Un globe dans un globe

Il y a toute une vie dans ce globe. Des océans, des montagnes, des forêts. Ça palpite, ça s'enflamme... Parfois cela se trouble et s'éteint. 

Je me figure de la mousse. Celle que l'on trouve sur l'écorce et qui permet de ne pas perdre le Nord. Un vert ancien, teinté ça et là de brun. Au soleil je me figure plutôt un jeune lierre, clair et dansant sur la pierre... 

Toi quand je te vois, c'est l'océan que je perçois. Apaisant, mais toujours grondant au plus profond... Lorsque la tempête fait rage, je vois ses vagues déferler, lorsque la mer est calme, ses flots me bercent... J'aime ton regard d'eau. Il fait vivre mon regard de lierre. Il l'abreuve. Il le reflète. 

C'est fou tout ce qu'un oeil peut vous apprendre. Tantôt miroir tantôt mirage, il voit, mais bien plus encore il scrupte, il contemple, il perçoit même parfois... L'œil est un bien bel organe, mais surtout un outil précieux qui nous offre le plus beau cadeau et la pire malédiction à offrir à l'autre : son regard. 

Le regard, c'est le chant silencieux qui peut unir un être à un autre, un être au paysage, un être au monde. Regardez vous, en ce moment, que faites vous donc ? Vous me lisez. Vous lisez en moi au travers de quelque chose de totalement abstrait : des symboles. Des courbes, des traits, des points et des boucles qui ensembles forment une lettre. Une lettre qui forme un mot. Un mot qui forme une phrase. Une phrase qui forme une idée. Ne voyez vous pas la magie de la chose ? De vos yeux vous en arrivez à une idée. Une pensée. Peut-être même une réflexion. Peut-être même une émotion... 

Baudelaire voyait un hémisphère dans une chevelure. Moi dans un regard, c'est un monde que je vois. Celui qui se reflète dans l'œil. Mais aussi celui qui y vit. Un globe dans un globe...