Versant

jep-heretik

Ils ne les voient pas ! Ces saloperies me bouffent, me crèvent, me gangrènent et ils ne les voient pas ? Ils ne veulent pas les voir oui ! Et pourquoi d’après vous ? C’est eux qui les ont créées, une saloperie d’arme bactériologique à laquelle je me suis exposé ! Une expérience provenant d’un labo secret qui a échappé à leur contrôle. Ceci est un complot ! Qui veulent-ils éliminer ? Préparent-ils un génocide ? Ils ? Oui, mais qui sont-ils ? Foutre Dieu, je n’en sais rien, mais que Dieu m’en soit témoin, si j’en réchappe, je ferai lumière sur cette sombre machination. Ils ont été jusqu’à dire que les cicatrices que ces bestioles ont creusées dans ma peau étaient des brûlures de cigarette. 

Ils osent dire que je m’inflige ces mutilations pour essayer de les convaincre que ces trucs sont en moi. Mais je crois rêver !

Ah oui mais c’est vrai, je vous parle de ces parasites sans les avoir définis, en effet... Mais essayez de comprendre la haine que ces soi-disant médecins m’inspirent.

Passons... Je finirais de les incriminer plus tard.

Revenons-en au fond du problème, à la raison pour laquelle je suis dans cette pièce nue, blanche, dénuée de fenêtre, éclairée seulement par un néon dont les oscillations m’abrutissent. Pourquoi suis-je donc alité ? Je tarde, je tarde il est vrai et je doute que votre patience soit sans limite.

Commençons, c’est arrivé il y a 3 semaines, dans la nuit du dimanche au lundi, il devait être 3h du matin. Je ne saurai dire ce qui m’a réveillé, mais j’étais en sueur. La douleur vint bien plus tard. Enfin je parle de douleur mais ce n’en était pas vraiment une à cet instant. Comme si dans mon bras bouillant de sueur, on injectait une douce fraîcheur engourdissante. Soulagé, je m’endormais à nouveau.

J’ouvrais à nouveau les yeux, il faisait jour et plus mes yeux s’habituaient à la lumière du zénith, plus j’observais quelque chose de bizarre, d’effrayant... Quelque chose se déplaçait sous ma peau... La chose s’arrêtât à la hauteur de mon poignet, ne laissant apparaître qu’une petite bosse longiligne. Je ressentis une douleur intense, la bosse devenait rouge et je sentais ma peau se craqueler peu à peu. Puis un jet de sang, suivi par une sorte de petite fleur aux pétales métalliques et au bulbe nacré.

Aussi effrayante soit la scène, elle avait quelque chose de magnifique, de poétique. Une fleur venait de naître au cœur de mon poignet ! Mais alors que je regardais avec douleur et émerveillement mon poignet, la fleur décida de s’extraire. Et un petit collier de perle se posa nonchalamment sur mon bras en poussant un gémissement aigu. Je l’imitais.

C’était un ver, un putain de ver ! Mais je pense que vous imaginez mal cette ignominie. Ainsi, je vais tenter de vous le décrire. C’est donc un ver comportant sept anneaux ressemblant à des perles de couleur blanche jaunîe par la cigarette, chacune de ses perles doit faire un demi-centimètre de diamètre et celles-ci sont séparées par une couronne de poils bruns. Oui certes, ça n’a rien de méchant, si on occulte le fait que cette salope vient de sortir de mon bras, mais ça, c'est sans compter sa tête. Ce truc a une tête improbable, elle ressemble de près aux autres anneaux, à la différence qu’elle possède ce qui semble être deux yeux noirs. Sa gueule est une sorte de petit bec acéré séparé en quatre, et le plus fou là-dedans c’est que ce soi-disant bec tourne ! Le ver m’a regardé, puis s’est dirigé, toujours en se déplaçant sur mon bras, vers mon coude. Je le regardais, transi.

L’animal ne tarda pas à planter sa tête au creux de mon coude, provoquant chez moi en plus de la douleur, une crispation nerveuse. J'essayai de saisir la bête mais à ma grande surprise, le corps de la bestiole diminua de volume, et ce que je croyais être des poils se hérissèrent et durcirent. Le ver était devenu, en se contractant, oursin... Si bien qu'en m'y frottant, je m'y piquais...

Je pensais au pire en retirant ma main douloureuse de l'animal. Et si cette saloperie se contractait en moi ?
J'ai plus peur de lui que lui de moi, j'en suis désormais persuadé. Sinon pourquoi se permettrait-il tant de libertés vis-à-vis de moi ? Il se montre à moi sans une once de crainte, mais je ne sais pourquoi, vous craint...

J'observais toujours la chose avec crainte et alors que celle ci était toujours contractée hors de moi, je profitai de l'occasion pour m'en séparer. J'attendais que la créature dégonfle...
Elle n'aurait pas de répit ! Je l'attraperai dès qu'elle commencerait à relâcher ses défenses. Je m’arrangerai pour qu’elle se détache de moi et la renverrai en enfer d’un seul coup de talon en espérant ne pas m’empaler le pied. Dans les faits, l’acte fut bien moins épique... Je le balayai de la main, ce qui le fit cracher d’innombrables petites perles incandescentes. Il s’écrasa sur mes draps en les brunissant et en s’enfonçant dans mon matelas de frayeur. Je le repoussai d’un ultime coup de paume en dehors de mon lit. Mais alors que j’étais sur le point d’enfin m’en débarrasser, cette salope me mordit si fort que j’en ressens encore la brûlure en vous relatant cette histoire.

Pourquoi n'esquissez vous pas la moindre réaction ? Pourquoi cherchez-vous à me fuir ? Je me déstabilisais à mesure que je tempêtais et finis par tomber. Ma vue se troubla pendant la chute. Je me voyais sombrer dans une fosse remplie de ces bestioles. Je touchais le sol, et en les écrasant me brûlais et me lacérais bras et dos. Je recouvrais peu à peu la vue... Le choc fut terrible ! Alors que je me relevais péniblement et que ma vue s'éclaircissait, je les vis ! Ce que je croyais être des parasites... étaient... des mégots...

Mais alors... vous... vous êtes dans ma tête et vous n'en avez tout de même rien à foutre !?

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