Tranquille Mimile...
Jean Claude Blanc
Tranquille Mimile
Se fait pas de bile, tranquille Mimile
En sa poubelle d'automobile
Son coffre plein de tas d'ustensiles
Pour la plupart inutiles
Sale comme un peigne, à suer de l'huile
Joue sur les mots, d'humour facile
Malheureusement pas très subtil
Dans sa caboche y'a un défaut
Ramasse tout, avide fourmi
Congénitale cette manie
Collectionner des vieux journaux
Morceaux de bois en son grenier
Pourraient servir, sait-on jamais
Pour allumer la cheminée
Passe son temps à entasser
Fagots de branches, de genêts
Y'a pas de petites économies
De ses bricoles, vaste fourbi
Pas besoin d'éboueur, garde tout pour lui
Propose même à ses amis
Leur aider s'en débarrasser
De leurs immondices, d'office saisis
Ayant leur place en son musée
Pas une baraque, un chantier
Qu'une truie trouverait pas ses petits
Son voisinage guère enchanté
Voir ses déchets sous leur nez
Téléphone à la gendarmerie
Autre chose à faire ces poulets
Daignent même pas se déplacer
Coolos Emile en sa ruelle
Qui l'encombre de ses bouts de ficelle
Un véritable pêle-mêle
Lui s'y retrouve dans ce fatras
Perte et profit, ne calcule pas
Adore se mettre dans l'embarras
Sur le pas de sa porte, quel bordel…
La soixantaine, célibataire
Qui le voudrait ce négligé
Cependant homme à tout faire
Solidaire des personnes âgées
Qu'alors de force le supportent
Bêche leur jardin, plante les carottes
Vedette adulée dans le pays
Pour calembours, pas le dernier
Mais souvent durs à piger
Même à s'en torturer l'esprit
Tellement trivial et dégourdi
Toutes les minettes sont ses chéries
Bien entendu que pour plaisanter
Car ces demoiselles s'en méfient
Est-ce du lard ou du cochon
Riant tout jaune de ce cornichon
De ses bisous, s'en passeraient
Ex fonctionnaire des chemins de fer
Royalement, chez lui se terre
Dépanne ses potes, adroit de ses mains
En cas de problème, de suite il vient
Bien trop heureux de bavarder
Hurle de joie, à perdre haleine
Fan de football de St Etienne
Son maillot vert comme emblème
Qu'il quitte jamais, au diable l'hygiène
Vêtu de bric et de broc
Au point qu'il nage dans son froc
Ne faisant pas dans la nuance
Marie couleurs à sa convenance
Mais que de crasse en ses cheveux
Les lave rarement, ça pue un peu
Car selon lui, les tifs gras
En guise de bonnet, protègent du froid
Plus de famille, maigre entourage
Que des anciens, comme lui en marge
Trainant leurs guêtres en ce village
Ne lui fuient pas, n'a pas la rage
Sagement se tiennent à l'écart
De ce pouilleux, la gueule noire
On le soupçonne d'être rusé
De faire exprès nous polluer
S'il n'a pas fait de longues études
A acquis son certificat
C'est sûr en a reçu de rudes
Leçons de son maitre, pour quel exploit !
Cheminot la tête de l'emploi
Un peu radin du porte-monnaie
Pas de carte bleue ni de chéquier
Retire tout argent comptant
Juste pour s'offrir de temps en temps
Une brioche et quelques croissants
Modeste bombance, pas exigeant
Se fend de cadeaux pour ses fidèles
En l'occurrence, magazines
De l'an quarante, pour leurs nouvelles
Croyant ravir ses intimes
Qui les acceptent par estime
Pour son plaisir, de bonté ruissellent
Cependant au courant de tout
Car à l'écoute du moindre cancan
A l'improviste débarque chez vous
Pour le repas, s'y inviter
Pour partager un bon ragout
Ne manque pas d'air ce dégoûtant
Fourre ses doigts en son gros nez
Qui dégouline, pas mouché
En reprenant part de civet
Nul ne s'en plaint de ce citoyen
Faisant pas partie de ces clandestins
Pour les singer, va faire l'aumône
Car en secret ne manque de rien
Trompe son monde mais on le pardonne
Delà le suivre dans ses virées
Fouir les ordures, les détritus
Il ne faut pas exagérer
Car il y va de ma dignité
Mais lui s'en fout, s'en torche le cul
Fils d'ouvrier, de pauvre lignée
A son destin est résolu
Gémit jamais, toute honte bue
N'entendant rien de ces critiques
Va son chemin leur faire la nique
A ces faux derches, trop prudes chrétiens
Qu'à voir chez eux comment ils vivent
Pas de miracle, péquenots moyens
Qui devraient faire leur propre lessive
Fermer leur bec, crotté sans soins
S'il est gâté par la nature
Ça se lit pas sur sa figure
Pas frais bouillant question culture
Le respecte pour son âme pure
Prompt à agir en cas de besoin
Simple d'esprit au sens sincère
Le fréquenter me parait sain
« On crèvera tous de la même manière
Que l'on soit riche ou pauvre sur Terre »
De mon Mimile, ce commentaire
Qu'a su m'en inspirer ces vers
Comme quoi capable me distraire
Osant s'avouer, ses rudes misères
« Ce qu'il est porté de bon service
Jasent ces vieilles dames charitables
Bien trop heureuses, de ses avantages
Lui qu'a le cœur à l'ouvrage
Pas près jouer les misérables
Cache ses peines à ses complices
Secrètement supporte son vice
Restera toujours ours indomptable JC Blanc mai 2018 (roture que j'aime)