Toi, l'assassin qui m'a délivré...

watounet

Hommage au juge final d'une existence désespérée. 

A toi mon obligé,
Par qui je rend la vie,
Par qui je donne mon sang,
Oui à toi qui me prend
Le souffle, l'âme et l'esprit,
Toi qui vient de me tuer...

Tu m'as libéré de ma prison charnelle,
Cette cage de chair si cruelle
Ou mon imagination fut coupée de ses ailes
Par un geôlier brut et intemporel...

Toi qui m'a terminé
Assassin bienfaiteur
Toi seul n'a pas été avare.
Dans ce monde barbare,
Ou règne la douce réalité
D'une vie de malheur.
 
Tu m'as libéré de mes souffrances,
Abrogé mon éternelle enfance
Empêché toute engeance
Et laissé gîr dans mon jus rance.

Je traîne là dans un coin,
Allongé par terre,
Reposant l'air sain
Et errant dans l'éther.

Le regard vide,
Le flan humide.
Le ventre troué,
Les tripes éparpillées.

Mon sang nappe les pavés
D'un manteau uni et immaculé,
Dans ce rouge rubis sombre,
Se reflète à peine, mon ombre.

Elle sort de moi, fuie mon corps,
Et sur le trottoir se pleure...
Sans la retenir,
Je la regarde partir.

Éventré par un glorieux truand,
A qui j'ai salit les gants,
Pour une poignée de rien,
Il m'a tué comme un chien.

Sans le vouloir il a accomplit mes prières;
Et enfin mit un terme à ma vie de misère,
M’ôtant l’existence

Comme un élu de la providence,
Courageux impromptu

Qui fit que je fus.

Le voilà, ce meurtrier délivrant,
Eternel voleur de mon âme;
Mais non point de blâme

Pour ce ère délinquant...

Car c'est par lui que je devins défunt,
Et non plus victime,
Par lui que je ne connais plus la faim
Ni la déprime.

Ce misérable bienfaiteur de la mort,
Dont l'ouvrage injuste ne fauche pas les plus perdus,
Mais prend ceux que l'on aime encore,
Plutôt que ceux dont la peine remplace le vécu.

Merci à toi ô mon sauveur meurtrier
Toi qui sans égards ni scrupules
M'a donné au lieu de me voler,
Toi l'héroïque crapule,
Qui pensait sans tact
Bénéficier de ton acte,

C'est à moi que tu fis don
De cette paix que tu recherches;
Moi qui n'avait même pas un rond
Et qui ne fus même pas revêche.

Moi qui était juste emplit de tourments,
Rien tu n'emporteras dans mon firmament.

C'est avec une dernière bise
Que je te vois t'éloigner au loin,
Toi l'assassin sans chagrin
A qui ma vie fut soumise,

Ton geste ultime
a accomplit mon destin...
Dans une fin peu sublime,
voilà mon âme qui s'éteint.

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