Toi mon arbre
aile68
Toi mon arbre géant, ma montagne, mon équilibre, tu fends la bise comme une machine infernale, baobab étrange, imperceptible et surprenant, tes paroles m'invitent chez toi, m'enveloppent tel un parfum de jouvence, je rajeunis à tes côtés, je redeviens une jeune fille, insaisissable, imprévisible, étonnante comme toi si fort, si imposant. C'est une chanson d'amour dédiée aux hommes qu'on aime, j'ai aimé mais c'est fini, ne restent plus que des paroles enveloppées dans du papier doré, ciselées tel un bijou qui n'existe que dans une sorte de nébuleuse étrange, bleue comme une orange dirait Eluard.
Toi la terre que j'ai quittée, tu étais plus qu'une patrie, un havre de paix où je me trouvais si bien, mon "Heimat" tu vibres encore en moi telle une forêt qui frémit, tes parfums de fraîcheur et d'humus si puissants au petit matin, tes trésors, tes présents, petits ou plus imposants me rappellent comme tu étais, généreux et mystérieux. Ivre tel le bateau Rimbaud, comment s'écrivait ton nom, j'aimais comme tu l'épelais de tes lèvres retroussées, une vraie frimousse d'enfant parfois, quand tu cherchais tes mots, réfléchissais à ce que tu allais me dire pour ne pas me froisser, l'amour c'est quelque chose de tordu des fois aussi, ce n'est pas lisse comme tu le prétends.
Toi ma montagne mon balancier, mon équilibre, tu cherchais l'harmonie, le bon Dieu quelque part dans ta vie, les bras de ta mère affectueux, accueillants, elle te portera à bout de bras jusqu'au bout, jusqu'à la fin. Et tu pleureras sa disparition tel un phoque sur la banquise qui a perdu sa mère, sa génitrice. Mais les mères toujours reviennent en pensées et avec les souvenirs, elles ne sont jamais vraiment parties, je te ferai lire ce passage-ci toi que j'ai longtemps adoré... Je n'aime plus ces mots, cette idée, tout ce qui compte pour à présent c'est l'amour des miens, tu n'en fais plus partie, tu es sorti de la case famille, amis, amour. Quand ma tête s'engourdisse, avant que mes yeux ne se ferment j'irai courir par les bois où tu avais ta maison, j'irai faire un dernier tour en pensée, par mes souvenirs ou en vrai. Du côté de chez toi, il faisait si bon vivre, ton dernier présent telle une madeleine de Proust me ramène à ce que tu aimais tant, la nature et les fleurs perdues en chemin comme des graines que l'on sème derrière soi et meurent pour germer à la belle saison, "Si le grain ne meure", c'est Gide qui avait écrit cela, n'est-ce pas? Moi j'ai écrit pour la journée peut-être, une journée calme et paisible, je l'espère.