Toit émoi
Sophie Marchand
Lui :
Les hirondelles sont parties. La grisaille a envahi le ciel, la rouille tache les arbres.
Je l'observe en face de moi, c'est ma nouvelle stagiaire, une petite ronde blondinette qui n'a pas fini encore de grandir : ses grands yeux bleus sont rivés sur le toit d'en face, elle a l'air de rêvasser.
Elle :
En face, sur le toit rouge hérissé de cheminées et d'antennes, deux « funambules » se sont hissés par le soupirail, ils installent une gouttière en bordure du toit.
Le vertige s'installe entre mes cuisses. Pourquoi ne s'attachent-ils pas ?
L'un deux m'aperçoit et me fait un petit signe. Je vois ses lèvres remuer, puis il met ses mains en porte voix. Je le regarde un peu ahurie, on dirait qu'il me parle.
J'ouvre la fenêtre et l'entends qui me dit : « Au lieu de nous observer venez nous rejoindre! »
Alors je sors du bureau, dévale les escaliers, traverse la rue. J'entre dans le café déserté.
Je me précipite dans un escalier qui j'espère va me conduire jusqu'au toit.
Au dernier étage, une échelle permet d'accéder au soupirail
J'aperçois une tête souriante : « C'est bien de venir nous visiter »
Je suis assise au bord du toit, les pieds dans le vide, la taille arrimée à la cheminée par une corde.
Ils continuent tranquillement leur travail sans trop se préoccuper de moi.
La ville s'étend sous mes yeux, la vue splendide m'a permis d'apprivoiser mon vertige.
A midi, ils décident de déjeuner sur le toit et partagent avec moi qui suis toujours attachée à la cheminée.
Un chat gris est apparu et vient mendier de la nourriture.
Soudain mon attention est attirée par une silhouette grimaçante à la fenêtre ouverte de mon bureau.
Ciel, c'est mon responsable que j'avais complètement oublié !
Alors sans réfléchir, je saute, la corde se déploie et j'atterris de l'autre côté de la rue dans le bureau à côté de lui effrayé et estomaqué.
Lui :
« C'est pas bientôt fini de regarder par la fenêtre, 5 minutes que je t'observe statufiée et moi qui attends mon rapport pour l'envoyer ».
Elle :
« Excusez moi, je m'étais laissée distraire, ils me font peur à déambuler comme ça sur le toit ».
La pluie s'est mise à tomber, les couvreurs ont déserté le toit, j'ai repris mon labeur.
bien joué la fin !
· Il y a presque 10 ans ·Christophe Paris
merci !
· Il y a presque 10 ans ·Sophie Marchand