Un monde parfait
vieufou
Il grimpa sur un tabouret pour prendre de la hauteur, afin de mieux pouvoir contempler ce nouveau monde, ce monde qu'il avait créé. Un monde purifié, débarrassé de tout conflit.
Un monde parfait.
Débarrassé des problèmes d'immigration, de l'idée même du racisme. Plus d'ethnies, de minorités. Plus de religion. Plus de prêtres, d'imams, de rabbins, plus de fidèles ni de fanatiques. Plus de pauvres, ni de riches. Plus de travail, de chômage. Plus d'inégalités, de différences, de préférences. Plus de gauchistes ni de fachos. Plus de pédés frustrés ni d'hétéros coincés. Plus de bouffeurs de tofu ni de carnivores téléphages. Plus de flics, plus d'armée. Plus de veuves ni d'orphelins. Plus de handicapés, de défavorisés. Plus de...
Plus aucun de ces mots n'avait désormais de sens. Plus aucun de ces gens... il avait éliminé tous ceux dont les gênes étaient imparfaits. Aussi ses opposants, tous ceux qui lui faisaient barrage. Puis ses alliés, parce qu'il fallait se méfier...
Un monde parfait.
Il avait également débarrassé le monde de la peur du nucléaire.
D'une simple pression sur un bouton.
Rouge.
Après un dernier regard à l'univers en feu, il ajusta la corde et, serrant les dents, donna un coup de talon dans le tabouret, qui se renversa dans un fracas sourd qu'il n'entendit même pas. Son corps se mit à se balancer doucement dans l'air brûlant.
Le Président n'avait jamais supporté la solitude.