TIC, TAC, TOC… BOOM !

Flic, Flac Floc fait la pluie en tombant sur l'ardoise. Tac à Tac Toc ont fait mes doigts sur le tam-tam, le jour de mes 6 ans. Toc-Toc a fait ma mère sur la porte de la classe de CP.

« - Je ne sais plus quoi faire avec lui. Votre fils, c'est un cas ! Il ne sait même pas écrire son prénom. Il ne connaît pas l'alphabet. ». Et de renchérir sur la mauvaise volonté que je mettais à écrire, à découper et à colorier. Ma mère est sortie de ce rendez-vous anéantie. Elle m'a rassuré, en me disant qu'il me faudrait un peu plus de temps et qu'à force de travail, mes difficultés se dissiperaient.

A la fin de cette année chaotique et traumatisante, je dus me soumettre à plusieurs bilans. Les bilans, je connaissais bien. Dès la dernière année de maternelle, devant mon refus systématique d'entreprendre toute activité manuelle, l'institutrice avait conseillé à mes parents d'aller voir une pyscho-motricienne. Mes parents ouvrirent des yeux plus ronds que des billes à l'écoute du verdict : j'étais gaucher contrarié et depuis que je savais tenir un crayon, j'écrivais de la main droite ! Il y avait urgence à me re-latéraliser ! Tic Tac Toc faisait la pendule en égrenant les longues minutes des séances en tout genre dont je fus affublé dès mon entrée au CE1. Ergothérapie, Orthophonie, psychothérapie alternaient en un ballet interminable.

A la fin de cette première année de CE1, une nouvelle annonce qui permit de mettre un mot sur mes maux, soulagea presque mes parents, qui depuis plus de deux ans écumaient les spécialistes, impuissants et épuisés. J'étais dyspraxique. Je rejoignais ainsi la grande famille des DYS. Je souffrais de troubles de l'apprentissage et de TDAH (Trouble du Déficit Attentionnel avec Hyperactivité). La petite éclaircie dans mon quotidien bien sombre fut de courte durée. Je doublais le CE1. Selon le corps enseignant, cela me ferait gagner en maturité. Et puis, j'étais de fin d'année. Tac à Tac, tac à tac, tac à tac...Boom. Ce fut un déchirement pour ma mère qui luttait patiemment à mes côtés depuis trois ans pour m'épargner les moqueries, les petites phrases innocentes lancées au détour d'un couloir. La spontanéité à cet âge là…

Les années suivantes, mes parents menèrent un autre combat, afin de faire reconnaître mon handicap. Je fus équipé d'un ordinateur portable pour éviter le travail de copie. Je dus apprendre à vivre à travers le regard des autres. Regard qui exprimait tantôt la pitié, tantôt l'envie. Ces années furent difficiles car j'étais un enfant différent. L'amour et le soutien constant de mes parents ont transformé le petit être vulnérable et introverti en jeune garçon bien dans ses baskets, à l'aise socialement,et tourné vers les autres. Aujourd'hui, je prends plaisir à faire rire. Je détends l'atmosphère à la maison. Ma force c'est l'humour et c'est grâce à lui que j'ai résisté. Comme le dit ma mère, c'est grâce à mon sens de la dérision et du partage que je suis devenu quelqu'un de bien. Chut ! il ne faut pas trop me le répéter, je vais finir par le croire !

Le tam-tam a laissé place à la batterie, une sacrée revanche pour un DYS !

Clap clap clap, vive les applaudissements !

Pour demain, j'ai des rêves plein la tête, et toc !