Visite incognito de leste chouraveur
Jean Claude Blanc
Visite incognito d'un leste chouraveur
Du genre pestiféré, sûrement le premier
Retraité éclopé, en ma turne isolée
Recevant que le toubib, qui veille sur ma santé
N'ayant que rares sous, juste de quoi bouffer
Ce jour mal m'en a pris, ainsi de m'absenter
C'est à peine croyable je me suis fait voler
Bien sûr éventrée, ma porte et mes volets
Mis sens dessus dessous, ma modeste demeure
Hélas pour pas grand-chose, aucun bijou de valeur
Selon les policiers, le coup de jeune voyou
Pas piqué mes guitares, mes livres, mes carnets de notes
Trop bête illettré, fraudeur manquant de goût
Me dois le remercier, artiste n'ai guère la côte
Par contre très habile, ce leste monte en l'air
Parcourant chaque étage, rapide en un éclair
N'a pas daigné me faucher, mes pulls de misère
Tellement durs à revendre, même chez un antiquaire
De même mes poèmes, ne valant pas très cher
Pourtant je le regrette, auteur de riches vers
Il aurait pu au moins m'en faire publicité
Auprès de recéleurs, orfèvres en la matière
Qui préfèrent l'or et le fric, pour pas être repérés
Convoqué les gendarmes, se sont pointés de suite
Comme à l'accoutumé, jeu de trivial poursuite
Hélas bien trop tard, chapardeur pris la fuite
Fait ma déposition, seulement par principe
Doit être loin d'ici, ce mystérieux sale type
Mais restant là planté, constatant mes dégâts
Mes placards vidés, les serrures en morceaux
Inutile préciser, que l'œuvre d'un hors la loi
Encore amateur, le diable dans la peau
Usant d'un tournevis, boulot de saligaud
Même pas refermer la fenêtre, pour me protéger du froid
S'est tiré en silence, pas de voisins aux carreaux
Passé toute ma journée à vérifier afin
Que dans les chambres de mes gosses, il n'y manquait rien
Véritable bordel dans celle de mon gamin
Pas de chance pour l'autre gredin, que pauvre et maigre butin
Délaissant l'essentiel sans doute brave garçon
Par considération, vu mon âge avancé
Ma pipe, mon internet et ma télévision
Pétri de bienveillance, pour respectable pépé
N'a pas laissé de traces, tout propre derrière lui
Me ménageant ancêtre à la barbe fleurie
Par les flics questionné, enquêtant vite fait
Mais où étais-je donc, en ce fameux 1er mai ?
Aurais-je une idée de mon cambrioleur ?
Tentant faire le tour des crapules du quartier
N'ayant que des copains, tous la main sur le cœur
Tranquille depuis des lustres en ma verte vallée
S'agissait porter plainte, pour être remboursé
De ces tas de dommages, par chance assuré
Pour ça autre galère, personne au bout du fil
Mutuelle des fonctionnaires, de la joindre difficile
Tellement de préjudices, hélas à réparer
Soudain pris de colère, pour ce sombre pickpocket
Lui aurais fait son sort, une balle dans la tête
En fait humaniste, d'une naïveté parfaite
D'avance excusé, cet acte malhonnête
Le gendarme n'a pas ri, en sa gendarmerie
Me tendant la perche pour que je vise n'importe qui
Fallait un accusé, à mettre en prison
Evoquant par exemple, un de ces bronzés marrons
Car dans nos campagnes, dès le soir déboulent
Ces clandestins rusés, pour déplumer nos poules
D'ailleurs la France est pleine, de ces bandes de vauriens
Donc conclusion logique, virer ces bohémiens
Sans entendu Marine, va nous sauver enfin
Marche pas à ces calculs, pige pas ces théorèmes
Faute à la République, qui accouche des extrêmes
Pourchassant ses escrocs, les mêmes qu'au pouvoir
Planquent leur blé en Suisse et brillent dans l'isoloir
Assez de ces discours, tournés tartes à la crème
Tandis que détroussé, je traine l'âme en peine
Revenons à ce foutoir, que j'ai subi en mai
Pour moi simple péquin, une vraie calamité
Pénards sur mes sommets, personne pour me déranger
Voilà qu'a débarqué, un de ces malfamés
Sûrement accompagné, d'une volée de ramiers
Résultat édifiant, les larmes pour pleurer
Blessure à jamais, intimité violée
Précieux menus objets, disparus désormais
Qui vont me tourmenter, comme mon chapelet
Cadeau de ma Communion, la gourmette de mon père
Symboles d'autrefois que ma conscience s'y perd
Mais pour le malfaiteur, à mettre aux enchères
En échange d'un peu de dop, dans d'obscures cités
Trésors irremplaçables qui marquent la mémoire
Mais ces fripouilles s'en moquent, se contentant du cash
Refilée à vil prix, cette parcelle d'Histoire
Blanchie en purs dollars, par ces trafiquants lâches
Pourrais comme certain, leur promettre vengeance
Avec une arme à feu, leur dégommer les fesses
Conseillé, soutenu par les réacs en liesse
Mais je n'ai pas le sens de prendre ma revanche
Sans doute fervent chrétien, abreuvé de vin de messe
J'aurais plutôt tendance à flatter mon ego
Pas en faire tout un plat de ces bandits manchots
Tellement avancés, mes nippes sur le dos
Repartis poches vides, vers un autre étourneau
Leur demande seulement avec politesse
Qu'ils ne reviennent pas, ça pourrait me vexer
Refoutre un sacré souk au sein de toutes mes pièces
Déjà tout piraté, pourquoi recommencer
Par Brassens inspiré : « Stances à un cambrioleur »
Lui aussi spolié à Sète, sa modeste demeure
Pris ça avec humour, poète inspiré
Philosophe aigrefin, moraliste à ses heures
Même que ses partitions, posées et bien en vue
L'autre non initié, s'est retrouvé cocu
Que feuilles de papiers, il n'en a pas voulu
Sûrement qu'il y a un dieu pour versificateurs
N'est pas rêveur qui veut, comme marchand de bonheur
D'ailleurs n'intéresse pas astucieux maraudeurs
Au-delà de cette psychose, qui m'empêche de dormir
Je crains sincèrement que le pire est avenir
Tellement d'indigents sur notre pauvre Terre
Viendront assassiner, ces pays qui prospèrent
En seront les victimes, ceux qui ne peuvent se défendre
Ces français ordinaires, moutons en société
Aux ordres d'un Etat, qu'a cessé d'entreprendre
Ces hordes d'émigrés, par manque de budget
Le mien, mon cher voleur, peut-être de cette race
(Syndrome de Stockholm, j'en suis atteint de guerre lasse)
Pour se faire oublier, ne reste pas en place
Aimerait se faire passer, comme égaré de Calais
Alors qu'il possède sa carte d'identité
Habite non loin d'ici se fendant d'amitié
Qu'une supposition, parfois réalité
A devenir anxieux, toujours se méfier
Losque passe sur la route une bagnole pas du coin
Tout ce qui n'est pas de chez nous, qu'un espion d'étranger
Sauf le Jéhovah, pauvre diable de témoin
Qui vient prêcher la foi, mais reçu coups de pieds
C'est ce qui m'est arrivé, ce jour de malheur
Où je devais sonner, la brigade légère
Un couple de ces religieux, en rajoute à ma peur
Osant malgré mon drame, m'apprendre péché de chair
Je les ai éconduits, déjà comblé d'enfer
Depuis me suis promis, de leurrer mes aigreurs JC Blanc juin 2018