Ton choix dans ta gueule
pianitza
Ils nous parlent comme des gosses attardés parce que nous ne voulons pas de leur système. Ils sont si dynamiques, si éveillés, apparemment ils nous font de l'ombre... À nous, qui sommes mous. Ils se logent sous les marques, consomment, répondent aux ordres d'un patron, louent des appartements, gesticulent dans le placo, construisent une famille qu'ils ne voient qu'à temps partiel et, donc, nous font de l'ombre. Ils ont toujours des bons conseils à donner mais jamais à en recevoir... Surtout quand ça vient d'un mec qui vit chez ses parents à 28 ans (moi), bah ça s'accorde pas avec leurs guitares, d'entrée les gammes dissonent... C'est pas écoutable. De base, là, le décor est planté, y'a rien à entendre. Voir ses parents vieillir, c'est pas agréable, c'est pas cool, ça tend vers l'envie de suicide. Fuir dans le consumérisme, c'est la possibilité, enfin, de s'exprimer comme on l'entend, ça te dégage de ce rôle de Tanguy qui flippe du système. Ça te sort de la lâcheté. Le grand combat ! Vivre encore chez ses parents, c'est un peu comme ne pas avoir le permis, c'est juste ne pas être dans le combat. C'est aussi simple qu'ça, voilà. Plus tôt on décolle du nid, plus tôt on devient quelqu'un. Logique inhérente. La force de l'indépendance te tombe dessus d'un coup, par succession de papiers signés, tu verras... Un bout de signature ça te plastronne déjà en haut des remparts, poto... Voilà, le tampon indépendance éclaté sur les fronts, qu'est-ce qu'ils ont à dire les Loosers, hein ? Keskyzon lé morpions ki campen dan l'ombr ? Là, c'est bon, nous v'là tout à fait encadrés dans l'administration Française, on pavoise sous les lunettes. R'gardez nos grands sourires, on en devient presque envahissants hein ? Cette indépendance qui brille sur L'Email...
Ptin, j'les envie. Ptin... Ils ont pliés le dos sous les craies, de la primaire jusqu'à leur dernière année de fac. Zen ont chiés sur les consonnes répétitives, les braves automates... Zont absorbés les onomatopées de la bénite conseillère d'orientation, avec courage : "Arf, bah, non, c'pas un vrai métier. Pas l'choix. Arf, *burk*, faut aller dans la vente... *burk* ... C'comme ça, hein" et le v'là enfin le résultat de leur dur labeur... La prestance banquière leur appartient. La chance. C'est vrai que le choix se modèle tout simplement par la façon avec laquelle on use de notre argent, dès le départ, et que notre véritable destinée se trace sur le temps qu'on offre à sa propre réflexion, et que ce temps il se consomme pas aussi vite qu'un carambar... c'est vrai, ouais ! Mais bon, eux, ils ont été brassés les uns contre les autres sur les bancs, leurs tympans ont flambé d'autant de "Tu d'vrais faire ça...", alors ça se jette rapidos et vaillamment dans la vie, ça traîne pas, c'est balèze quand même... Ça m'impressionne ! Voilà, ils "devaient faire ça"... Ils savaient que c'était possible, alors ils l'ont fait... L'haletante aventure ! Ils en ont même oublié leur personnalité, les vaillants soldats... Les canards se sentent comme bardés par l'honneur et la fierté dans leur course vers le chiffre... "COUIN COUIN"... Et moi, j'suis où ? Bah j'suis Lâche ! Faut faire des gosses très tôt, plaire à papa-maman et pourquoi pas louer un appartement ? La réussite tombe en guirlande au bout de nos doigts, alors ? Nos patrons titillent le sapin de Noël ?
"Demain, 8 heure tapante derrière votre machine". Hein ?
Voilà. Bon, vous êtes plutôt populaire dans votre boîte et c'est bien l'plus important !
Et puis tiens, de nouveau une ribambelle de ribauds qui m'infantilisent dans un coin en me disant quoi faire. Merde. J'l'ai mérité que'que part. Car j'ai choisi l'indépendance artistique, une vie dissidente excessivement ridicule... Faut bien m'bastonner un coup, pour compenser. Merde, Maïtena Biraben s'imprime sur les visages avec ses airs de mère inquiète... Les puputes font monter la force matriarcale jusqu'à la trogne... Eux, ils ont l'odeur de la Fnac, de la Mie câline, ils suintent la société... Ils sont marketingemment plus matures et plus propre que moi. Intérieurement, moi et ma sale schizophrénie, on les écoute alors sans les écouter... Schémas normatifs... On a déjà cinq répliques d'avance à leur caler sous les gencives, clairement on les réduit à l'état de cendre tellement on supplante ces minables à coup de lyrismes... C'est maladif, j'te jure... Tellement qu'les coups vont parler, après, parce qu'ils ont plus qu'ça à infliger quand on brise leur façade. Alors on veut, mais on ne le fait pas, on leur laisse le temps de réflexion pour plus tard. Puis bon, étaler son intelligence, en ces temps... Hein. Voilà. Au fond, rien ne vaut un bon silence... et l'attente. L'attente du jour où ils se rappelleront sur leur lit de mort des onomatopées de la bénite conseillère d'orientation, après vingt années passées dans un boulot qu'ils aimaient pas : "Aghwww, bah, non, c'pas un vrai métier. pas l'choix *buuuurk*" ... Infirmière, un massage cardiaque, vite !!
Et puis ça s'voit, actuellement, qu'ils sont épanouis, élastiques, élancés dans leurs sacerdoces ! Une personne épanouie a toujours plein de conseils à donner, surtout si elle flotte sur son parfum Chanel, c'est bien connu... Plus encore si le costard colle à ravir ! Non mais regardez ce magnifique épiderme, aussi lisse qu'un carton Apple ! Là faut tomber à genoux dans l'ombre. Faut combler les névroses insatisfaites, croquer la nouveauté, et puis emporter les autres dans le tourbillon. Manège Disney ! Mes oreilles sont toutes ouvertes, j't'en prie, parle !
" Ne sois pas gros, sois mince, tend vers l'effort, c'est la pub, j'te dis. Tu devrais te soustraire à notre compagnie, tu d'vrais y aller ! Pourquoi résister ? Reste coool, c'est ça la vie mon gars ! Avant de me laisser aller aux confidences, quand j'te connaîtrais mieux, beau garçon... J'aimerais te voir détendu... ! Tu devrais y aller, là-dedans. Et quel honneur ce serait pour toi ! Faudrait quand même que t'ailles en chier un peu avec tes potes dans l'Arc-en-ciel, quoi ! Ta liberté de disposer sur notre bûcher, que tu sois partisan toi aussi de nos frustrations... Que diable ! Sors de ta dépression et viens te faire remonter le moral dans l'encadrure ! "
Fils de riche, que j'suis, j'ai eu le choix, et eux non... Ça c'est évident... ! Car être "fils de", cela détermine ta vie, d'entrée. Ton choix dans ta gueule, dès le départ, imprimé dans la rétine de tous. Quelque part, l'exercice de méditation, la philosophie, la réflexion, le temps, tout ça, ça marche plus à un moment. Ça appartient à la médecine, c'est des médicaments comme les autres... Faut mettre la main dans le cambouis et glisser, cool, dans les corolles Marketing. On part pas tous avec les mêmes avantages du coup faut savoir être compatissant. Dans le communautarisme inconscient... Bête... Non, adulte, tes attitudes et ta façon de vivre ne font plus la différence... Bête limpide... Cela, c'est de l'écrit, de la fiction, de la réflexion... Du cinéma Limpide ! Et merde, v'là que j'me mets à écrire aussi mal que ce fils de pute de Beigbeder.
Alors j'les écoute de nouveau, dans le silence :
" Nope, moi, fils de pauvre, moi, apprends... J'suis obligé de m'laisser emporter par mes névroses de réussite, de famille, de location et d'essence. Car c'est comme ça. Avec un peu de bêtise ce soir, dans ma lucarne, s'te plaît, Hanouna... Ce sera comme ça ! J'peux pas vivre avec 450 euros par mois chez mes parents, frère... Comment tu fais ? Et m'construire MON futur, quel futur ? Nope ! J'ai besoin d'1K5, min. Frère... L'impérialisme Américain plane au-dessus d'nos caboches, gros, r'garde, mes potes, ysont avachis comme de la friture morte sous l'écran, mâchoires tendues vers les marques, en espérant que nos millionnaires préférés vont l'emporter pour nous... Moi aussi j'l'espère, frère ! Ouais, j'l'espère ! Allez les bleus ! Et puis, aussi, tout ça, c'est notre détente de fin d'journée ! Ça c'est un truc qu'tu peux pas comprendre que'que part " il dit, devant ses potes, avant de grommeler de nouveau derrière sa journée de boulot harassante... " Fils de riche, tu peux pas comprendre ! Bah oui, ils ont pas le choix tandis que lui, ce fils de riche, il l'a... Non mais, pour qui il se prend ? Pour meilleur que les autres ? "... Puis : " Une autre " il dit, en posant 0.3% de son salaire sur le comptoir...
Je suis mon propre chemin tandis qu'ils ne font qu'emprunter les chemins qu'on leur propose... C'est tout ce qui fait la différence entre un patron et un salarié. Être patron de sa vie ou salarié de sa vie, choisis... Plus tard, quand mon empire sera construit, ils demanderont qu'j'les engage. Et comme j'suis une bonne âme j'laisserai écrit sur le bas de leur contrat, en tout petit : "De défaite en défaite jusqu'à la victoire finale". En espérant qu'ils comprennent que les somnolences cervicales, ça se combat sans médicament.