Vacances en famille -35-

Tout en sirotant mon jus d'orange que je trouve excellent (bien meilleur que ceux que je bois à la maison), je regarde la grande cheminée devant laquelle est venue se coucher la grosse chatte. Je trouve ça tellement paisible! Comme personne ne dit rien, Germain met un disque de musique classique, tiens "Lettre à Elise"! Je commence à parler de ma soeur qui aime cette musique, Germain enchaîne en disant qu'elle joue très bien du piano. Papa ajoute qu'elle travaille beaucoup cette année mais qu'il n'y connaît rien (petit rire de circonstance auquel Germain et moi nous nous joignons). Musique aidant, l'atmosphère commence à se détendre, Germain interroge Papa sur ses goûts musicaux, son travail, ouh ouh! je suis là moi aussi! Je me demande pourquoi il s'intéresse tant à mon père et puis je comprends que c'est une tactique pour préparer le terrain:

"C'est bientôt les vacances de février, vous allez skier un peu? Tu sais skier Margaux?

Je vois très vite où il veut en venir, je réponds:

- J'ai fait un peu de ski de fond quand j'étais en primaire. J'aimais bien ça. Et puis j'aime bien les compétitions de ski à la télé. Malheureusement nous ne sommes jamais allés en vacances à la neige.

- Dommage que nos vacances soient décalées sinon je serais bien allé en montagne avec vous.

Je saisis l'opportunité et dit:

- Oui, ça aurait été bien. On se serait bien amusé. Il y a de belles montagnes dans la Drôme, hein Papa?

- Oui, on ira un jour répond mon père sans grande conviction.

- Oui ce serait bien dit Germain enthousiaste. Vous me raconterez d'accord?

- Je t'enverrai une carte postale j'ajoute en espérant que mon père invite Germain à la montagne, mais il n'est pas dupe, vu la tête qu'il fait. Cette conversation le barbe ça se voit.

- Oui, on verra. Il faudrait que je pose deux ou trois jours.

- Oh s'il te plaît Papa, ce serait bien d'aller à la montagne avec Germain! j'ose une tentative.

- Allez finis ton jus d'orange, Margaux".

J'obéis, un goût amer dans la bouche. C'était bien tenté, n'empêche. Oui, je sais je ne suis pas sympa avec Papa, je décide de le laisser tranquille donc. Germain enchaîne en nous parlant des choses à voir à Troyes, les maisons à colombages, le centre historique qui est en forme de bouchon de Champagne, il y a aussi beaucoup d'églises et d'édifice religieux, de musées aussi. Papa écoute d'une oreille, il doit avoir hâte qu'on passe à table ou de prendre la voiture carrément! ça se passe mal en fait, cette visite à Germain. Et je le regrette bien. Finalement Rose apparaît dans le salon avec un tablier à fleurs des plus charmants comme ses sourires et annonce:

" Les jeunes, nous mangerons dans le salon, vous voulez bien mettre la table? Germain, j'ai déjà sorti la nappe. Pour le reste tout est dans le vaisselier". Puis elle se tourne vers mon père et l'invite à se rendre dans la cuisine.

"Vaisselier", que ce mot est joli! J'adore mettre la table quand on reçoit des invités, pour moi c'est un vrai moment de fête, aussi la magie opère quand Germain et moi dressons la table autour de laquelle nous nous réunirons tous. La nappe est à fleurs lavande, elle est très jolie, ça fait printanier, ça rend bien avec les assiettes blanches. Deuxième moment où je suis seule avec le garçon que j'aime, c'est le paradis! Il a toujours ce sourire confiant et rassurant que j'aime tant. Nos mains se touchent quand on met les couverts ensemble, grand frisson pour moi, pour lui je ne sais pas. La fratrie commence à descendre et à envahir le salon, je suis un peu mal à l'aise, Pierre, l'aîné, dit:

"On peut changer de disque? La musique classique c'est pour les vieux! (Si Marielle était là...)

- Demande à Margaux d'abord! répond Germain, galant comme tout.

- Oui, si vous voulez je dis timidement.

- On peut se tutoyer dit Sandrine la benjamine.

- Oui, répond l'autre soeur dont j'ai oublié le prénom.

- C'est sympa, merci je réponds.

Le grand allume la télé, sans demander la permission à ses parents, je me fais la remarque. C'est cool ici!

- Y a rien en ce moment à la télé dit Germain en signe de reproche.

- Ouais, t'as raison. Et il s'affale dans le divan en me disant:

- Alors Margaux tu viens de Valence? C'est comment là-bas?

- Oh ce n'est pas aussi joli qu'ici, malheureusement. Y a un joli parc où l'on s'est promené avec Germain, un château aussi.

- Ah ouais c'est pas mal dit Pierre. Je remarque encore qu'il parle fort, pas comme Germain ou Papa.

- Germain nous a dit que tu as une virtuose du piano chez toi. C'est chouette, ça!

- Oui, c'est Marielle. Le piano c'est sa passion, elle est tombée dedans quand elle était p'tite je plaisante.

- Et toi c'est quoi ton dada?

- Pierre, tu veux pas aller voir dans la cuisine si Maman a besoin de quelque chose? Dis-lui qu'on a fini de mettre la table dit Germain un peu agacé.

- ça va je remballe! Il prend un croissant et l'engloutit en moins de deux.

- On va bientôt manger! dit la soeur dont j'ignore le prénom.

Je les regarde un peu amusée, Germain me dit comme en s'excusant:

- C'est un spontané mon frère. Aucune tenue!

- ça, je confirme " disent les deux soeurs en même temps.

On se croirait dans une pièce de théâtre, je suis bien avec eux.

(à suivre)