Tout en nous y rendant il m'dit :

— Yana Yanovish, nous y sommes presque. Quel joli nom de famille. J'aime bien, il te va à ravir.

Devant l'armurerie, j'aperçus l'soi-disant Bert, dansant pratiquement l'tango à me voir m'approcher.

— Alors Mlle Yanovish, vous avez fait une jolie promenade, me dit-on, Vous avez apprécié mes tronqués …?

J'le r'gardais l'air de pas comprendre et totalement abasourdie. Une grose partie d'moi s'effondra alors. Mes émotions m'quittèrent à vie. Je r'devenais ce que je suis : L'exterminatrice, la sans-scrupule, l'unique… Bounty Hunter.

— Hey Smiss…! Pourquoi tout'la mascarade et surtout pour le Bert ?

— Pour trois raisons Yana : Créer un lien de confiance avec la maison, assurer ta sécurité, pas question de te perdre après tout cet investissement et, au final, pour te voir évoluer sur le terrain.

— J'imagine que Gloria assurait une partie d'ma protection ?

— Tu vois juste.

— Et pour mon identité, mon grand-père, ma vie, mes souvenirs ?

— Nous connaissons tout sur toi, agente Yanovish, t'oublies que nous sommes le FBI.

***

Trente-six bougies. Assez canon.  Je bosse en solo pour le FBI depuis bientôt dix ans. Je m'en porte bien. J'adore mon job.  Je me nomme Yana… Yana Yanovish. Chasseuse de primes

À suivre


TEXTE DÉPOSÉ

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