Une famille redécomposée

scribleruss

Roman triste. 2 Familles je vous hais. André Gide

- Suite du chapitre précédent -

Chapitre 2

_

   La première, l'évincée, la cancéreuse du sein, celle qui croyait en l'Amour se prénommait Apolline. La seconde, la bien en chair, la déculottée, la jalouse qui ravit à la première son Prince charmant d'un instant se prénommait Isa.

   Le Prince charmant se nommait Alexis. Prince charmant ! l'amour rendra toujours aveugle, et les filles et les femmes toujours perdront la tête, le prince charmant qui ne méritait pas la majuscule finit par se lasser de la déculottée.

    Déculottée Isa ? Le terme est leste mais lsa l'était bien davantage.

  Bien faite, les formes pleines, l'oeil et la lèvre professionnels, une inflexion de voix séduisante, elle savait se défaire, s'ôter, dévoiler un sein, lever la robe ou la jupe jusqu'au liseret du slip dont la vision déclenchait irrémédiablement chez le mâle, l'éjaculation de la bête.

     Ainsi dans l'instant trouble l'homme n'est plus le roseau pensant, il est le mâle, il n'est plus le mâle, ni même la bête en rut, il est cette éjaculation confondante ....

    Et Isa un peu salope comme toutes les filles de cette trempe  s'amusait sournoise, un sourire en coin, le regard sur l'étoffe du pantalon de l'amant soudain confus, penaud, et sans grande allure, dépossédé de sa superbe, anéanti par la tache tranquille, heureuse qui s'épandait lamentablement et Isa lui disait cynique Allez t'inquiète Paul, ça va vite disparaître, tu veux que je te passe mon sèche-cheveux  ...

   Paul, Jean, François, les autres et Alexis ... elle les humiliait.

   Il fallait la claquer, ils ne la claquaient pas. Ils ne la claquaient pas parce qu'ils ne l'aimaient pas. Ils la voulaient seulement donc ils la craignaient. L'on craint les femmes que l'on veut.

    .

   La première que l'histoire appellera désormais Apolline et non plus la première puisque nous ne sommes plus au XIII ème siècle en Chine quand les Seigneurs avaient leur première dame, leur deuxième dame, leur ... Mais quelle chance ils avaient ces Seigneurs mais hier était un autre jour ...

    Donc Apolline avait un profil qui était l'antithèse de celui d'Isa, elle avait un physique à la Giacometti, une complexion d'anorexique qui n'induisait aucune sensualité, certes souriante, spontanée, sans calcul, moins instruite des choses de l'amour, et plus culottée...  Isa avait eu un boulevard....

    Et tandis que le prince Alexis copulait, fécondait, bâtissait, Apolline brûlée par sa passion avortée se traînait à travers les leurres d'une sentimentalité littéraire qu'exacerbait l'enseignement des Lettres qu'elle excerçait.

  L'acquisition d'une maison, ah ! la maison, ce môle dont on rêve, auquel on tient et qui vous semble l'empirée de l'existence, le parangon d'une réussite, raviva son existence, mais pas nécessairement sa flamme à l'égard de l'impétrant qui malgré le maniement de ses fioles en travaux pratiques de chimie n'avait pas trouvé la formule qui transformât leur lien en une alchimie heureuse des âmes.

  Mais parfois quand le bonheur esquisse un mouvement le malheur se hausse du col. Et c'est ainsi qu'un soir la nouvelle s'abattit littéralement sur les épaules d'Apolline.

   Elle sentit les griffes du rapace lui enserrer les épaules.  Son médecin traitant ne l'appelait toujours pas pour lui donner le résultat des examens qu'elle avait subis. Elle prit le téléphone.

     - Ah mademoiselle, oui j'ai vos résultats, j'ai beaucoup été pris ces temps-ci , oui ils sont sur mon bureau, j'allais vous appeler... Venez à mon cabinet ... Oui c'est ça ..

   Elle se rendit à son cabinet. Mais elle savait ce que les mots veulent dire. Le doc avait beaucoup été pris ces temps-ci.

_                                                     µµµ

   A Suivre

_



Signaler ce texte